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RAFAEL
Après le mort de mon frère, je n'aurais jamais imaginé ressentir un jour cette même douleur. Au contraire. Je pensais qu'une fois que je me serais vengé, je serais heureux. Je comptais reprendre un nouveau départ.

Et finalement... Voilà où j'en suis. Je m'accroche désespérément à elle. Elle est trop importante. Plus qu'importante même. J'ai... J'ai peur de la lâcher. Parce que je sais que je ne l'approcherai plus après. Elle ne me laissera pas faire.

Égoïstement, j'ai profité du calme avant la tempête pour la prendre dans mes bras. Je savais qu'après, elle me voudrai loin. Elle voudrai se protéger. De la tempête. De moi.

Je lui fais du mal. Je n'ai pas arrêté de lui en faire. En m'attachant à elle, en l'embrassant, en la laissant prendre place au creux de mon cœur, je l'ai laissé soulager ma douleur, mais j'ai continué à accroître la sienne. À chaque rapprochement qui nous poussait l'un vers l'autre, le risque qu'elle finisse blessée s'agrandissait. Je le savais. Et pourtant...

- Tu ne comprends pas... je murmure, les yeux fermés pour contenir les fortes sensations qui s'emparent de moi, je pensais n'avoir aucun autre choix.

- Lâche-moi.

- Je pensais que c'était tout ce qu'il me restait à faire. C'était avant nous-deux.

- J'en ai rien à foutre ! Je veux rentrer chez moi !

- Je vais te ramener.

Elle pourrai être si en colère qu'elle appellera la police. Une fois chez elle, elle pourrai me dénoncer aux flics. Dénoncer la mafia. Mais bordel j'en ai plus rien à foutre.

Je la lâche, et me retrouve assis par terre, tel l'être médiocre que je suis. Je n'ose même pas la regarder.

   Je la regarde finalement lorsqu'elle se lève et s'éloigne dans le couloir. Je soupire et me lève. La rage que je ressens actuellement contre moi-même est si forte qu'elle explose en même temps que le verre que je balance contre le mur, sous la coup de la colère.

Elle ne voudra plus jamais de toi.

   Non. Elle m'a dit qu'elle tenait à moi.

Elle tenait à Kaiden.

   Alors je redeviendrais Kaiden.

Tu resteras toujours Rafael.

   Je deviens fou putain. Je me parle à moi-même. Cette petite voix de merde commençait à s'évaporer. La dernière fois que j'y ai eu droit c'était quand mon frère est mort. Je ne l'entendais plus que dans mes cauchemars. Cauchemars dont je n'ai pas de souvenir visuel. Je me souviens simplement de la voix. De ses paroles.

   Je refuse qu'elle recommence à me hanter même éveillé.

   La présence d'Avery avait beaucoup remédier à ça. Dormir avec elle, c'était mille fois plus réconfortant. Et même si j'ai honte de l'admettre, je me sentais en sécurité... Elle seule parvenait à chasser cette voix stridente qui me murmurait encore et encore les mêmes merdes.

   J'entends des pas qui se rapprochent. Je me retourne, et vois la blonde arriver, ses chaussures aux pieds.

- Allons-y. Dit-elle.

    Elle s'éloigne vers la sortie. Alors c'est ça ? Je vais devoir la ramener chez elle et laisser notre histoire me filer entre les doigts ?

   Elle avait pourtant à peine commencé. Je commençais à peine à ouvrir les yeux sur la natures de mes sentiments pour cette belle blonde. Je commençais à comprendre les battement indépendamment rapides de mon cœur à son contact, des frissons que je ressentais en l'entendant rire, de mes joues chauffantes quand je repensais à elle...

   Putain mais qu'est qu'elle a fait de moi ?

***

Nous approchons de la destination. Avery ne se tient même pas à moi. Seules ses jambes frôlent les miennes et sentir au moins ce petit contact me va déjà.

  Alors que je gare mon engin devant sa maison, la première chose qui me frappe est la voiture garée à l'entrée. Exactement la même voiture qui est partie il y a un mois et demi de cela, Lincoln Green à l'intérieur.

   Avery doit le remarquer aussi car elle met un certain temps avant de se décider à descendre. Elle retire ensuite son casque et le pose sur le guidon de ma moto.

   Elle ne bouge pas, et continue de fixer la voiture. De mon côté, j'ai un mauvais, très mauvais pressentiment.

   Je retire à mon tour mon casque et descends de la moto.

- Ton père est rentré. Dis-je.

- Je sais.

   Soudain, la porte s'ouvre brusquement. Si violemment qu'elle semble à un rien de se fracasser contre le mur. Lincoln sort alors, se précipite vers moi et m'attrape par le col du t-shirt. Je reçois alors un coup à la mâchoire, un coup de genoux dans les abdos et autres.

   Je ne fais rien. Je contiens comme je peux ma rage pour ne pas me défendre. Je ne le taperais pas devant sa fille.

- PAPA ! Hurle cette dernière.

   Il s'immobilise soudain. Je lui crache du sang à la figure. Il contracte tellement sa mâchoire que je dois me retenir de rire comme je peux. J'aurai l'air carrément fou.

   Il me plaque contre ma moto, s'essuie le visage sur mon t-shirt et me lance un regard si noir qu'il reflète parfaitement la meurtrier qui se cache en lui:

- Comment oses-tu ne serait-ce que te montrer devant moi ? Crache-t-il.

- Lâche-le ! Ordonne Avery.

   Je ne la regarde pas. J'aurai tellement, tellement aimé qu'elle soit ailleurs à cet instant. J'aurai alors pu refaire le portrait à ce fils de pute.

- ENLEVE-MOI CE SOURIRE SOURNOIS DE TA GUEULE ! Hurle-t-il si fort qu'il en vrille mes tympans.

   Je souriais ? Oups... Ces idées malsaines ont toujours ce genre d'effet sur moi. Surtout quand ça concerne cet enflure.

- Tu as de la chance, énormément de chance qu'elle soit là sinon tu serais déjà mort. Dit-il en baissant le volume sonore, mais froidement. Comme ton très cher frère d'ailleurs.

   Mon poing part seul contre sa face. Je ne voulais pas... Mais je n'ai pas pu me retenir.

- Non mais ça va pas !?

  Avery se précipite vers nous et nous séparer alors que son père allait répondre à mon coup.

- Rentre à l'intérieur. Lui ordonne son enfoiré de père.

- Pour que tu lui casses la figure ? Non.

- C'est un ORDRE Avery !

- Je m'en tape !

- Cet ordure allait te tuer et tu...

- Papa, elle le coupe, je ne rentrerais pas à la maison. Pas sans toi.

   Il commence à pleuvoir. Toujours au bon moment décidément...

This Body GuardOù les histoires vivent. Découvrez maintenant