Sous la pluie

26 5 4
                                    

Il la prit avec un mouchoir et me la tendit. De lointains souvenirs remontèrent et mes yeux se mouillèrent. Je la pris délicatement de peur de la briser. De peur de briser tout ce qui me restait de lui. Mon coeur était sur le point d'exploser et j'eus de plus en plus de mal a respirer. Pendant une minute, je pensais que Wilson me l'avait donné par compassion, toutefois, il soupira, visiblement agacé par mes états d'âme et me reprit l'insigne d'un geste brusque.

- Ce n'est pas le nom de votre père que je voulais vous montrer Anderson ! Regardez ici ! Vous voyez là ? Il y a une belle elprunte. Peut-être que nous pourrons en retirer quelque chose. Arrêtez donc de pleurer et levez vous, nous allons être en retard.

Il me prit par le bras et me souleva pour me mettre debout, puis sortis de la pièce sans me donner d'explication sur mon hallucination, ni sur son oeil. Ce fut véritablement à cet instant, que je fus décidée à enquêter sur le mystérieux Henry Wilson. Plus déterminée que jamais, je le rejoignis dans la voiture et le trouvai au volant, essuyant ses cheveux trempés par la pluie avec une petite serviette blanche. Il avait également retiré sa veste et son col roulé, qu'il avait plié avec soin et posé sur la banquette arrière. Lorsqu'il se rendit compte que je l'observais, non sans une certaine attirance à mon grand regret, il roula des yeux et me balança une serviette sèche sur la tête. Il soupira longuement, puis démarra la voiture.

- Je ramène Joshua chez lui et je vous dépose. Annonça-t-il d'un air tracassé.

- Son nom est donc Joshua ? Vous vous connaissez ? Demandai-je curieuse.

- Oui. Mais n'espérez pas que je vous en dise plus. Combien de temps comptez vous rester ?

- Hé bien ... Il faut d'abord que je vende la maison et seulement après je...

- J'ai compris.

- Dites ... Votre oeil...

- Ça ne vous concerne pas. Gardez votre curiosité malsaine pour les tâches et les enquêtes qui vous seront confiées.

- Mais ... Puisque nous sommes condamnés a faire équipe, nous pourrions peut-être apprendre à nous connaître !

- Je n'y tiens pas. Nous ne sommes pas coéquipiers, vous êtes mon assistante. Maintenant j'aimerais autant que vous vous taisiez.

Je jetai le revolver qu'il m'avait donné, dans la boîte à gants et me tournai de l'autre côté, la tête appuyée contre la vitre. Je laissai mon esprit vagabonder quelques minutes, puis le vibreur de mon téléphone me sortit de mes pensées. Eric, dont je n'avais plus eu de nouvelle depuis notre précédente conversation, m'appelait. Devais-je vraiment répondre ? Je regardai l'écran, le laissant vibrer un moment. Agacé, Henry Wilson laissa échapper un soupir bref. Je me décidai alors a répondre. Mon angoisse se traduisit à ce moment là par ma voix qui partit dans les aigus, sans que je ne puisse la contrôler, irritant un peu plus, l'autre, qui se trouvait au volant.

- Allô ?

- Blue ? C'est Éric. Comment vas-tu ? Demanda-t-il comme si de rien n'était.

Je ne savais même pas ce que j'étais censée répondre à cette question. Un sentiment étrange m'avait envahi depuis que j'avais vu l'oeil de Wilson, auquel je jetai un rapide coup d'oeil, avant d'inspirer profondément et de répondre à Éric en essayant d'être aussi convainquante que possible.

- Oui, je vais bien. Merci. Et toi ? Tu ne m'as pas rappelé depuis la dernière fois...

- Je sais. J'aurais dû, je suis désolé. Je vais faire un effort. J'ai une surprise pour toi d'ailleurs !

- U-une surprise ?

- Ahah! Je ne te dirai rien avant le jour où tu la recevras! Blue. Je t'aime. Je veux me rattraper !

- O-oui... Oui moi aussi.

Lorsque je répondis, abasourdie par ce brusque changement d'attitude, l'inspecteur se mit a pouffer.

- Tu es avec quelqu'un ?

- Oui, on m'a proposé un travail le temps de vendre la maison. Mon coéquipier me ramène chez ma mère. Je te rappellerai plus tard!

Je ne lui laissai pas le temps de dire quoi que ce soit et raccrochai, fixant Wilson d'un regard accusateur. Celui-ci se pincait les lèvres pour ne pas rire.

- Vous avez quelque chose à dire? Grognai- je.

- Je n'ai jamais rien entendu d'aussi niais! Ricana-t-il. J'ai l'impression de regarder une série romantique du dimanche... Mais j'imagine que je ne peux rien comprendre à ces choses là...

- " ces choses là" ? Vous vous moquez encore de moi, c'est ça ?

- Je vous laisse interprèter cela comme bon vous semble mademoiselle Anderson. Je ne compte pas me mêler de vos histoires de coeurs. Et ne pensez même pas à m'en parler, je m'en contre fiche...

- Vous êtes odieux ! M'écriai-je perdant toute patience.  Arrêtez vous ici ! Je vais rentrer à pied!

Il arrêta la voiture près d'un trottoir, le regard froid, comme à son habitude. Il défit sa ceinture et se pencha vers moi sans me quitter des yeux. Surprise par la proximité de nos corps, mon coeur fit un bon dans ma poitrine et mon regard glissa de lui même sur sa pomme d'Adam, puis sur ses clavicules encore humides, et imaginai l'espace d'un instant ce qui se cachait sous son débardeur blanc. Toutefois, il mit vite fin à mes fantasmes lorsque j'entendis le cliquetis de ma ceinture qui se détachait, et le bruit de la porte qui s'ouvrait. Tout en restant penché vers moi, il me sortit d'une voix sèche et irritée :

- Très bien. Dans ce cas, sortez de la voiture.

- Mais... Il pleut à verse! Protestai-je peu fière d'avoir osé le défier.

- Sortez. Maintenant.

Secrets ( 1ère Partie )Où les histoires vivent. Découvrez maintenant