Le passé de Sherkhan - Part.2

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Depuis ce jour, on ne s’est plus quitté. On a commencé à se fréquenter doucement avec Rena, a construire un amour solide et Nona a très vite fait parti de notre quotidien. Naturellement, nous avons formé un couple et je suis très vite tombé amoureux de lui. Chaque fois que je me libérais de mes obligations, c’était pour le retrouver. Mon cœur battait rien qu’à l’idée de penser à lui, à son sourire, entendre sa voix quand il me parle, m’appelle et prononce mon prénom.

Nous étions heureux tous les trois ensemble. On formait une famille parfaite et j’ai tout de suite considéré Nona comme ma propre fille. Mon père ne s’est jamais opposé à notre union, bien au contraire, il nous a donné sa bénédiction. Rena a accepté de partager sa vie avec la mienne en me disant oui.

Cependant, le jour de notre union n’est jamais arrivé.

Notre idylle s’est effondrée un soir de tempête. La pluie s’est mise à tomber avec rage et le vent à déferler avec puissance pour trancher l'air en deux. C’est tout le royaume qui est secoué par le chaos.  La foudre est tombée plus d’une fois sur la capitale comme pour annoncer la fin du monde.

Ce soir-là, nous venions de faire l’amour pour la première fois avec Rena. Nous avions partagé un moment fort, rempli de délicatesse et de complicité. Je m’étais confessé à lui sur mes sentiments pour la première fois, mais… mais je n’avais pas eu de réponse de sa part.

—Je te demande pardon.
—Hein ?

Je me redresse légèrement quand je l’entends s’excuser alors que nous nous apprêtons à nous endormir l’un contre l’autre.

—Si tu parles de ce qu’on vient de faire, je…
—Non, je ne parle pas de ça, me coupe-t-il alors.
—Alors de quoi veux-tu parler ?

Rena ne répond pas tout de suite, se lève pour attraper son fin peignoir de soie. Il noue son seul habit à la taille grâce à la ceinture puis il fait le tour du lit. Les alphas ont une très bonne vision dans la nuit, je n’ai aucun mal à distinguer sa beauté, même dans la pénombre. Je décide de faire de même et de me lever pour le rejoindre. J'attache aussi mon vêtement avant d’arriver à sa hauteur.

—Le monde se déchaîne.

Je lève simplement mon regard sur la grande fenêtre de chambre pour observer le temps se déchaîner. La pluie s’abat violemment sur la vitre et le vent souffle avec une grande intensité de l’autre côté. Je me mets dans son dos pour passer délicatement mes bras autour de ses épaules pour le serrer contre moi.

—Rena, qu’est-ce qui ne va pas ?

Je le sens trembler contre mon corps, sur le point de pleurer.

—Je ne peux pas, Sherkhan, je ne peux plus faire semblant…

Il se dégage et s’éloigne pour reculer de la fenêtre tout en tenant la boîte à musique qu’il m’a offert. Il me tourne le dos quand je veux m’approcher de lui.

—De qu…
—Je ne peux pas te retourner tes sentiments.

C’est la première fois qu’on prend mes sentiments dans une main pour les jeter. Je me suis senti blessé par les mots sur Rena, humilié alors que je venais de me confesser à lui.

« Je ne peux pas te retourner tes sentiments ».

—Ren…
—Non, ne t’approche pas de moi ! Me rejette-t-il, tu me dégoûtes.

Comment peut-il me dire ça après ce qu’on vient de faire ? C’est la première fois que ma main tremble de cette façon, que je me sens impuissant face à une situation. J’ai beau me poser mille et une question, je ne trouve aucune réponse.

— Je déteste les alphas, te séduire a été un jeu d’enfant ! Je ne pensais pas que tu pouvais être aussi stupide, Sherkhan. Tu fais un prince bien naïf.

Je ne peux pas croire que ce soit la nymphe dont je suis tombé amoureux qui me parle ainsi. Le Rena que j’aime est mignon, drôle et attentionné. Il possède un cœur énorme et est gentil. Jamais il ne m’a regardé avec ces yeux là, ni même parlé de cette manière.

—Alors… Alors tout ceci n’était donc pas sincère ?
— E-Exactement !

