Dans ma chair

15.Sohan "sixième sens"

- Tu les ponds toi-même les œufs ou ça se passe comment ?

J'adresse un splendide doigt d'honneur à Jay sous les rires de Kathleen et Franck.

- Des œufs mimosa, ça demande un petit temps de préparation, soupiré-je en finissant ma préparation.

- On ne pouvait pas juste se commander des pizzas ? intervient Franck, affalé sur le canapé en train de faire du zapping intensif.

- Laisse-le, il veut se la péter en nous montrant à quel point les Français savent mieux manger que nous.

Nouveau majeur à l'attention de mon meilleur ami, qui s'esclaffe allégrement avant de piocher dans le bol de chips. Malgré leurs boutades, je suis content qu'on se refasse nos petites soirées du vendredi soir, surtout que je ne les ai pas vus depuis ma fuite du bar il y a de ça plusieurs semaines.

- Les gars... J'ai les pieds en compote, se plaint Kathleen en laissant tomber sa tête sur l'épaule de son chéri. Cet espèce d'enfoiré nous force à porter des talons hauts parce que, soi-disant, on fait dans le prêt-à-porter de luxe.

- Est-ce que c'est seulement légal ? lui demandé-je en déposant le plateau de mes petites entrées froides sur la table basse.

- J'en sais foutrement rien, je chercherai sur Internet, en même temps que les meilleurs façons de tuer son boss.

- Ouais, fais gaffe avec ce genre de recherches, ça fait un peu titre de romance pour adultes, s'exclame Franck en enroulant son bras autour de ses épaules.

Je les laisse débattre sur les comédies romantiques et avale mon premier œuf, putain, qu'est-ce que j'aime ça ! Il faut absolument que je trouve la thune nécessaire pour m'octroyer un petit voyage en France, ça fait bien trop longtemps que je n'y suis pas allé, et ce n'est pas sur mon père que je pourrais compter pour m'y rendre.

- Et pour le repas, tu nous as concocté quoi de bon ?

Je jette un regard empli de fierté à Kathleen en bombant le torse, ce qui la fait glousser, peut-être que j'en fait un peu trop.

- Des bouchées à la reine !

- Oh putain... C'est quoi ça encore ? beugle ce casse-couilles de Jay.

Qui plutôt que de goûter à mes délicieux hors-d'œuvres, a préféré s'allonger par terre sur le tapis, son bol de crackers sur le ventre. Quel trou du cul.

- Un feuilleté avec du blanc de poulet, des champignons et de la béchamel. Et faite maison, s'il vous plait.

- Si jamais, j'ai le numéro de la pizzeria qui fait le coin de la rue dans mon téléphone.

- Ferme ta gueule Jay.

L'imbécile se met à rire tout en me donnant un léger coup de pied dans les côtes. Avec son bonnet qui lui tombe presque sur les yeux et ses lunettes carrées qui cachent la moitié de son visage, je peine à distinguer ses traits, bien que je les imagine moqueurs.

- Et en dessert, poursuivis-je en l'ignorant délibérément. Je quitte rapidement la France pour me rendre en Italie, avec un Tiramisu qui va éveiller vos papilles gustatives.

- Oh bordel... Donnez-moi une corde que je le pende avec.

Agacé, bien qu'amusé je l'avoue, j'attrape le pied de Jay et le coince dans le creux de mon aisselle, sous ses plaintes sonores.

- Lâche-moi ! Tu vas me le casser !

- Fallait arrêter de me faire chier !

Il se tord, rouspète, m'insulte, mais ne parviens pas à se défaire de ma prise. Jay est loin d'être un sportif, il est plutôt adepte du zéro effort, détestant plus que tout sentir des gouttes de transpiration dévaler sa peau.