Le monde oublié

Chapitre 29

Que s'est-il passé ? C'est la première chose qui me vient à l'esprit. Comme à chaque réveil de l'inconscient, je me trouve dans une petite pièce, sur un lit peu confortable. Ce n'est pas l'infirmerie de l'académie, ni une pièce se trouvant chez les Avery. Je ne suis jamais venue ici.

Je me lève assez facilement, je n'ai pas de douleur, mis à part ma brûlure sur l'épaule. Je suis juste un peu fatiguée, mais aussi, très curieuse.

Dès que j'ouvre la porte, des voix me parviennent d'une pièce à côté.

— Elle ne peut pas rester ici !

— Nous allons la garder quelques jours, le temps qu'elle se rétablisse. C'est mieux pour elle, ma femme pourra la prendre en charge.

— Tu ne peux pas nous la prendre comme ça ! Un ne te suffit pas ? Ne profite pas de ta place au conseil pour...

— James ! Il n'y a pas de discussion.

Des pas lourds résonnent dans le couloir. John apparaît par l'ouverture de la porte. Il change instantanément d'émotion en me voyant.

— Diana ! Comment vas-tu ?

— Bien merci, je réponds en m'efforçant de sourire. James est là ?

— Oui, dit-il en serrant la mâchoire. Juste derrière moi.

Effectivement, le caeli est assis sur un petit canapé jaune.

— Ravi de voir que tu es de retour parmi nous.

Je crois que lui aussi se force à paraître joyeux. Que voulait-il dire par « un ne te suffit pas ? ».

— Je vous ai entendu vous disputer, je précise.

— Une petite embrouille de rien du tout. N'est-ce pas James ?

John ne le laisse pas répondre, il se tourne vers moi et déclare gaiement.

— Tu vas rester un petit moment ici, avec ma femme et mes enfants. J'ai entendu dire que vous vous entendiez bien.

En voyant mon air surpris, il poursuit.

— C'est plus sûr, par rapport à tes blessures et ton nouvel élément. Nous pourrons t'apprendre à le contrôler.

J'ouvre légèrement la bouche, sans savoir quoi répondre. En entendant leur conversation, je m'attendais à ce genre de nouvelle mais cela ne fait pas le même effet quand elle est réellement annoncée. Ça ne m'enchante pas mais cela aurait pu être pire. John est assez froid mais le reste de la famille est super aimable. Ce qui m'embête le plus c'est de devoir quitter les Avery, je me sens tellement bien avec eux, même si une tension s'est installée entre moi et les enfants.

— Mais... Je n'ai pas mes affaires, elles sont toutes restées chez les Avery.

— Je ne crois pas qu'il t'en reste beaucoup à cause de l'incendie n'est-ce pas ? Je hoche la tête. Je vais passer chercher tes affaires pour l'académie et puis, tu es une ignie également. Chiara pourra te prêter un uniforme et des vêtements en attendant d'aller à la boutique des Austen.

Je regarde James en attendant sa réaction. Il est l'une des personnes qui m'a acceptée en premier. Il n'a pas attendu d'être sûr que je sois une elfe, il n'a pas attendu non plus que je me blesse. Il était là au début.

— Je pourrai retourner les voir ? je demande avec anxiété.

— Oui, oui bien sûr. Pendant tes jours de repos tu pourras, répond l'igni pressé.

— Ce n'est que pour quelques jours de toute façon, accentue James, tu seras vite de retour.

Sur ces mots, il s'approche de moi, me prend dans ses bras et me souffle un léger au revoir. Notre étreinte n'a pas duré plus de trois secondes mais cela m'a fait du bien. James sait qu'il était courant de faire ça dans l'autre monde pour preuve d'affection. Ici à Elyria, ce genre de chose est réservé pour l'intimité plus profonde, non pour la famille ou les amis. J'apprécie vraiment que James ait fait ça pour moi.

Nous restons, John et moi, un moment comme ça sans vraiment parler puis après une inspiration il me déclare.

— Je vais te montrer ta chambre.

Je le suis sans protester à travers les couloirs et les escaliers. La maison est tellement grande que je me demande si nous ne sommes pas restés dans le bâtiment du conseil.

Je regarde furtivement par une fenêtre, je suis bel et bien à Igna. Des femmes, des hommes et des enfants vêtus de rouge, se baladent dans les rues en souriant. Une petite fille court après un magnifique papillon qui s'envole dans notre direction. Elle doit avoir six ans et son visage rayonne de joie.

— Diana ?

Je me rends compte que je viens de m'arrêter près de l'ouverture.

— J'arrive !

John avait continué à avancer et se trouve maintenant adossé contre le dormant d'une porte orangée. Après un bref signe de sa part, je le dépasse et pénètre dans la pièce. Elle ressemble un peu à celle que j'avais chez les Avery, à quelques exceptions près. Les murs sont plus foncés et les meubles ne sont pas disposés à la même place.

Ici, le lit se trouve à droite, un bureau est illuminé par une fenêtre au fond de la pièce. À ma gauche se trouve une petite étagère vide ainsi qu'un canapé.

— Je vais te laisser un moment pour aller chercher tes affaires.

L'igni sort de la pièce en fermant la porte derrière lui. Je m'affaisse sur le canapé rouge en soufflant.

Je ne cesserai peut-être jamais d'être si différente des autres. Au collège beaucoup d'élèves me regardaient bizarrement parce que mes parents étaient décédés et que je vivais dans une famille d'accueil. Au lycée, ça ne s'est pas vraiment arrangé. Maintenant je suis à Elyria, et toute cette histoire ne fait que renforcer mon sentiment d'être à part.