14.Damian "mon air, mon souffle, mon oxygène"

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Je ferme la porte et laisse derrière moi cette pauvre conne. Les minauderies, les caresses trop insistantes et ce genre de conneries, c'est ce que je déteste le plus au monde. C'est seulement la crainte de provoquer un conflit entre un gros client et Vincent qui m'a poussé à prendre sur moi.

Mais hors de question que je la laisse me tripoter tranquillement, je ne suis pas une pute, et encore moins la sienne.

Agacé d'avoir perdu mon temps avec cette chieuse, surtout que son mari n'est même pas présent à cette petite sauterie à la con, je me dépêche de rejoindre le rez-de-chaussée, à la recherche de Sohan, que j'ai abandonné depuis trop longtemps. Ignorant délibérément les regards que je sens glisser sur moi, je m'apprête à gagner la terrasse, lorsqu'une silhouette attire mon attention.

Assis nonchalamment dans un canapé du salon, un faible sourire peint sur son visage, il est en train d'écouter poliment une nana qui semble avoir un débit anormalement élevé. Il ne m'a pas encore vu, tant mieux, je vais pouvoir me repaitre de cette vision encore un petit instant.

Alors que je déambule entre les convives, mon regard s'attarde sur son profil avenant, sur ses mains puissantes, sur la carrure de ses épaules et sur ses jambes délicieusement écartées. Je repense à tout ce que je lui ai dit plus tôt, à mon désir qui s'éveille lorsque je le vois assis. J'aurais pu ajouter sa démarche, sa façon de rire, de se passer la main dans les cheveux ou encore son odeur, mais je flippe trop de passer pour un mec obsessionnel.

Pourtant c'est ce que je suis en train de devenir, au milieu de cette foule, de ce bruit, de cette masse compacte et inintéressante, je ne vois que lui, comme s'il brillait, comme s'il m'aimantait à sa personne. Plus le temps passe et moins je lui trouve de défauts, sa banalité s'est transformée en une simplicité absolument captivante, et son côté gendre parfait en est la preuve qu'il existe encore des gens foncièrement bons et généreux.

Et c'est ce qui est si terrible, de devoir faire face à un tel mec et ne ressentir que des envies égoïstes, comme celle de ne vouloir le garder rien que pour moi. Cette gonzesse à qui il est en train de parler, je sais pertinemment qu'elle ne l'intéressera jamais, mais je m'en fous, ça m'insupporte. L'imaginer passer tout son temps avec son meilleur pote me tape sur le système, savoir qu'il vit sa vie quand je ne suis pas avec lui me rend dingue. Et en même temps, j'aime le savoir heureux, épanoui et bien entouré.

Et ce foutu paradoxe dans ce que je ressens, il me rend complètement dingue.

Soudain à cran par cette distance entre nous, je me dépêche de le rejoindre et de me poser devant lui, les mains dans les poches, la mine fermée. Si la greluche pouvait foutre le camp en voyant ma tronche menaçante, ça m'arrangerait pas mal.

- Je t'ai cherché sur la terrasse, mentis-je en ancrant mon regard au sien, qui semble étrangement voilé.

- J'avais froid.

Sa réponse monocorde me trouble, c'est plutôt mon style ça, lui est du genre à donner vie à chacun des mots qu'il prononce.

- On se tire ?

Il ne répond rien, la fille, mal à l'aise, décide de s'éclipser après l'avoir brièvement salué.

- Ou tu préfères rester ici à ratcher avec elle ?

- C'est toi qui m'a trainé à cette soirée, riposte-t-il en se levant lourdement, détachant ses orbes de mon visage pour regarder au loin. Au départ, j'avais prévu quelque chose de plus sympa, comme un film, de la malbouffe et mon lit.

- Tu ne t'en es pourtant pas plaint.

Il hausse les épaules et s'en va rejoindre la sortie, sans m'accorder le moindre regard, ce qui commence sérieusement à me mettre de travers. Qu'est-ce qui lui arrive ? On était à deux doigts de s'embrasser sur la terrasse et maintenant il m'ignore délibérément ?

Dans ma chairOù les histoires vivent. Découvrez maintenant