Cloîtrée dans ma chambre, je n'arrive plus à faire le moindre effort. Pour manger, parler, sourire. Tout ce que j'ai réussi à faire, c'est regarder la vidéo de ma mère encore et encore. Son sourire aura rapporté un peu de chaleur à mon cœur gelé.
J'ai regardé mon téléphone plusieurs fois. Mais rien. Il ne m'a pas envoyé de moindre message. Comme s'il avait déjà oublié notre discussion.
- Avery...
Mon père toque à la porte, mais je n'ai pas non plus la force de lui dire de me laisser. Allongée sur mon lit, une partie de mon visage enfoncée dans l'oreiller, je n'arrive même pas à ouvrir les yeux. Mes larmes risqueraient de tremper le tissu si je les ouvrais. Là, j'arrive à les contenir un minimum.
La porte s'ouvre finalement, et je sens le regard de mon père sur moi. La tête face à la sienne, je suis incapable de soutenir son regard, alors je fixe un point imaginaire face à moi.
- Avery... souffle-t-il l'air inquiet. Dis-moi ce que je peux faire. Je ferai ce que tu veux si ça peut te faire sourire à nouveau.
J'aimerais tellement pouvoir répondre à sa question. Je me rends compte qu'il a beau être plutôt égoïste, qu'il a beau m'avoir menti, mon père reste mon père. Si je le pouvais, je lui demanderais simplement de me laisser vivre ma relation avec Rafael sans tenter quoi que ce soit de dangereux sur lui.
Mais... Maintenant je sais que peu importe ce qu'il dirait, j'ai perdu Rafael, lui et notre début d'histoire. Cette histoire qui pour la première fois allait me faire oublier toutes les autres qui m'auront apportée de la souffrance. Je serais prête à n'importe quoi. Tant qu'il reste... Mais là, il a été clair. Dans ses dernières paroles comme dans son silence actuel.
C'est terminé.
- C'est lui, c'est ça ?
Mon père lit dans mes pensées. J'en suis certaine. À moins que mes yeux et ma mine de déprimée doivent actuellement hurler le nom de Rafael dans ce silence pesant.
Mon père soupire, puis dit:
- Je savais qu'il te ferait du mal.
Du mal, il m'en a fait oui. Et mon père n'a pas la moindre idée d'à quel point je suis stupide de continuer à vouloir de lui dans ma vie.
- Je l'aime.
Je ne sais pas si j'ai dit, ou pensé cette phrase, mais ça ne changera rien au fait qu'elle est sincère, et je ne réalise ça que maintenant.
Je l'aime. Éperdument. Follement. Je l'aime. Et lui... Lui, est-ce qu'il m'aime ? Est-ce que ses sentiments à mon égard vont jusque là ?
- Tu quoi ?
Je me redresse enfin et passe une main sur mon visage, mes doigts frôlant les larmes sur ma peau.
- Avery, tu ne peux pas...
- Quoi ? Je ne peux pas être amoureuse ? Je demande en riant jaune, comme si c'était voulu...
Je renifle et essuie désespérément mes larmes. Être triste est différent quand on ressent la peine et quand on la dévoile. Hors je déteste que la tristesse se lise sur mon visage.
- Est-ce qu'au moins tu en es sûre ? Parfois on s'attache, tu sais ? Je comprendrais que tu sois attachée à lui.
- Tu crois que je t'ai dit ça pour rire ?
Il passe une main sur son visage, et j'ai presque l'impression de lui avoir annoncé qu'on était ruiné. Comme si cette simple annonce venait de chambouler sa vie.
Finalement, il soupire puis demande, hésitant:
- Tu veux le revoir ?
Je relève instinctivement ma tête vers lui:
- Tu veux me laisser le voir ?
Il hausse des épaules.
- Je t'avoue que j'ai réfléchis. Je ne suis pas sûr de vouloir lui donner aveuglément ma confiance mais... Il voulait se venger et dans la lutte, j'ai causé la mort de son frère. Il ne m'a encore rien fait. Moi si. Un sourire désolé s'installe sur ses lèvres; j'ai juste peur qu'il t'utilise pour se venger.
J'arque un sourcil:
- Et tu veux me laisser le voir en croyant à ça ?
- Non. Je te laisse le voir mais je vous surveille.
Je lève les yeux au ciel:
- De toute façon, il a eu l'opportunité de s'en prendre à moi. Un tas de fois si on y réfléchit bien. Pourtant je suis encore là.
Je pense surtout à ce soir-là. Celui-ci où ma confiance en lui s'est évaporée parce qu'il avait pointé cette arme sur moi.
- Je sais. Souffle-t-il. Et c'est ce qui me fait me dire que je peux te laisser en sa compagnie un moment.
- Un moment ?
- Un moment.
Un moment c'est très vague, mais tant pis. Il s'éclipse hors de la chambre et je suis bien trop fière de lui pour oser lui dire que Rafael est loin de vouloir me voir maintenant.
Moi par contre, jamais je ne tiendrai longtemps sans ressentir le manque en moi.
***
Au bout d'une heure, mon téléphone sonne et le prénom de Rafael s'y affiche. Mon cœur s'emballe alors que je décroche sans attendre:
- Je...
- Tu as demandé à ton père de m'appeler ?
Je me redresse, à moitié surprise. Alors mon père l'a bel et bien appelé.
- Non. On a juste discuté. Dis-je avant de me racler la gorge. Qu'est-ce qu'il t'a dit ?
- N'importe quoi.
- Oui, mais quoi ?
Il soupire.
- Avec d'autres mots, il a dit qu'il m'autorise à te voir, mais pas à te briser le cœur.
- Hors c'est déjà fait.
Un silence s'installe et j'espère égoïstement qu'il culpabilise. Si la culpabilité peut le pousser à revenir, alors je veux qu'il se sente mal. Je veux qu'il revienne. Et là, je lui dirai tout ce que j'ai dans le cœur. Que je ne veux pas le perdre. C'est uniquement pour ça que je lui ai laissé cette chance.
- Est-ce que je peux passer te chercher ce soir ?
La façon hésitante et timide dont il m'a posé la question me fait sourire. S'il savait qu'il n'avait même pas besoin de demander.
- À quelle heure ?
- Dix-neuf heures ?
Je me mords la lèvre, me retenant de rougir bêtement:
- Mouais. Je réponds. Habille-toi bien alors. Impressionne-moi.
- C'était au programme mongole.
Je lève les yeux au ciel, même si j'avoue que je commence à m'attacher à la façon idiote qu'il a de m'insulter à chaque fois. Mais bon, je crois l'avoir beaucoup insulté aussi.
- À tout à l'heure. Dis-je.
- À tout à l'heure.
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This Body Guard
RomanceAvery Green est l'adolescente superficielle, riche et un peu farfelue dont les gens tirent ce qu'ils veulent à l'aide d'un simple sourire. Mais même si elle n'en a pas l'air, Avery sait voir l'hypocrisie dans ce qui est recouvert de bonté. Sa vie s...