Il a beau me crier dessus, dire que je le dégoûte et qu’il n’a jamais été sincère avec moi, je ne recule pas. Je ne crois pas en ses paroles car tout ça ne peut pas être uniquement un mensonge de sa part. Alors je m'avance vers lui afin de lui prouver ma détermination. J’aime Rena du plus profond de mon cœur, son sourire m'a plus d’une fois sauvé.

—Tu veux simplement que je porte ton enfant pour ensuite te débarrasser de moi ! Tu peux que je connaisse exactement le même destin que ma sœur !
—Quoi ? Mais… pas du tout !

De quoi parle-t-il ? Jamais je n’ai eu l’intention de lui demander un tel sacrifice. Je sais parfaitement qu’une nymphe meurt en donnant la vie alors même si un enfant est la plus belle chose qu’un homme puisse avoir de son partenaire, je ne peux pas accepter que Rena porte le mien. Ma mère s’est sacrifiée pour me mettre au monde, je respecte son courage, salue sa détermination et admire sa force. Comme la sœur de Rena, ma mère a certainement dû avoir très peur. Mon père me dépeint une femme forte mais la vérité est plus cruelle que ça, ces femmes ont toutes les deux souffert.

La lumière qui se trouve dans le cœur de Rena se transforme en ténèbres puissantes. Elles m’empêchent de l’approcher. Une aura puissante, une sorte de chant magique le protège. Quand je tente de pénétrer cette barrière, c’est tout mon bras qui se retrouve recouvert par les ténèbres. Alors ce que l'on raconte sur les nymphaë est vrai ? Qu'en cas de désespoir, elles rependent les ténèbres autour d’elles ?

—Sherkhan, recule !

Mon père ainsi que ses hommes arrivent pour arrêter Rena. Chacun d’entre eux visent mon compagnon sur ordre de mon père avec leur fusil, mais je m’interpose, près à mourir pour le protéger.

— Si nous ne faisons rien maintenant, tu te transformeras en un être démoniaque !
—Je m’en fiche, je ne vous laisserai jamais lui faire de mal !

Puis je me tourne vers Rena pour qui j’éprouve tant d’amour. Je n’arrive pas à lui en vouloir car je sais combien il est dur pour une nymphe d’exister. Sa propre sœur a trouvé la mort auprès d’un alpha en donnant naissance à son enfant. Rena s'est peut-être servi de moi pour rependre ce mal, mais il n’y a pas que du mensonge dans ses paroles. Alors tant pis si je deviens un monstre aux yeux du monde, je préfère mourir avec Rena que de laisser ces gens me l’enlever. Par la force, j’entre dans la barrière pour me changer complètement en une terrible créature.
La transformation est douloureuse, je crie aux pieds de Rena qui reprend partiellement connaissance en entendant ma détresse. J’ai l’impression d’exploser de l’intérieur, de sentir mon sang coaguler. Ma peau change, elle devient rouge. Des pattes arrières poussent dans mon dos pour me transformer en une horrible créature. Le bras qui a touché la barrière magique me faire atrocement souffrir. J’entends à peine mon père hurler de l’autre côté.

—Sherk…han !

Rena revient partiellement à lui et arrive à mon chevet en se rendant compte de ce qui est en train de se passer. Il pleure et tente par tous les moyens de me sauver, mais il est trop tard pour me ramener. Celui que j’ai été jusqu’à maintenant à succomber aux ténèbres parce que je n’ai pas su le protéger.

—Pardonne moi, petite nymphe…
—Sherkhan, je… tente-t-il d’articuler. Je suis… désolé, je… moi aussi, je t’ai…

Je suis incapable de bouger, incapable de le rattraper quand il tombe en arrière, une balle dans le cœur.

— Re…Rena ? Rena, parle moi…

Dis moi quelque chose, ce que tu veux. Je t’en prie, regarde moi, attrape cette main que je te tends et rassure moi de ta voix angélique. Je t’en prie, ne me laisse pas seul avec cette mélodie.

Je n’arrive pas à bouger, à tendre ma main vers lui pour m'assurer qu’il va bien. Son sang se repend tout autour de son corps inerte alors que le chant magique se dissipe enfin. Je regarde son corps sans vie, la gorge nouée, le cœur rempli de regrets et les yeux de larmes alors qu’il serre toujours contre lui la boîte à musique.

Les nymphaë ont le pouvoir de nous changer en monstre quand leur cœur se retrouve prisonnier des ténèbres.

BLUE HAIRED NYMPH BOYOù les histoires vivent. Découvrez maintenant