Le monde oublié

Chapitre 31

— Diana !

— Oui monsieur ?

— Viens me voir, s'il te plait.

Je m'attendais à ce que M. Tolga veuille me parler et qu'il soit au courant pour mon nouvel élément. Malgré cela j'ai essayé de m'éclipser avec Marcus pour l'entraînement en binôme.

— Le conseil m'a tenu au courant des événements de ces derniers jours, annonce-t-il comme je l'avais prédit. Dans cette classe, tu vas continuer à travailler ton contrôle de l'eau comme les autres de ta section. M. Wilson m'a dit qu'il se chargerait personnellement de t'apprendre à maîtriser le feu. Cela évitera que tu doives prendre des cours en plus à l'académie.

— Et pour les examens ? je demande, étant déjà au courant de toutes les informations qu'il vient de me révéler.

— Tu ne passeras que ceux des aquilis. Je pense, tout comme le conseil, qu'il vaut mieux que l'information de tes deux éléments... Reste le plus possible confidentielle, me divulgue l'enseignant.

— Pourquoi ? je l'interroge.

— Elyria existe depuis très très longtemps et jamais dans toute l'histoire, un elfe n'a développé la capacité de maîtriser deux éléments.

Il observe les autres élèves avant de poursuivre.

— Ton arrivée ici a déjà fait beaucoup de bruit, si trop de monde apprend la nouvelle cela pourrait...

— Pourrait ?

— Leur faire peur.

Je lève les yeux sur le visage de M. Tolga, surprise par sa réponse.

— Faire peur ? Pourquoi est-ce que cela pourrait leur faire peur ? Je n'ai rien fait de mal ! Je ne comprends pas pourquoi je porte l'uniforme des ignis dans ce cas.

— Je sais Diana, souffle-t-il. Mais porter l'uniforme est une tradition. Nous avons pensé qu'il valait mieux que le moins possible d'elfes soit au courant pour le moment, et c'est ce que nous allons faire. Même si tu as les couleurs des ignis peu d'elfes vont vraiment croire que tu es capable de maîtriser le feu. Je suis sûr que M. Wilson te guidera parfaitement dans ton apprentissage. Va rejoindre ton binôme pour le moment.

Marcus se trouve près de la lisière, il se met toujours là, je ne sais pas pourquoi. Peut-être parce que c'est l'endroit où il y a le moins d'élèves.

— Diana !

Je me retourne pour faire face à mon professeur qui vient de m'appeler.

— Je t'interdis d'utiliser ton autre élément, c'est bien compris ?

J'acquiesce avant de reprendre ma marche vers l'igni. M. Tolga doit prendre très à cœur sa responsabilité et il ne veut pas décevoir le conseil. C'est normal, le conseil est comme le président et les ministres dans l'autre monde. Tout le monde doit les écouter et les respecter.

Je repense à James, lors de sa dispute avec John. Il n'aime pas l'igni et ne veut pas lui obéir, pourtant, il l'a fait. Il l'a fait car c'est un membre du conseil qui le lui demandait. Je n'arrête pas de penser à cette parole : « Un ne te suffit pas ? » Je n'ai toujours pas trouvé de réponse. Je devrais peut-être demander à John ou à Hélène, qui est sans doute au courant de la signification de ce propos.

— Eh oh, Diana ?

Je sors brusquement de ma rêverie en rouvrant les yeux. Je les avais fermés ? Peu importe, ce n'est pas essentiel.

— Oui, oui j'arrive, je murmure à Marcus.

Notre entraînement se déroule sans trop d'enthousiasme. Nous sommes tous les deux en pleine réflexion sur le pourquoi du comment de différentes choses.

Notre séance se résume à des échanges de sphères sans vraiment d'attaque. Personne ne semble l'avoir remarqué, nos professeurs ne nous ont fait aucune réflexion.

En arrivant dans le hall, j'aperçois Chiara, appuyée contre un mur. Après des brefs « au revoir » à Talia et Marcus je me dirige vers elle. Je n'ai pas le temps de poser ma question qu'elle y répond.

— Mon père m'a dit que tu n'avais pas de bracelet, je vais te ramener.

— Merci, je vais chercher mes livres dans mon casier et j'arrive.

Je me dépêche de m'y rendre pour ne pas trop la faire patienter. Je n'ai qu'un livre aujourd'hui mais il faut absolument que je le rapporte pour réviser les examens.

C'est vraiment difficile de s'organiser sans date. Il n'y a pas de calendrier à Elyria, ni d'heure ou de minute. Il n'existe que les « jours » mais ils ne signifient pas vingt-quatre heures, ils signifient : du lever au coucher du soleil. Pour eux, la nuit ne compte pas, je ne sais pas vraiment ce qu'ils pensent de cette période.

Adam, Hélène et son mari sont déjà là quand nous entrons dans le salon. Comme chez les Avery, il doit y avoir un champ magnétique, ou quelque chose comme ça, car je suis arrivée devant leur demeure et non à l'intérieur.

— Alors Diana ? Cette première journée en temps qu'ignie ? me questionne Hélène.

— Ça n'a pas changé grand-chose, M. Tolga m'a confirmé que je ne prendrai pas de cours mais que vous m'apprendrez vous-même.

— Oui, c'est effectivement ce que nous avons convenu, confirme John. À ce propos, nous ne commencerons que demain, les Austen et les Cortez viennent pour le repas de ce soir.

Il marque une coupure dans ses paroles en changeant de ton et d'expression.

— J'ai appris que tu t'entendais bien avec le fils de William.

— Je...oui nous nous entendons bien, je me contente de répondre.

— Il sera là ce soir, et Thaïs aussi, déclare-t-il en se tournant vers sa fille.

— Donc les Cortez sont la famille de Thaïs ? j'interroge les elfes, un peu perdue.

— Oui, c'est la fille de Luke et Acelya Cortez, de bons amis à mes parents, révèle Chiara.

— Ils ne vont pas tarder, complète Hélène. Allez-vous préparer les enfants.

Il ne faut même pas une seconde à Chiara pour réagir.

— Diana ! Viens, il faut absolument que tu essayes une de mes robes !

— Je suis désolée Chiara mais je n'aime pas trop ce genre de tenue.

Je ne crois pas qu'elle ait entendu car elle me tire par le bras et m'emmène dans sa chambre.