NOTRE CHANCE

CHAPITRE 23

CHAPITRE 23

TEDDY

   J'observe Nora faire sortir le cheval du camion en silence. Son amie lui vient en aide et je me sens inutile à cet instant. J'ai encore du mal à me remettre de ce à quoi j'ai assisté cet après-midi. Je ne sais pas comment elle fait pour faire face à ce genre de monstre presque tous les jours.

   Là-bas, pendant qu'elle s'affairait avec le cheval, j'ai eu l'impression de me retrouver à nouveau plusieurs mois auparavant, face à cet homme qui n'avait pas hésité à s'en prendre à son chien, puis à une jeune femme sans défense. Aujourd'hui, je comprends pourquoi Nora n'a pas hésité un seul instant pour intervenir face à lui. Ce n'était pas un coup de folie, c'est ce qu'elle est, ce pour quoi elle est faite. Je la respecte tellement pour ça.

   Jamais je n'aurai eu le courage de parler à ce vieil homme en gardant mon calme comme elle l'a fait. Avant de penser à ce que ces ignobles personnes méritent, elle pense d'abord au bien être de l'animal. Elle arrive à prendre mesure de la situation et savoir comment se comporter pour pouvoir leur venir en aide. Elle est incroyable.

   J'ai vraiment du mal à me dire que cet homme va s'en sortir sans un bon coup de poing dans la figure, mais c'est le choix de Nora et je le respecte.

   Il y a autre chose qui me préoccupe presque tout autant en ce moment : j'ai l'impression que Nora est en colère contre moi. Après notre conversation sur la route du retour, elle ne m'a plus adressé le moindre mot. J'ai senti comme un mur se dresser entre nous et je ne comprends pas vraiment pourquoi. Peut-être est-ce simplement l'avenir du cheval qui la tracasse.

   Son amie Jeane s'avance vers moi, alors que je me tiens toujours en plein milieu de l'entrée, perdu dans mes pensées.

   — Ça s'est mal passé ? m'interroge-t-elle.

   — Nous avons eu affaire à un vrai connard.

   — Nora vient de me parler de ça, mais je voulais dire, entre vous ? Tu as fait quelque chose qui l'a énervée ?

   — Non, enfin je ne crois pas, pourquoi ? J'ai fait tout ce qu'elle m'a dit, je n'ai pas touché au cheval, je...

   — Elle a l'air un peu remontée contre toi. Que lui as-tu dit ?

   — Rien, nous avons juste parlé de ma famille sur le retour et puis elle s'est murée dans le silence. Je ne comprends pas.

   — Que lui as-tu dit sur ta famille ?

   — Ça ne te regarde pas, c'est personnel.

   — Tu dois être un peu au courant de son histoire familiale, non ? Tu n'aurais pas dit quelque chose qui aurait pu la blesser ?

   — Je n'ai pas parlé de sa famille. J'ai juste parlé de moi. Je ne parle plus à mes parents depuis des années. Ils ne font plus partie de ma vie, c'est tout.

   — C'est tout ? Tu lui as lancé tout ça avec autant d'aplomb ? Tu m'étonnes qu'elle soit en colère.

   — Quoi ? Mais pourquoi ?

   — Sa famille non plus ne fait plus partie de sa vie, me lance-t-elle sèchement. Sauf qu'elle n'a pas eu le choix.

   — Oh...