BLUE HAIRED NYMPH BOY

30.

D’un geste rapide, Athelleen surgit des arbres pour asséner à ce monstre un coup violant. Petite et frêle de part son corps, elle dégage pourtant en elle une redoutable puissance physique qui lui permet de tenir tête à cette créature. Sherkhan profite alors du déséquilibre de notre adversaire pour en terminer une bonne fois pour toute.

Une fois éliminé et le calme revenu dans les environs, nous nous réunissons tous.

—Qu’est-ce que cela signifie ? Lui demande alors Vévé.

Les longs cheveux d’Athelleen lui retombent dans le dos quand elle présente à mon amie son profil.

—La forêt est dangereuse…
—Ce n’est pas ce que je te demande, insiste Vévé qui perd patience.

Quand Athelleen se tourne vers nous, l’air désarçonné, Sherkhan s’avance vers elle sans prêter attention aux réticences de Vévé.

— Tu souhaites nous accompagner dans notre voyage, n’est-ce pas ?

Si je suis étonné par les propos de Sherkhan, il devine juste au regard de la jeune combattante.

—Elle nous a attaqué tout à l’heure ! Lui rappelle Vévé en tentant de s’opposer.
— C’est vrai, mais elle a aussi sauvé la vie de Ren.

Sherkhan a raison, sans elle, ce monstre m’aurait probablement tué. Et d’ailleurs, nous n’aurions certainement pas pu en arriver à bout sans son aide. Athelleen n’est certainement pas une mauvaise personne.  Seule depuis certainement longtemps, elle attendait qu’on vienne la sortir de son tragique destin.

— Nous formons à nous tous une équipe étrange, sourit le dévoreur de divinités.

Il est rare de voir Sherkhan sourire comme ceci. Les dévoreurs de divinités ne sont pas vraiment expressifs mais le cœur de Sherkhan s’ouvre un peu plus à chaque instant. Le voir ainsi me redonne de l’espoir.

— Si voyager avec une elfette, un dragon, une fée, une nymphe et un monstre comme moi ne te fais pas peur, alors tu es la bienvenue.

Athelleen ne cache pas son émotion et peine à retenir ses larmes face à l’invitation de Sherkhan. Notre nouvelle alliée se jette dans mes bras, touchée par notre main tendue.

***

Nous avons fini par retourner à la Montagne du Nord où Sherkhan a pu s’entretenir avec Dame Aveleen afin de lui faire part de la situation. Maintenant que nous avons en notre possession cet artefact, plus rien ne nous retient de retourner à Lastalcia. Pourtant, la reine de la montagne nous invite à agir avec la plus grande prudence.

Il ne nous sera pas facile d’atteindre le village mais pourtant, nous le devons. Ce voyage m’aura fait comprendre que les nymphaë courent un grand danger. Si les ténèbres continuent de nous prendre notre cœur, alors des gens comme Sherkhan souffriront encore.

— C’est sûrement notre dernière nuit tous ensemble.

Alors que tout le monde a regagné sa chambre, Sherkhan arrive dans mon dos pour un peu discuter avec moi. Dans les grands balcons de notre suite, je regarde la lune comme si c’était la dernière fois. Si j’ai longtemps attendu ce jour, je ne peux m’empêcher d’avoir peur… mon cœur bat la chamade et mon corps tremble. J’ignore ce que la fin de ce voyage nous attend mais je prie pour que nous puissions tous rentrer chez nous.

— Que comptes-tu faire quand nous aurons ramené la paix ? Me demande-t-il.
— Ce que je compte faire… ?

Je n’y ai pas vraiment pensé à vrai dire. Est-ce que j’ai envie de retourner à Lastalcia ou… ou est-ce que j’ai le droit d’espérer rester à ses côtés ? Voilà un sujet que je n’ose pas aborder avec Sherkhan par peur d’être rejeté.

— Je… Je ne sais pas et… et toi ?
— Eh bien, souffle le prince maudit, je n’en sais trop rien non plus. Je suppose que tout dépendra de ma condition à la fin.

Je m’approche de lui pour poser une main sur son visage.

— J’ai promis de te sauver.

Le démon sourit paisiblement.

—J’ai un peu honte de m’en remettre à toi alors que c’est à moi de te protéger.
— Euh… ?

Sherkhan réduit la distance entre nous en posant sa paume sur ma main.

— Nous aurons tout le temps de réfléchir à l’avenir quand nous en aurons fini avec ton prince et son père.
— Je… Je n’aime plus le prince depuis longtemps !

Je réalise alors subitement que je n’ai pas réfléchi. Quand je plonge mon regard dans celui de Sherkhan, il n’y a plus l’ombre d’un doute possible : c’est bien lui que j’aime.