Chapitre 11

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Héra suivit le dieu après une dernière caresse à Cerbère qui signifia son mécontentement de la voir partir par des hurlements à fendre l'âme. L'expression était bien à propos. Elle passa les portes du palais de la Nuit et ne put s'empêcher de trouver la décoration affreusement sobre. Nul doute qu'Hadès n'avait pas encore eu la joie de rencontrer Perséphone. Contrairement à Amphitrite, l'ancienne reine des Dieux avait toujours porté sa belle-sœur dans son cœur. Tout du moins jusqu'à ce qu'elle découvre avec horreur qu'elle était l'une des enfants illégitimes de Zeus. Conçu avec nul autre que leur sœur, celle qu'elle avait cru une alliée et une amie. Demeter. La déesse soupira, ce qui lui attira un regard interrogatif de son guide, auquel elle répondit par un mouvement de main qui lui signifiait de ne pas se soucier d'elle. Ils arrivèrent dans la salle du trône. Les colonnes de marbres noir s'étendaient sur une courte distance. Accrochées à celles-ci, se trouvaient des torches de flammes bleues qui éclairaient le sol d'or et de pierres précieuses sous leurs pas. Elle ne prêta nulle attention à tout cela fixant son regard sur son frère ainé qui se tenait devant elle sur son trône, humblement enroulé dans une toge d'un noir aussi profond que la nuit, la tête enserrée d'un anneau d'or qui lui faisait office de couronne.

- Bonjour Héra, dit-il de ce ton prudent qui avait toujours été le sien.

- Hadès, répondit-elle sans fioritures, s'inclinant légèrement devant lui.

- Je te pensais perdue.

- Je dirais plutôt bien cachée, marmonna Thanatos. Majesté, elle...

- Laisse-nous, ordonna le souverain.

Héra ressentit une certaine satisfaction en voyant le dieu être renvoyé sans plus de cérémonie. Il s'était exécuté sans broncher. Elle avait toujours encouragé Zeus à prendre exemple sur Hadès qui régnait par le respect plutôt que par la force brute et la peur. Il ne l'avait jamais écouté. Comme pour tout le reste d'ailleurs.

- Ton âme est... étrange, Héra.

- Thanatos a dit la même chose. Je croyais que lorsqu'on était endormi ou inconscient, ce n'était pas notre âme mais seulement une fraction de celle-ci qui errait sur ton domaine.

- Pour les mortels. Les dieux ne rêvent pas.

- Tu parles d'un rêve.

- Tu ne devrais pas être là.

- Alors laisse-moi partir, rétorqua-t-elle dans une veine tentative de se faire plus stupide qu'elle ne l'était vraiment.

- Je ne peux pas. Pas avant d'avoir éclairci certain point avec toi.

Il franchit les marches qui les séparaient et lui tendit le bras qu'elle saisit après une courte hésitation. Il l'entraina vers un salon adjacent où elle put s'assoir tandis qu'il se servait un verre. Il ne lui en proposa pas, boire et manger dans le royaume des morts n'étaient pas très judicieux si on voulait pouvoir le quitter.

- Zeus te cherche.

- J'avais cru comprendre.

- Pourquoi est-ce que tu l'évites ? Il a été plus que généreux avec chacun d'entre nous. Il ne te veut aucun mal. Nul doute qu'il souhaite simplement t'offrir ta part.

- Je n'en veux pas. Ça ne m'intéresse pas.

- Pourquoi ne pas lui dire tout simplement ? Pourquoi est-ce que tu le fuis ?

- Je pense qu'on s'éloigne du sujet.

- Je dirais qu'on est au cœur du sujet. Comment l'âme d'une jeune déesse immortelle peut-elle être marquée du sceau de la mort.

- C'est toi le spécialiste, éluda-t-elle.

- Ma théorie est folle.

- C'est que tu es sur la bonne voie, ricana-t-elle.

- Tu ne vas pas tarder à te réveiller. Il t'a trouvé.

- Super.

- Je ne peux pas t'aider si tu ne me dis rien.

- Tu n'as jamais pu.

Elle eut le temps de voir l'expression blessée de son frère avant d'ouvrir les yeux. Elle se redressa prête à prendre ses jambes à son cou avant de se rendre compte qu'elle avait été déplacée dans un lit. Elle regarda autour d'elle, se risquant à quitter la chaleur des draps dans lesquels elle s'enroula néanmoins. Un coup d'œil par la fenêtre lui confirma qu'elle était toujours à Atlantide. Son soulagement fut de courte durée lorsqu'elle entendit la porte de sa chambre s'ouvrirent.

- Tu es réveillée ! s'exclama Poséidon. Je vais prévenir...

- Personne ! Tu ne vas prévenir personne.

- C'est ridicule.

- Fermes cette porte ou je te jure que j'appelle tous les monstres des profondeurs ! On verra combien de temps tient ta précieuse cité !

Le dieu ferma la porte prudemment. Elle ne pensait pas que sa menace fonctionnerait aussi bien.

- Tu devrais t'allonger, tu as pris un sérieux coup de jus.

- Par ta faute.

- J'admets que je n'ai pas assez considéré ton point de vue mais je t'assure qu'il ne te veut pas de mal. Tu aurais vu sa réaction quand on t'a trouvé inconsciente. Il avait l'air d'un mortel terrifié devant la perte d'un proche.

- Comment est-ce que je peux partir d'ici sans me faire attraper ?

- Tu ne peux pas. Le dôme est encore électrifié.

- Il ne veut pas me faire de mal mais il me retient prisonnière !

- Il veut juste parler.

- Pas moi.

- C'est le roi des dieux. Sa volonté prône sur la tienne.

- Rassurant.

- Je resterais avec toi. Je ne laisserais rien t'arriver.

- Comme si je pouvais te faire confiance !

Ils furent interrompus par des coups portés à la porte. Héra sentit son sang ne faire qu'un tour pour mieux se glacer. Elle ne repoussa même pas la main que Poséidon glissa dans la sienne. Elle ne pouvait détacher ses yeux de la porte qui pouvait s'ouvrir à tout moment. Qui allait s'ouvrir à tout moment. Elle ferma les yeux, refusant de le voir, serrant la main du dieu de la mer dans la sienne et enfouissant son visage contre son torse pour tourner le dos à celui qu'elle avait voulu fuir sans succès.

***

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À bientôt pour un nouveau chapitre !

Oh My Goddess!Où les histoires vivent. Découvrez maintenant