BLUE HAIRED NYMPH BOY

26.

« Il vous faudra traverser la forêt du Nord pour rejoindre la montagne. Au sommet, vous trouverez un artefact permettant d’améliorer votre lanterne, mais il vous faudra affronter un puissant adversaire ».

Quand Sherkhan a demandé à quoi ressemblait ce redoutable adversaire, Dame Aveleen est restée silencieuse face à sa question.

Nous voilà à présent dans la forêt du Nord où vivent de puissants monstres. La magie de Vévé combinée à la force de Sherkhan nous permettent d’avancer dans cet endroit dangereux. Cette forêt regorge du piège et comme Bel et Drimir peuvent voler, ils nous servent de guides. Mais ici, le pouvoir des fées est inefficace. Bel ne peut donc pas se servir de sa magie féerique. Les flammes de Drimir pourraient nous mettre en danger en causant un violent incendie.

—Allez, on continue.

Pour ne pas se perdre, il faut suivre les papillons lumineux mais avec un chemin aussi incertain et rempli de monstres, il est difficile d’avancer sereinement. Même si notre équipe est suffisamment puissante pour en finir avec ces créatures, Vévé est là pour soigner nos blessures.
Après une longue journée de voyage, nous montons le camps pour ce soir. Drimir s’occupe du feu pendant que le reste du groupe se charge du campement. Puis quand cela est fait, nous passons à table. Avant de partir, nous nous sommes arrêtés au marché pour faire le plein de provision et pour la première fois, je goûte à la cuisine de Sherkhan.

—Mh… ! C’est délicieux !

Quand Sherkhan tourne son visage vers moi en entendant mon compliment, nos regards se croisent. Je rougis avant de baisser les yeux, intimidé. Je… chaque fois que la lune se montre dans le ciel, je repense à ce qu’on a fait et cela m’embarrasse. Je me replonge dans mon repas et termine mon assiette pour ne pas penser à ça.

—Nous repartirons à l’aube alors tâchez de vous reposer.

Sherkhan décide de monter la garde pour cette nuit. Vévé s’assoupi contre le tronc d’un arbre alors que Drimir et Bel dorment ensemble. Je ferme les yeux mais impossible de trouver le sommeil. Je pense à beaucoup trop de choses pour m’endormir.  Je… je n’arrête pas de revoir le prince en boucle dans ma tête.  J’appréhende nos retrouvailles.

Alors que Sherkhan est parti en ronde, je m’en vais à l’étang d’à côté pour me rafraîchir et changer les idées.  L’eau est si bonne que je décide de retirer mes vêtements pour en profiter un peu. Je regarde que personne ne me voie et plonge dans l’eau.

La lune est magnifique ce soir encore.  Le temps de l’admirer, je refais le point sur notre aventure et repense à mes débuts. Je souris en me remémorant notre première rencontre avec Sherkhan. Jamais je n’aurais pensé tombé amoureux de lui. Il est un être maudit d’une nymphe que je compte bien sauver de sa malédiction. Je n’oublie évidemment pas Drimir et son tempérament de feu et également Vévé qui a su trouver sa place au sein de notre groupe.

C’est égoïste parfois de penser cela mais… mais sans la trahison du roi et du prince Alsvieth, jamais je ne serais ici. Peut être qu’à cette heure-ci, j’aurais fini par quitter Lastalcia pour épouser un démon pour porter sa descendance.

—?!

Je sursaute, ma lanterne à la main pour me protéger. Quand je me retourne, je découvre avec la lumière Sherkhan. Lui aussi est surpris de me voir ici, qui plus est, nu.

—S…Sherkhan ?!
—Chut, tu vas réveiller tout le monde si tu hurles de manière aussi forte.

Sherkhan s’avance vers moi pour pénétrer lui aussi dans la source et s’installer contre les pierres pour se détendre. Je m’assois avec lui tout en gardant une certaine distance. Je… Je n’ose même pas le regarder… mon cœur s’emballe à l’idée de le savoir si près de moi, nu lui aussi. Il a noué ses cheveux en un chignon négligé qui font ressortir ses traits si masculins. Le visage de Sherkhan a quelque chose d’envoûtant, à chaque fois j’ai l’impression d’être le seul à me prendre la tête.

