CHAPITRE 7.3

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CHAPITRE 7
Partie 3

   À peine vingt minutes plus tard, nous sommes installés en tailleur au milieu de la scène, une seule lumière éclairant notre dîner. Je n'attends pas la permission pour me jeter sur le sachet de frites qui dépasse du sac.

   — Tu fais partie de ces gens qui mangent toutes leurs frites avant d'attaquer le burger ? m'interroge Teddy.

   — Ça te pose un problème ?

   — Pas du tout, c'est juste que je n'ai jamais compris ça. Ton burger va être froid.

   — Si je mange mon burger avant, ce sont mes frites qui seront froides.

   — Pourquoi ne pas manger les deux en même temps ?

   — Je n'y avais jamais pensé. C'est fou comme nous sommes conditionnés à choisir entre deux choses en permanence.

   — Parle pour toi, me lance-t-il en enfournant la moitié de son burger dans sa bouche encore pleine de frites.

   — Dégoûtant.

   Chance nous regarde depuis le bas de la scène avec des yeux immenses, la bave aux lèvres.

   — Viens là, lui lance Teddy.

   Elle saute sur scène sans se faire prier.

   — Je t'ai pris du poulet.

   Il ouvre une petite boite en carton contenant des bâtonnets de poulet et la dépose devant elle. Elle en saisit un délicatement et s'éloigne de nous pour aller savourer son dîner en paix. Je suis impressionnée par la façon dont Teddy la traite.

   — Finalement, je ne t'ai pas confié une mission insurmontable.

   — Je ne pensais pas que ce serait aussi facile. Elle est super. Nous avons beaucoup de chance, ajoute-t-il en me regardant droit dans les yeux.

   « Nous », comme si ce chien était autant le sien que le mien. Au fond, je ne peux pas lui en vouloir, il passe ses journées avec elle. J'ai de la peine rien que d'imaginer le fait que je vais devoir les séparer dans quelques jours.

   Après toutes les révélations que nous nous sommes faites aujourd'hui, il subsiste une interrogation qui me brûle les lèvres. Je n'attends pas d'avoir avalé ce que j'ai dans la bouche et me lance :

   — Je peux te poser une question ?

   — J'y répondrais seulement si tu promets d'arrêter de me postillonner dessus.

   — Oh !

   — C'est bon, je rigole. Que veux-tu savoir ?

   Je prends soin de finir de mâcher ce qu'il me reste dans la bouche en insistant pour qu'il constate que je ne vais plus parler la bouche pleine. Ça le fait rire et ce petit éclat résonne dans la salle. Son sourire est immense, je me sens mal de vouloir lui poser cette question. Peut-être que la réponse ne va pas me plaire, mais il faut que je sache.

   — Quand tu es venu m'aider l'autre jour et que la police est arrivée, pourquoi avaient-ils l'air de te connaître ?

   — J'ai un lourd passé de dealer de drogue, répond-il le plus sérieusement du monde. Cocaïne, héroïne, tout ça...

   J'avale péniblement ma salive. Ses yeux sont perçants, mais après un long silence oppressant, sa bouche esquisse un léger rictus et, alors que je l'interroge du regard, un rire franc s'échappe d'entre ses lèvres.

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