Cameron 2

Chapitre 25

J'ai arrêté de leur parler. Ça fait une semaine que j'ignore leurs appels, leurs messages, leur tête dans les couloirs. J'ignore les messages qu'ils m'envoient sur ma table en classe. J'ignore leur voix. Au bout d'un moment, ils finiront par se résigner. Noah aussi a essayé de me parler, mais je ne préfère pas, je sais très bien que ça ne finirait que mal. De toute façon, Grace est de retour, une copie conforme de ce à quoi je ressemblais avant. Je suis assez tentée de retourner au noir, juste pour lui montrer qu'elle ne peut pas m'arriver à la cheville en essayant de m'imiter. Chaque fois que je l'aperçois dans les couloirs, je la vois s'agiter avec ses cheveux, ses tenues provocatrices et son maquillage appuyé. Je la vois essayer d'aguicher Noah, c'est amusant parce que ça n'a pas l'air de marcher.

« - Cam, j'ai pas mon feu... lance Aspen. »

Je hoche la tête et allume ma cigarette avant de lui passer mon briquet. On est assis sur un banc pas loin du lycée. Ma prof de français est absente et je n'ai plus d'amis dans le lycée, j'ai demandé à mon copain de venir. Je pose ma tête sur ses cuisses et ferme mes yeux en m'allongeant sur le banc. Il met un de ses écouteurs sans fil dans mon oreille et l'autre dans la sienne. On ne parle pas. On ne parle jamais. Je rouvre mes yeux et vois qu'Aspen aussi a les yeux clos. On est tous fatigués mais c'est bientôt les vacances de toute façon. Je me relève doucement et regarde l'heure sur mon portable. Putain. Ça fait déjà dix minutes que je devrais être en cours. Je prends mon sac et secoue doucement Aspen. Il gémit, comme un bébé.

« - Quoi ? demande-t-il avec une voix cassée.

- Je dois aller en cours. Je finis à quatorze heures. Tu viens chez moi après ?

- Ouais, si tu veux. Je sors avec les mecs ce soir. »

Il me fait un bisou et je cours vers le portail du lycée. Je déteste vraiment ce lycée, les profs, les élèves. Des fois, quand je ferme les yeux le soir, je revois et réfléchis à chaque action que j'ai faites dans la journée. Chaque pas, chaque parole. Je réfléchis aux conséquences que chacun de mes mouvements ont causées. Je réfléchis peut-être trop, mais je me demande ce que pense les autres de moi, de mes actions, de mes paroles. Je me demande s'ils me voient comme une peste ou juste une drama-queen. J'en ai entendu certains qui ragotaient sur ma famille décédée, sur le fait que j'en faisais toujours trop, qu'il fallait que je m'en remette. Ce genre de choses me met hors de moi. M'en remettre ? On ne peut jamais se remettre de ça. Mais parfois, je me demande s'ils n'ont pas raison. Je frappe à la porte, tout le monde lève la tête quand j'entre.

« - Je m'excuse du retard, monsieur.

- Très bien. Le travail d'aujourd'hui est en binôme. Noah est seul, précise le professeur. Vous commencerez le travail en classe et le rendrez après les vacances. »

J'acquiesce et m'assois à côté de Noah. Il me sourit avec des yeux tristes. Ça me fait du mal de le voir comme ça, alors je pose ma main sur la sienne. Et, je lui souris.