SOLEIL DE DÉCEMBRE [PLK]

Chapitre 10

Léo était littéralement figée devant la vieille dame. Madame Michel venait de lui faire une annonce qui pouvait potentiellement améliorer durablement son quotidien, mais ça lui faisait soudainement terriblement peur. Elle ne pouvait plus faire machine arrière, elle était obligée de suivre la cadence. A cet instant précis, son manque de confiance en elle semblait transpirer par tous ses pores. Son visage était fermé, son cœur s'était mis à battre très fort, et ses mains n'avaient pas tardé à devenir moites.

- Je lui ai dis que je vous trouvais formidable, ne me regardez pas avec cet air idiot. Elle la charriait amicalement. Vous avez intérêt à vous reprendre si vous voulez qu'il vous embauche !

- Mais... Je vais pas y arriver, j'y connais rien moi! Elle s'exclamait. Il va me trouver nulle, c'est sûr!

- C'est la dernière fois que je vous entends parler comme ça de vous-même ! Vous allez y aller, vous allez vous répéter que vous êtes une femme sensationnelle et que vous allez parfaitement vous débrouiller !

- Mais...

- Pas de mais ! Elle la coupait avec autorité. Je répète. Vous allez y aller, et dans quelques semaines, quand vous viendrez chez moi, ce sera pour boire le thé et pas pour passer le balai !

Quand Madame Michel parlait, Madame Michel faisait.

Elles n'avaient discuté de sa situation en profondeur qu'une seule fois, mais elle avait promis de lui apporter son aide. Et comme à son habitude, elle avait tenu parole. Elle avait commencé par demander des contacts à ses enfants, qui avaient désormais tous une situation des plus stables et des plus aisées. Puis, voyant que cette piste ne menait nulle part, elle avait élargi ses recherches. Elle aurait pu lui prêter simplement de l'argent, mais elle estimait que ce n'était pas la meilleure solution. Premièrement, elle était a peu près sûre que Léo aurait refusé purement et simplement. Deuxièmement, donner de l'argent, ne la rendrait pas plus heureuse sur le long terme, ne lui permettrait pas de plus s'épanouir dans un métier, et n'arrangerait donc pas tout.

Après quelques coups de fil, elle avait décroché le graal. Un de ses vieux amis avait bâti, au cours des décennies, un véritable empire dans le domaine de l'art. Il avait ouvert des galeries aux quatre coins du monde, et les artistes les plus célèbres se battaient pour exposer chez lui. S'il avait pris sa retraite depuis de nombreuses années, ses enfants avaient repris le flambeau, et il restait extrêmement impliqué et influant.

En résultat de longues heures passées au téléphone, d'un diner barbant à parler du bon vieux temps, son ami avait accepté de donner sa chance à Léo et d'organiser un entretien avec la personne chargée des recrutements. Madame Michel n'avait pas évoqué ses difficultés, elle s'était contenté de mettre en valeur les qualités qu'elle lui connaissait. Il était inutile de mentir ou de surjouer l'enthousiasme, elle ne voulait pas que la rencontre se transforme en calvaire pour la jeune femme. Elle avait seulement usé de son regard convainquant, qui même a plus de 80 ans, pouvait encore faire de sacrés ravages. Elle lui avait implicitement fait comprendre qu'elle tenait vraiment à ce que Léo décroche ce poste, et il avait bien senti qu'elle ne lui laissait pas tellement le choix.

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Cela faisait au moins une heure que Léo était cloîtrée dans sa salle de bain. Elle avait vidé l'entièreté de son armoire pour y débusquer une tenue potable, puis avait fouillé dans ses placard pour y trouver un peu de maquillage qu'il lui restait de sa vie passée. Elle doutait que ces produits soient encore vraiment utilisables, mais ça ferait bien l'affaire le temps d'un rendez-vous. Elle n'avait pas vraiment de choix, pour autant elle était décidée à se montrer sous meilleur jour pour tenter de décrocher ce poste. Aux grands maux les grands remèdes, elle essayait de rassembler toutes ses chances. Au-delà du poste, elle espérait ne pas faire honte à Madame Michel. Elle savait qu'elle y avait mis du cœur, il était hors de question de la décevoir et qu'elle le regrette.