Cameron 2

Chapitre 37

Quand la sonnerie retentit, je me précipite vers la porte : je ne supporte pas d'être à côté de Noah une seconde de plus. Elle se ruine toute seule. Tais-toi, tais-toi, tais-toi.

" - Non Mrs. Miller. Pas si vite, m'interpelle le professeur."

Je me fige. Merde. Je m'y attendais un peu, mais je pensais pouvoir passer à travers les mailles du filet. Apparemment, Noah aussi.

"  - Vous aussi, Smith."

Je ricane intérieurement.

Il nous fait signe de nous assoir sur les chaises devant son bureau tandis qu'il s'appuie devant le meuble. On dirait qu'il nous prend pour des gamins et qu'il s'apprête à nous gronder. On peut tous avoir un avis différent sur des questions de littérature, non ? Cette matière, c'est pas comme des maths ou de la physique, il n'y a pas une méthode claire et une réponse exacte. Enfin tout du moins, c'est ce que les professeurs des matières littéraires répètent sans cesse mais on se retrouve souvent à avoir une note en-dessous de la moyenne si on ne partage pas leur avis.

" - Il me semble que ce que vous nous avez présenté, n'est pas ce qui était originellement prévu, commence-t-il. N'est-ce pas ?

- Effectivement, répond Noah en me jetant un regard en biais. Tu pourrais nous expliquer, Cameron.

- J'ai seulement changé d'avis sur la question, c'est tout. Il n'y a que les idiots qui ne changent pas d'avis, n'est-ce pas ? Et je t'ai laissé exposer ton point de vue, donc je ne vois pas le mal à m'exprimer. Nos camarades ont pu profité de deux avis et choisir ce qu'ils préfèrent, non ? je réplique.

- La question n'est pas ce que tu as dit, Miller. C'est comment tu l'as dit. Tu ne peux pas te présenter devant la classe en utilisant une vocabulaire pareil, en étant nonchalante et avoir une attitude je-m'en-foutiste. Je pensais que vous alliez faire du bon travail, soupire-t-il en se pinçant l'arrête du nez. Dans l'environnement professionnel, ou tout du moins, scolaire pour vous, il faut savoir mettre de côté sa vie personnelle et ses sentiments. On aurait dit que vous essayiez de vous parler à travers vos propos. Sauf que ce n'était ni l'endroit, ni le moment. Maintenant, je vous le donne."

Je fronce les sourcils, ne comprenant pas la situation.

" - Vous pouvez vous exprimer maintenant. Dire à l'autre ce que vous vouliez dire tout à l'heure et non en déguisant cela lors d'un exposé. Si vous ne résolvez pas votre problème, c'est la colle et le zéro."

Je ne commencerai pas. Je ne commencerai ni à le regarder, ni à me tourner vers lui, ni à lui parler. Quoique... Je pourrais lui dire ses quatre vérités. Non, l'ignorance est la meilleure des méprises.

" - Cameron, tu as foiré l'exposé et je ne comprends pas pourquoi. Tout se passait bien, je pensais qu'on était passer par-dessus ce genre de comportement enfantin, articule mécaniquement Noah.

- Je savais que tu reporterais le blâme sur moi, je dis en haussant les sourcils. Franchement, regarde-toi dans le miroir.

- Ceci n'est pas constructif, intervient Mr. Littérature. J'ai dit de résoudre le problème et non de l'envenimer avec des remarques acerbes. Pourquoi as-tu décider de changer de point de vue, Cameron ?

- Je pensais tout ce que j'ai dit. La haine, c'est plus facile parce qu'il n'y a pas de réel amour. Et tu sais quoi Smith ? Je te hais. Je te hais parce que tu es un hypocrite de première. Tu me mens constamment. Et le seul truc que tu sais faire, c'est me mettre des couteaux dans le dos.

- Tu m'as trompé, pas l'inverse, me répond Noah calmement."

Son calme ne fait qu'augmenter mon énervement. Il est si imbus de lui-même. Il croit qu'il est si parfait.

" - Tu comptes remettre ça sur le tapis tous les jours ou tu comptes enfin t'en remettre ? je dis sarcastiquement. Tu m'as dit que c'était pardonné, non ? Moi, en revanche, je ne te pardonnerai pas.

- Me pardonner pour quoi ? Je n'ai rien fait, bordel !

- Faire l'innocent, c'est ton fort. Pauvre petit Noah, "aide-moi Cameron, tu m'as fait plonger, je suis si malheureux". Tu peux plonger aussi bas que tu veux, j'en ai rien à foutre. Tu pourras demander à ta si jolie Grace de t'aider parce qu'elle ne se ruine pas toute seule, elle. Merci monsieur, pour cette petite conversation mais j'en ai assez, je déclare en me levant pour atteindre la sortie.

- Fuir tes problèmes, c'est ton fort. Pauvre petite Cameron "reviens Noah, je suis triste et malheureuse. Non attends, je vais décider de tout faire foirer parce que je suis une emmerdeuse de première et je suis la personne la plus égoïste sur cette putain de planète", dit-il en m'imitant. Alors, vas-y, fuis encore une fois. Evite-le problème, écourte la conversation et va courir au coin de la rue pour retrouver ton dealer. Tu penses que ta vie est minable, certes tu as ton lot de casseroles, mais tu ne fais rien pour l'arranger. La sortie, c'est par là-bas, ajoute Noah quand il voit que je suis figée sur le pas de la porte, dos à lui."

Et dire que le professeur assiste à tout ça. J'entends un tas de feuilles tomber. Il doit se précipiter de les ramasser. C'est étonnant qu'il ne fasse pas de remarque pour dire à Noah que ce n'est pas très constructif. J'imagine que ce sont seulement mes remarques qui sont déplacées, Noah est si parfait de toute façon.

" - Je ne pense pas que tu sois en mesure de dire ça, je ricane. C'était bien toi, si je me souviens bien, qui ne m'a jamais ouvert la porte ? Fuir les problèmes, c'est aussi ton truc. Moi, je préfère juste éviter les conversations avec les personnes malhonnêtes.

- Malhonnête ? Moi ? TU fais une scène parce que tu prétends avoir entendu une conversation que j'ai eu avec Grace, bordel ! TU fais une scène parce que tu es tellement susceptible que tu ne veux pas entendre la vérité. C'est vrai, j'ai dit à Grace qu'elle n'avait pas besoin de se ruiner toute seule comme tu le fais, parce que c'est la VÉRITÉ. Admets-le, tu ne supportes tellement pas ta vie que tu la bousilles encore plus. J'ai dit à Grace de ne pas suivre tes pas, d'autant plus qu'elle n'est pas à plaindre. Maintenant, tu veux prendre les choses hors de leur contexte et leur donner un sens tout autre, alors fais ça. Je n'ai pas à me justifier sur des propos qui ne sont que la vérité, Cameron. TU es malhonnête, et tu l'es surtout envers toi-même.

- Va te faire foutre, Noah.

- Je suis toujours resté calme avec toi, mais tu pousses tout le monde à leur limite. Tu me pousses moi, tu as poussé Aspen, tu as poussé Dylan. Il ne faut pas s'étonner que tout le monde te laisse tomber. Arrête de jouer la victime ou alors va consulter un psy parce que je n'ai pas à supporter tes crises de nerfs. Cette conversation est dorénavant finie, le problème est réglé. Je ne veux plus te parler, te voir, te fréquenter. Juste disparais de ma vie. 

- On est deux alors, je dis en passant enfin ce putain pas de porte."