CXXXVIII. Un Combat Jaloux

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Sur le plancher ciré se reflétaient les mouvements maladroits de mes camarades, chacun tentant d'impressionner son binôme. Certains étaient plutôt doués, d'autres en revanche changeaient tout le temps de pied de garde et gardaient leurs mains devant leur visage, effrayés.

Le crissement caractéristique des chaussures sur le parquet me fit tourner la tête. Je retins un sourire devant un Cazimir qui ne pouvait pas s'empêcher de donner des coups rapides, alors que la professeure avait demandé que nous les décomposions lentement.

Dans le fond de la salle, j'aperçus Kathryx, en binôme avec un garçon dont les proportions rappelaient celles d'une armoire -ou d'un frigo 90L, au choix. Très concentrée, elle se déplaçait par petits pas à droite et à gauche, esquivant les coups de poings du géant. Elle ne faisait clairement pas le poids face à lui mais la lumière jaune des lampes plafonnières se refléta sur ses cheveux, lui donnant le temps d'un instant un air de guerrière mythologique.

Nikolas quant à lui, ou plutôt Chokola, n'en était toujours qu'à l'étape une, celle de la mise des bandes. Il avait décidé de faire très sérieusement l'imbécile aujourd'hui.

Cette idée ne me dérangeait pas le moins du monde, l'atteindre de mes coups plusieurs fois d'affilée serait une première pour moi.

Quand il eut terminé, il se mit en garde n'importe comment. Nous fîmes en même temps un direct. Nos poings se bloquèrent mutuellement. À quoi jouait-il ? Il n'était censé y avoir qu'un attaquant dans cet exercice.

J'attaque, Chokola, dis-je d'une voix délibérément hautaine.

Je reprenais mon rôle de maître car j'avais remarqué que le duo à côté de nous, un brun à lunettes et un roux ébouriffé, nous fixaient discrètement depuis quelques minutes.

Nikolas obtempéra. Nonchalamment, il se repositionna et attendit mes coups. Je commençai par un crochet du droit. Mais sans me regarder, il mit tranquillement sa main devant son oreille, si fait que je ne touchai que son poing. Soupirant, j'enchaînai avec deux uppercuts qui cette fois atteignirent tous deux son visage.

C'est à ce moment que la professeure passa à côté de nous. J'étais sûre qu'elle avait vu que Nikolas avait contré mon crochet. Cet idiot allait se faire attraper.

Bien, bien. À vous, jeune homme, d'attaquer cette demoiselle nommée... ?

Kafée, fis-je, puis en le désignant, et voici Chokola.

Paresseusement, il se remit « en garde ». La professeure corrigea la position de ses mains. Je trouvais qu'elle le regardait étrangement.

Malgré vos mouvement maladroits, vous semblez avoir des aptitudes pour le combat, Chokola.

Et voilà. Il n'aurait pas dû freiner mon coup. Et il le savait très bien. Il lui fit son sourire charmeur comme réponse.

Elle sourit à son tour. Le bleu persan de ses yeux brillait.

Voyons comment vous vous débrouillez pour les coups de pied. Essayons le chassé latéral. (et dans ma direction) Kafée, pourriez-vous vous mettre en garde, s'il vous plaît ?

 (et dans ma direction) Kafée, pourriez-vous vous mettre en garde, s'il vous plaît ?

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Ce que je fis. Apparemment, elle n'avait pas la moindre idée du système d'élite dans cette école. Ou bien elle passait outre. Dans tous les cas, son intérêt pour Nikolas était surprenant.

Elle se plaça sur sa gauche.

Bien. Levez et pliez votre jambe droite, celle de derrière, voilà. On appelle ça « armer ».

Nikolas faisait exactement ce qu'elle demandait. Jusque-là, il était difficile de tout manière de ne pas réussir les gestes.

Maintenant, tendez votre jambe de façon à lancer le talon sur une trajectoire rectiligne.

Il tendit la jambe et perdit l'équilibre. Aussitôt, Ania le rattrapa par les épaules. Elle rit.

Ce n'est pas grave, recommencez en essayant de rester debout.

Elle le regardait d'une drôle de manière. Avait-elle deviné qu'elle avait en face d'elle quelqu'un qui pouvait la battre en deux temps trois mouvements ou bien... s'agissait-il d'autre chose qui était en train de battre ?

Tu n'as pas placé tes hanches de profil, Chokola, lâchai-je.

Ania haussa les sourcils. Je me fichais qu'elle devine que je n'étais pas une néophyte. Elle était étrange.

Je peux lui montrer, si vous permettez, repris-je, puis, pour tenter de me rattraper ; je crois avoir compris le mouvement.

Elle acquiesça, et elle n'aurait pas pu réagir autrement, sinon il n'y aurait plus eu aucun doute. Elle nous quitta pour aller voir un autre binôme.

Je restai où j'étais, ne sachant pas trop quoi faire. Nikolas connaissait très bien la coup basique qu'était le chassé latéral. Il fit un pas vers moi.

Il baissa le regard vers mon pendentif, qui s'était échappé de dessous mon sweat. Décidément, il faisait vraiment une fixette dessus aujourd'hui.

Son regard était étrange. Indéchiffrable à 100% mais dans le genre indéchiffrable étrange. Je ne savais d'où je tenais cette intuition, mais j'en étais certaine.

Il souffla tout bas, pour que personne à part moi ne l'entende :

Range ton collier.

Selena - Les Lunes JumellesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant