Dragons Reaper

Chapitre 33

Point de vue de Mia

Il faudrait repeindre le plafond.

Une couche de blanc afin d'homogénéiser le tout et de pouvoir partir sur une bonne base. Puis pourquoi pas dessiner quelques petits trucs. Mettre de la couleur également. Après tout, qui a décrété que les plafonds devaient obligatoirement être blanc ?

Personne.

D'ailleurs, est-ce que quelqu'un a pensé à prévenir les nouveaux venus sur terre d'à quel point la vie pouvait être compliquée ?

Les adultes, notamment nos parents, vont nous parler de l'importance des études, de la difficulté du monde du travail et de la nécessité d'avoir une vie sociale pour équilibrer la balance.

Mais qu'en est-il du bonheur ?

Personne n'en parle jamais, comme-ci tout le reste était obligatoirement plus important. Pourtant, je me pose une question. Si tout va bien dans notre vie, qu'on a tout pour être heureux, et que finalement on n'arrive pas à l'être   Qu'est-ce qu'on doit faire de plus ?

« - Ok. Intervention d'urgence enclenchée, déclare Sophie. »

Ma meilleure amie débarque dans ma chambre sans toquer avec un énorme carton dans les bras. Elle me sort de mes pensées pour le moins moroses et s'assoie par terre à mes côtés.

Toujours allongée sur le dos et les yeux rivés à mon plafond, je me contente de ne rien dire. Pour une fois, aucun mot ne se forme dans mon esprit étrangement vide.

« - Barbie et la magie de la mode en entrée, continue-t-elle sans se formaliser plus que ça de mon silence. Barbie et les trois mousquetaires pour un peu plus d'action. Puis on terminera cette soirée en beauté avec notre préféré : Barbie au bal des douze princesses. Pour accompagner tout ça : chips natures, sodas à gogo et deux cookies géants aux trois chocolats. J'aurais bien ajouté des bonbons et des tablettes de chocolat...Mais commencer la semaine avec une crise de foie, ce n'est pas le meilleur des plans.

- Pourquoi c'est si difficile la vie d'adulte ? je lui demande de but en blanc. »

Le regard de Sophie se tourne dans ma direction. Elle me fixe un instant, réfléchis si fort que je pourrais presque entendre ses pensées et finalement ce mets en marche.

Elle attrape tous les coussins sur mon lit, ma couette et plusieurs couvertures. Elles les emmènent dans notre aire ouverte. Je tourne la tête et, ma joue appuyée contre la moquette de ma chambre, je l'observe nous arranger un petit coin douillet avec les poufs devant la télé.

Durant les cinq minutes qui suivent, j'accompagne du regard Sophie et ses multiples allers-retours entre nos chambres et l'aire ouverte. Une fois tout prêt, elle revient vers moi et se penche pour attraper mes chevilles. Sans qu'aucun mot ne soit échangé entre nous, elle commence à me tirer hors de ma chambre.

Vidée de toute énergie, je la laisse faire sans protester. A quoi bon se plaindre quand votre meilleure amie s'apprête à vous remonter le moral ?

Installée sous deux couettes, le générique du début de Barbie à la télé et une poignet de chips à deux centimètres de ma bouche, je sens le vide à l'intérieur de mon corps se remplir de chaleur et d'allégresse. Ma meilleure amie à mes côtés, nos mains entrelacées tandis que nous récitons les dialogues du film, je retrouve peu à peu ma personnalité.

Ce n'est qu'au début du second film, presque deux heures plus tard, que j'accepte de parler. La tête sur les genoux de Soph', j'ouvre enfin la bouche en sachant que, quoi que je dise, elle me comprendra.

« - Plusieurs sujets : mon non-père, Max, ma mère et Ice, j'énumère tranquillement. Par lequel des quatre on commence ?

- Ton non-père, décide-t-elle. »