—Qu’est-ce qu’il y a ? Me demande-t-il en se mettant à l’aise, je te fais peur ?

Une main devant la poitrine, je rougis la tête baissée.

—N-N…on.

Puis c’est le silence. Pendant une longue minute, Sherkhan ne dit rien. Puis au bout d’un moment, il rompt le silence.

—Tu me détestes pour ce que je t’ai fait ?
—Ehh ?

Sherkhan fait allusion à cette nuit là.

— Sher…
—Je n’aurai jamais dû poser la main sur toi, mais je n’ai pas su me contrôler en sentant ton odeur.

Je regarde mon propre reflet dans l’eau pendant qu’il se confie.

—Parfois, j’ai du mal à croire que tu n’aies pas encore eu tes chaleurs. 

Mes yeux dérivent sur l’image que me renvoie l’eau de son visage. À travers la source, nos regards se perdent l’un dans l’autre.

—Je suis sincèrement désolé si je t’ai fait du mal cette nuit là.

Pourquoi Sherkhan s’excuse-t-il ? Je… il ne m’a jamais fait de mal, bien au contraire.  Sherkhan m’a toujours touché avec gentillesse. Et je ne parle pas que de notre union. Non, de toutes les fois où ses grandes mains m’ont caressé. Parfois, elles peuvent être maladroites mais jamais pour me faire du mal. Je réalise que nous avons encore beaucoup de mal à communiquer à cause de nos natures opposées et que notre rapprochement ne suffit pas à tout résoudre.

—Je ferais bien de retourner monter la garde, m’indique-t-il tout en sortant de l’eau.

Mon corps bouge tout seul pour le retenir. Sherkhan a pourtant la force de me rejeter mais il ne fait rien. Je l’enlace dans son dos pour l’empêcher de partir.

— Ren ?
—T…Tu te trompes, Sherkhan ! Tu te trompes !

Je veux qu’il comprenne que je ne suis pas cette nymphe et que jamais je ne le ferais souffrir. Ou en tout cas, pas volontairement.

— Cette nuit là, tu m’as comblé de bonheur.

Je sens Sherkhan se tendre contre moi.  Pendant tout ce temps, lui aussi pensait la même chose que moi.

—Ren.

Quand il m’appelle, je n’ose pas lui répondre.

— Ren, insiste alors le prince maudit.

Je gémis doucement pour lui répondre enfin.

—Je peux me retourner ?
—Je…
—J’ai envie de te serrer dans mes bras.

Quand je relève la tête, il est déjà en train de m’observer.

—Ehh ?!

Je tente tant bien que mal de cacher ma nudité mais Sherkhan m’en empêche en s’emparant de mes poignets.

—Je serais le plus idiot des hommes si je te laissais faire une chose pareille.

Pour la première fois, Sherkhan ne parle pas de lui en tant que monstre.

—Tu es magnifique, me complimente-t-il en passant ses doigts dans mes cheveux.

Dame Aveleen m’a coupé les cheveux avant de partir.

—Tu es un être vraiment exceptionnel.

Sherkhan ne m’avait encore jamais bercé d’autant de compliments alors je suis un peu perturbé. Mais quelque part, ses mots me rassurent. Si ma beauté lui permet de me désirer et de m’aimer ne serait-ce qu’un peu, alors je l’accepte.

—Je suis désolé, tu me perturbes tellement que je m’égare.
—Nous sommes tous les deux pareils dans ce cas.
— Ren ?

Je m’empare de sa main dans mes cheveux pour la plaque contre ma propre poitrine. Si les mots ne suffisent pas à lui faire comprendre combien je l’aime, alors je veux qu’il m’entende à travers mes gestes. Qu’il sente mon cœur battre de cette façon que pour lui.

—M…Moi aussi, je suis bouleversé par ton existence.

Sur ces mots, je ne relâche jamais mon regard du sien. Au contraire, plus proche que jamais, nous finissons par nous embrasser, puis à faire l’amour dans ce cadre idyllique.