Oh My Goddess!

Chapitre 15

Héra était livide, elle recula de quelques pas comme si cela pouvait la protéger de lui. Zeus n'avait jamais très bien pris qu'on lui résiste et encore moins qu'on lui manque de respect. Lorsqu'elle était sa reine, elle avait cru pouvoir se le permettre. Après tout, il lui avait tant de fois rabâché qu'elle était son égale. Sa fin n'avait pas été différente de ceux qui s'y étaient risqués avec un statut bien moindre. En cet instant, elle n'était ni sa sœur adorée, ni son alliée, ni son épouse, ni la mère de ses enfants. Elle n'était qu'une inconnue avec qui il partageait des liens de sang et qui semblait affreusement ingrate. Elle leva les mains en l'air en signe de reddition mais cela ne fit qu'accentuer le froncement de sourcils de son interlocuteur.

- Je suis désolée de m'être emportée, s'empressa-t-elle de dire d'une voix qui menaçait de se briser à chaque inflexion. Je ne voulais pas crier, je voulais juste... je m'excuse. C'est très généreux de me proposer les cieux mais c'est trop d'honneur. Je n'ai rien fais pour mériter ça. Je suis certaine que d'autres que moi seront plus qualifiés.

Elle ne pouvait pas cacher les tremblements qui la secouaient. Ses larmes menaçaient à chaque instant d'échapper à la barrière de ses cils et se contentaient pour le moment de brouiller sa vision. Elle baissa les yeux vers ses pieds dans une vaine tentative de dissimuler son désarroi.

- Héra...

Elle refusait de lever les yeux même si son intonation lorsqu'il avait prononcé son prénom n'avait rien de menaçant. Elle ne pouvait pas baisser sa garde, il était passé maître dans l'art de dissimuler ses sentiments, sans compter un talent rare pour la simulation. Elle le sentit s'approcher et elle se recroquevilla davantage encore sur elle-même, reculant aussi. Il s'arrêta et elle retint son souffle mais rien ne se produisit. Lorsqu'elle leva finalement les yeux, il avait disparu. Elle se laissa tomber sur le banc le plus proche, essuyant les sueurs froides qui glissaient sur son front et son cou, secoué de sanglots incontrôlables. Elle ressentait tellement de colère. Elle n'aurait pas dû être aussi faible, aussi terrifiée mais elle ne parvenait pas à oublier la mort et la terreur absolue qui l'envahissait à l'idée de repasser par là.

Elle se reprit petit à petit, inspirant et expirant jusqu'à calmer les dératés qui malmenaient son cœur. Elle savait qu'il lui fallait rejoindre la salle de réception. Son absence ferait jaser puisque Poséidon avait organisé le banquet en son honneur. Pour célébrer son retour parmi les siens. Elle se leva et avança jusqu'à la fontaine pour observer son reflet dans l'eau et s'assurer que sa crise de nerfs n'avait pas totalement ruiné le travail d'Aréthuse et des autres nymphes. C'était plus qu'évident qu'elle avait pleuré, mais elle pourrait faire passer ça pour des larmes de joie d'avoir retrouvé sa famille. Elle se faufila aussi discrètement que possible à l'intérieur, rejoignant son frère dont le visage s'éclaira en la voyant. Il tendit les bras vers elle. Elle n'avait aucune envie d'être touchée en cet instant mais elle se fit violence et se glissa contre lui.

- Qu'est-ce qu'il s'est passé ? lui demanda-t-il en chuchotant. Zeus est retourné dans ses appartements, il était furieux.

- J'ai refusé de régner sur les cieux, répondit-elle en s'écartant pour le regarder, chuchotant elle aussi.

- Pourquoi ? C'est une opportunité en or ! Je pensais qu'il garderait les cieux pour lui.

- Ça ne m'intéresse pas.

- Ne me dis pas que tu préfères rester avec ton stupide mortel et sa famille ?

- Aussi invraisemblable cela puisse-t-il te paraître, oui. Je ne veux pas me retrouver responsable de qui que ce soit. Je ne veux pas être au cœur des intrigues d'une Cour qui me caressera dans les sens du poil pour mieux me poignarder dans le dos à la fin. Je veux une vie paisible, loin de tout ça.

- Tu ne tiendras jamais. Tu vas mourir d'ennui.

- J'y arrivais plutôt bien avant que mon imbécile de frère m'oblige à venir passer une semaine ici sous réserve qu'il n'informe pas Zeus de mon existence. Promesse qu'il n'a d'ailleurs pas tenue.

- Premièrement je n'ai pas trahi ma parole, je ne lui ai rien dit, Amphitrite est la seule à blâmer. Deuxièmement, je te l'ai dit déjà, si tu restes trop longtemps parmi les mortels, tu deviendras comme eux... mortelle.

Elle lui ferait payer le premier point d'une manière ou d'une autre mais ce n'était pas sa priorité actuellement. Elle ne pouvait néanmoins pas nier qu'il ait raison sur le second. Elle n'avait aucune envie de mourir. Elle voulait vivre... comme une mortelle... pour toujours. Si le seul moyen d'avoir le beurre, l'argent du beurre et le cul de la crémière était de passer une semaine toutes les trois semaines avec Poséidon pour se ressourcer, elle le ferait volontiers.

- Est-ce que tu penses qu'il... va me punir ? Demanda-t-elle réellement inquiète.

- Je pense qu'il va essayer de te convaincre surtout. Tu devrais accepter... Être la sœur de Zeus fait de toi la proie idéale pour ses ennemis s'ils souhaitent l'atteindre. Quand tu prends possession d'un domaine, tu deviens plus... puissante.

Elle ne le savait que trop bien. Lorsqu'elle était devenue reine des cieux, elle n'avait pas eu besoin de consommer d'ambroisie et de nectar pendant des siècles. Elle était tentée, après tout, cette fois-ci, elle obtenait le titre sans avoir à épouser le roi des dieux. Elle secoua la tête vigoureusement pour chasser tout ça de son esprit. Si elle acceptait, il lui faudrait voir régulièrement Zeus et c'était ce qu'elle cherchait à tout prix à éviter.

- Assez parlé politique ! s'exclama Poséidon en la gratifiant de son sourire insouciant. Allons danser !

Il l'entraina, la faisant virevolter, boire et manger comme s'il n'y avait pas de lendemain. Elle se laissa gagner par l'humeur contagieuse du dieu. Elle le nierait surement en se réveillant mais elle s'était amusée. Son propre rire qu'elle n'avait pas entendu depuis bien longtemps éclata, ravissant tous ceux qui avaient eu le privilège de l'entendre. Certaines nymphes affirmèrent qu'une galaxie était né de ce rire et Héra trouva l'idée charmante. Peut-être qu'elle pourrait y trouver refuge. Lorsqu'elle rejoignit son lit au matin, elle s'endormit un sourire aux lèvres.

Alors qu'elle se sentait dériver vers le monde des rêves, une main se posa sur sa bouche. Elle ouvrit les yeux et se débattit autant qu'elle le pouvait vu son état d'ébriété avancé. Malheureusement pour elle, son assaillant... ou plutôt son assaillante n'était pas « n'importe qui ». Elle eut à peine le temps de reconnaitre Hécate que l'un de ses maudits sorts la frappa de plein fouet. Elle plongea dans un sommeil plus artificiel que celui qu'elle s'était apprêtée à rejoindre une minute plus tôt.

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À bientôt pour un nouveau chapitre !