Rasoir et pharmacie

211 19 0
                                    

-Bon sang... soupira Aki. Tu aurais quand même pu me prévenir! 

-Comme si ça t'aurai fait le moindre bien de le savoir. Fit remarquer Jade. Qu'elle soit sous une pluie torrentielle ou au milieu d'un ouragan, tu n'aurai rien pu y faire de toute manière.

-Et puis, Rin s'y connait et a géré la situation sans problèmes. Enchérit Hataru, dont le récit de l'expédition du week end précédent avait grandement inquiété la grande soeur. Je suis juste privée de tente jusqu'à ce que j'ai assez pour en acheter une, ce que j'aimerai faire au plus vite. 

-Ton amie est vraiment gentille de t'avoir prêté une tente avec une telle valeur sentimentale, tout de même. Fit remarquer Aki. Mais il faut croire que notre famille porte la poisse aux vieilles tentes.

-Ah, ne me reparles pas de cette histoire. Grinça Jade. Vraiment, plus jamais je ne retourne camper. 

-Ton père serait pourtant ravi de pouvoir t'entrainer dans un de ses road trip pourtant, tu sais. 

-Je tiens trop à mon petit confort, désolée. Répondit Jade en s'étirant longuement, à la table de la cafétéria du campus où les trois femmes étaient assises. J'admire ton courage, Moe, mais je ne le ferai pas.

-Oh, tu sais, une fois qu'on trouve la bonne personne avec qui le faire, c'est tout de suite plus passionnant. Se justifia Hataru, en sirotant son chocolat chaud. 

-J'imagine que ça veut dire que tu as des raisons valides pour avoir trouvé un petit boulot... soupira Aki. Mais tu es sûre que tu tiens le coup avec les études?

-C'est fatiguant, mais je me fais au rythme. Répondit Hataru en haussant les épaules. Et puis, je ne comptais pas vivre aux crochets de Lucie durant toutes mes études non plus. 

-Eh, je t'avais prévenue qu'elle serait pareil que les deux autres. Susurra Jade à l'oreille de Aki, avant de glisser un court baiser sur sa joue. Tu les as trop éduquées à l'indépendance et l'auto-suffisance. 

-Tu peux comprendre que c'est un peu frustrant de m'être tant tuée à la tâche pour qu'elles n'aient jamais à se soucier de devoir travailler durant leurs études, et de voir que pas une seule des trois ne l'a pas fait! Gémit Aki, en posant sa tête sur l'épaule de sa compagne. 

-Tu peux parler, tu es la personne la plus têtue que je connaisse quand il s'agit de tout payer toi même, et tu leur as bien transmis ça. Je me trompe, Moe?

-Clairement pas. Gloussa Hataru. Je parie qu'elle a essayé de payer elle même ses tickets d'avion.

-Mais oui! S'exclama Jade. Exactement! 

-Ça va, ça va, on ne va pas revenir là dessus... soupira Aki.

-Ok, mais tout de même! Presque vingt ans de vie commune et tu continue de refuser que je te paie le restau... 

-Après, Jade, ton salaire de prof ne te permet pas non plus de faire la flambeuse... fit remarquer Hataru avec un petit rire. 

-Madame est trop habituée à son confort, alors elle reçoit encore de l'argent de sa mère chaque mois, à presque trente neuf ans. Bougonna Aki. 

-Je suis pas revenue sur le sujet du billet d'avion, alors ne reviens pas sur celui là. S'il te plait? Chérie? 

-Quelle enfant gâtée... soupira Aki, en glissant en rapide baiser sur les lèvres de sa compagne.

Hataru sourit. Cela faisait si longtemps qu'elle n'avait plus pu assister à ce genre de scène de ménage qui avait pourtant bercé toute son enfance. Elle n'avait pas quitté le cocon familial depuis un an que cela lui semblait pourtant tellement lointain et la rendait nostalgique. Quelques mois auparavant, elle aurait sûrement demandé de repartir avec Aki et Jade, et de rentrer à la maison. Mais c'était avant de quitter le club de basket, avant de rencontrer Rin, avant de construire une amitié avec Miwa. Durant l'été précédent, quand bien même elle avait Lucie, Kazuto, et tous les autres membres du club, son moral avait été si bas qu'elle avait sérieusement considéré l'idée de quitter Shizuoka et sa fac pour retourner chez elle. Qu'aurait-elle fait de sa vie à partir de là, elle l'ignorait. Et, de toute manière, les choses avaient fini par s'arranger, et son long épisode de blues mélancolique avait fini par lui passer. Même son anxiété lui bouffait moins la vie, depuis quelques semaines. Ce qui ne l'empêchait pas de repenser avec nostalgie à sa vie d'avant, sa vie d'enfant, en voyant le manège si familier des deux amantes durant tout l'après midi qu'elles avaient passé à trainer sur le campus, à visiter les environs, et à participer aux activités. Elles étaient notamment passées par le gymnase où le club basket tenait son activité, et Lucie avait également fondu sur sa grande sœur, aussi surprise que joyeuse de la revoir après aussi longtemps.

Auprès du feuOù les histoires vivent. Découvrez maintenant