44

852 30 2
                                    

Assise sur le sofa du salon, j'attends que le temps passe. La télé éteinte face à moi reflète ma personne. Je suis assise en tailleur à attendre bêtement.

Lorsque l'autre entre à son tour, il se rend vers la cuisine.

- Ça te dit des lasagnes ? Demande-t-il assez fort pour que je l'entende d'ici.

Je ne réponds pas. Qui mange des lasagnes au petit déjeuner ?

- Il est midi pour info. Ajoute-t-il.

Je hausse des sourcils, surprise. Il a lu dans mes pensés ou quoi ?

Il apparaît finalement à côté de moi. Je me décale sur le côté afin d'ajouter de la distance entre lui et moi.

- Dis-moi juste ce que je peux faire pour toi. Dit-il.

- Je doute que tu puisses en faire quoi que ce soit.

- Peut-être que tu te trompes.

- Je veux reprendre ma vie normale. Je réponds du tac au tac. Qu'est-ce que tu comptes faire maintenant ?

Lorsque je dépose mon regard sur lui, le sien est désemparé. Mon cœur se serre, mais je ravale cette culpabilité naissante.

- Tu veux dire...

- J'aimerais retourner à l'époque je ne te connaissais pas. C'est tout à fait ça. Je l'interromps.

Il déglutit, puis acquiesce lentement. Je le vois alors se lever, les mains dans les poches de son sweat.

- Tu peux m'en vouloir comme tu veux, quelque part je ne regrette rien.

Choquée, je le regarde ahurie. Il est fou ou quoi ?

- Ok, je m'y suis mal pris. Mais jamais on ne se serai rencontré sans tout ça.

- Ça n'aurai pas été plus mal. Je réponds froidement.

- Si c'est ce que tu penses d'accord. Mais moi je te le dis, te rencontrer n'a en rien, été quelque chose que je regrette.

- Encore heureux. Je ne t'ai pas pointé une arme entre les deux yeux, moi.

Dans un élan venu de nul part, il se laisser soudain tomber à genoux face à moi, le regard brouillé par des tonnes d'émotions reflétant comme une douleur que jamais je n'aurai cru lire en lui.

Ses bras se retrouvent sur mes genoux, et je suis incapable de faire le moindre mouvement.

- Comprends-moi. C'est tout ce que je veux. Souffle-t-il. Comment tu aurais agit si tu avais grandi avec Avalonne, et qu'un beau jour, on l'assassinait ?

- Si je t'avais rencontré après ça, enfin, si j'avais rencontré Kaiden, je me serai certainement confiée à toi.

- Je l'ai fait aussi. Sans même le savoir tu m'as vu dans des états que personne d'autre n'a vu chez moi.

- N'importe quoi...

- Je ne te mens pas Avery.

Bizarrement, il ne m'appelle plus que par mon prénom dorénavant. Je sens bien que l'ambiance régnant entre nous est si instable que je sais pertinemment d'avance, qu'aucun d'entre nous n'en ressortira indemne.

- Est-ce que tu as déjà... Ne serai-ce que ressenti quelque chose pour moi ? Je demande, ma voix perdant en assurance.

Quelque chose dans ses yeux apparaît, comblant l'obscurité qui y habitait.

Il lève sa main et l'apporte au creux de mon cou. Je ferme les yeux, refoulant mes larmes. Je m'autorise à accepter son contact. Parce que même si je le hais à l'heure actuelle, il ne cessera jamais d'avoir ce doux effet sur moi. Cet effet qui m'attire autant qu'il me détruit finalement.

- Je n'avais encore jamais ressenti ce que je ressens pour toi.

Je rouvre à peine les yeux que ses lèvres se retrouvent déjà sur les miennes, torturant mon pauvre cœur. Elles n'y restent que quelques secondes. Et tant mieux. Car je ne sais pas encore gérer tout ce qui est en train de s'abattre sur nous à l'heure actuelle.

Son front posé contre le mien, je garde les yeux clos. Nos souffles s'emmêlent et je lutte contre moi-même pour ne pas laisser ma main le toucher.

- Je vais être honnête. Dit-il. Je ne suis pas patient Avery. Mais... Je veux bien l'être pour quelqu'un qui en vaut la peine.

J'écarte mon front du sien et le fixe, troublée quand il dit;

- Dis-moi juste que tu veux bien nous laisser au moins cette chance.

Je n'arrive même plus à respirer. On aurai dit qu'il venait de me faire une demande en mariage.

Même si je lui en veux atrocement et les souvenirs d'hier sont encore frais dans mon esprit, je ne peux pas m'empêcher de me dire qu'après tout, il serai parfaitement illogique qu'il continue d'insister. Je sais, je sens, que de toute manière il a maintenant la possibilité de me tuer, de me séquestrer chez lui. Mais il n'en fait rien. Il se contente simplement de me recouvrir d'amour, d'affection et de belles paroles.

- Tu m'as menti.

Ces paroles sont sorties seules, comme si je voulais me rappeler quelque chose à moi-même.

- Imagine, dis-je simplement, imagine simplement ce que j'ai pu ressentir quand je t'ai vu, toi, me pointant cette arme sur la tête sans une once d'émotion dans le regard.

- Tu as eu peur. Dit-il, un brin de tristesse dans sa voix.

- Oui. De toi. Je ne te reconnaissais pas. Je laisse mes larmes s'abandonner sur ma joues. J'ai... J'ai besoin de digérer. Je me suis attachée à toi bêtement et j'ai découvert que tu n'étais même pas celui que je pensais. Tu... Tu es quelqu'un d'autre et jamais tu ne deviendras Kaiden. Toi t'es... Un mec qui ne veut qu'assouvir une vengeance quitte à mettre la vie de quelqu'un d'autre en danger, la mienne entre autres.

- Je ne voulais p...

- Tu le savais. Je l'interrompt. Tu savais où ils me retenaient prisonnière je me trompe ?

Il baisse les yeux et acquiesce.

- Tu savais ce qu'ils me faisaient ?

- Oui.

Ce qui me traverse ensuite l'esprit me refroidis sur place. Mon cœur doit cesser de battre dès l'instant que je parviens à le dire...

- Tu y étais, je me trompe ?

Il relève ses yeux vers les miens, et enroule ses bras autour de moi. La rage qui vient s'installer soudain en moi est insupportable. Je tente de le repousser:

- Tu y étais oui ou non ? Je demande avec plus d'insistance.

Il ne répond pas, se contentant de resserrer son étreinte. Mon cœur a beau saigner comme jamais, la fureur en moi est tout simplement violente.

- Dégage. J'ordonne. Lâche-moi !

- Non, je ne veux pas.

Je tente de le taper plus fort mais il ne bouge pas. Je pleure, sanglote, je lui crie de ma lâcher, mais rien n'y fait.

- Je te déteste... Tellement.

This Body GuardOù les histoires vivent. Découvrez maintenant