Chapitre 37

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Ce jour-là, j'ai compris ce qu'était... la Clé.

À plusieurs centaines de mètres en-dessous d'eux, Pahya et Link découvraient avec désarroi le paysage dévasté par la corruption qui avait disparu à de nombreux endroits, comme aspirée par le sol. Toute la flore était morte, la faune n'avait pas non plus réchappé à ce triste sort. Seule la terre, unique vestige d'une ère révolue, était teintée par la lueur rose orangée créée par le crépuscule. À des lieues à la ronde, plus aucun signe de vie. Il n'y avait que les elvëschs qui peuplaient le ciel. Profondément choqué par ce qu'il voyait, Link n'osait plus respirer et se demandait sans cesse s'il ne cauchemardait pas. Il n'y avait plus rien à sauver à Hyrule... En plus de ces constatations déconcertantes, Elzier ne se dirigeait pas vers le plateau du Prélude. Il volait en direction du Sud-Est, ce qui fut incompréhensible pour le Héros et Pahya.

- Elzier, nous devons rejoindre le plateau du Prélude, prononça Link en dépit de sa voix enrouée.

- Non.

Son ton sans appel ne fut guère le bienvenu en raison de la récente bataille et des pertes nombreuses à déplorer. Sans compter... la mort de cette fillette qui se trouvait toujours dans les bras de Zelda.

- Olympe m'a donné pour mission de te protéger, et ce depuis le début de ton périple, énonça la créature qui battit une nouvelle fois des ailes. Nous allons à Panah. Tu reprendras des forces là-bas et tu pourras parler de stratégie avec d'autres hauts dignitaires.

Une colère vive tordit le ventre de Link dont les muscles se tendirent aussitôt. Au moment où il s'apprêtait à répondre sèchement, une main se posa sur son épaule : celle de Pahya. Le prodige tourna soudainement la tête vers elle et ancra ses iris dans les siens. La Sheikah se fit plus petite mais soutint le contact visuel. Ainsi, elle fit comprendre à son ami qu'il valait mieux écouter Elzier et se résigner à ne pas rejoindre le plateau du Prélude. Link émit un soupir fatigué puis il reporta son attention sur Zelda. La jeune femme tenait toujours le corps sans vie de Lasya et pleurait à chaudes larmes sa perte. Elle demeurait inconsolable pour le moment, même lorsque son compagnon la serra dans ses bras pour la consoler. Mais il n'y avait rien à faire, sa peine était bien trop grande, bien trop profonde pour qu'elle puisse détacher ses yeux du corps frêle qu'elle maintenait contre elle. La culpabilité lui ôtait la parole et la rongeait. Zelda se revoyait sans cesse en train d'accepter de prendre Lasya avec elle pour l'emmener à la surface. Cette décision l'avait conduite à la mort et l'Hylienne ne se le pardonnerait jamais. Soran avait raison, une enfant n'aurait jamais dû les accompagner.

Elzier jeta un coup d'œil sur le côté afin de surveiller ses semblables qui volaient un peu partout dans le ciel. Plusieurs d'entre eux n'avaient, hélas, pas survécu à cette mission de sauvetage ; certains ne transportaient même pas le nombre escompté d'humains, témoignant ainsi des lourdes pertes suite au guet-apens. Cette guerre ne laisserait personne indemne... Il faudrait tout annoncer à Link et la princesse qui, déjà, connaissait une disparition qui lui était chère. Tous deux devaient encore traverser de nombreuses épreuves avant d'affronter le seigneur du Malin en personne. Tous leurs proches ne survivraient pas. Les paupières de l'elvësch se plissèrent puis il regarda très légèrement au-dessus de lui. L'un des siens transportaient notamment Thomas qui n'avait pas voulu importuner la princesse et le Héros. Ce garçon... Elzier secoua la tête afin de chasser sa nouvelle pensée. Cela n'avait pas d'importance de toute manière.

Après une trentaine de minutes parues interminables aux yeux de tous, les elvëschs passèrent enfin au-dessus de la ville de Panahpolis, la capitale de Panah. Les frontières ouest et nord-ouest avaient été attaqués depuis plusieurs semaines, de vastes plaines n'étaient plus que terres sèches et stériles. Les Corrompus avaient été écartés un temps grâce à la technologie sheikah de Faras qui travaillait sans relâche pour créer de nouvelles armes capables de lutter contre la corruption. Mais bientôt, le pays deviendrait comme Aurean et Hyrule : dévasté. Le reste des armées de la grande alliance s'était réfugié sur le territoire de Panah et tâchait de protéger au mieux ce qu'il restait des frontières nord-ouest et ouest, en plus de celles au sud et à l'est. Le nombre de soldats du néant s'accroissait de jour en jour car Ganondorf recouvrait ses forces.

Les ruines des tourmentsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant