Décéptions

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Je savais que ce que je faisais était mal. Que j'allais forcément bousculer la vie de certaines personnes. Mais, depuis mon réveil, le barage qui retenait mes émotions s'était fissuré et je sentais que j'allais bientôt être engluée à l'intérieur d'un maelstrom si je ne libérais pas un peu les sentiments qui me rongeaient. Grisée par l'alcool et l'ambiance festive, j'avais perdu le contrôle et me laissais entrainer par mes envies.

Oui. Lorsque je me réveillai et que Éric me prit dans ses bras en soupirant de soulagement, je ne pus penser qu'à une chose : le visage d'Henry. C'était bien la première fois que je lui voyais une expression aussi douce et triste à la fois. Et puis mes yeux ne quittaient plus la banquette sur laquelle il avait déposé un objet. Je ne pensais qu'à ça et la curiosité commençait sérieusement à m'envahir alors qu'Éric me parlait de tout un tas de choses que j'avais déjà entendu pendant mon sommeil. Mais comment le lui dire ? Je n'avais pas d'autre choix que d'écouter à nouveau toutes les péripéties de sa mère, qui, soit dit en passant ne m'aimait pas beaucoup. Le regard et la pensée fixés sur ce foutu fauteuil, il se rendit compte que je ne prêtais aucune attention à ce qu'il disait.

- Je t'ennuie ? Dit-il agacé.

- Mmh... Oui. Je suis d'accord.

- Blue.

- Ah. Oui je vois.

Lorsque je me rendis compte de ma réponse, je me tournai vers lui, avec mon plus bel air désolé et m'excusai.

- Pardonne moi Éric, je suis un peu perdue après avoir ...

- Mh. C'est normal ne t'en fais pas. Tu veux te reposer ?

- Non. J'ai besoin de sortir un peu. Tu penses qu'ils me laisseront me promener ?

Il me regarda étonné. J'avais déjà du mal a rester assise , alors marcher était évidemment hors de question. Une heure plus tard, il s'en alla, déposant un baiser sur mon front avant de sortir. A peine eût-il fermé la porte que je bondis maladroitement hors de mon lit et me précipitai vers la banquette pour y découvrir une longue chaîne en argent au bout de laquelle pendait une pierre de sel taillée. Je m'assis et le contemplai longuement. Un sourire se dessina sur mon visage. J'avais cette sensation que ce petit cadeau qui de prime abord ne valait pas grand chose, était ce que je possédais de plus précieux. Je passai toute la nuit sans dormir, a admirer le bijou et ne  m'endormis au petit matin, ce qui ne ravit ni les infirmières, ni Éric qui cru bon de me faire un sermon.
Quelques jours plus tard je pus enfin rentrer chez moi, avec l'ordre de ne pas me surmener. La maison était décorée en vu des fêtes de fin d'année, ce qui ne manqua pas de m'étonner.

- Chéri, le Réveillon est la semaine prochaine... Me fit remarquer Éric avec un grand sourire. D'ailleurs, Bryan nous a invité à la fête du Réveillon du commissariat ! J'ai pensé que tu voudrais y aller alors j'ai accepté.

Oh non. C'était sûrement la pire idée qu'il aurait pu avoir. Henry et Éric dans la même soirée, je ne pouvais pas affronter ça. Puis il ajouta la goutte d'eau qui fit déborder le vase.

- Ah! Mes parents viendront aussi pour les fêtes. 

- Quoi ?!

Je sursautai à la seule mention de ses parents. Cette soirée s'annonçait vraiment mal. Sans même que je puisse me faire à cette idée, je me retrouvai en robe de soirée, tenant le bras de mon compagnon devant la porte d'entrée du commissariat. Je peinais a respirer et mon corps était aussi raide qu'un piquet. Je ne désirais qu'une chose : fuir.  Tous les agents de police étaient là, accompagnés de leurs femmes et de leurs enfants, vêtus de leurs plus beaux habits et de grands sourires sur leurs visages. Un énorme sapin décoré avec des insignes et des badges trônait dans le fond de la pièce, entouré d'un buffet où toutes sortes de boissons et de petits fours étaient exposés. Lorsque Bryan nous vit, il vint nous accueillir joyeusement et me prit dans ses bras. Lucinda fit de même et me prit à part pour me raconter tous les commèrages qui circulaient au sein de l'établissement. Celles-ci étaient d'ailleurs bien plus divertissantes que les aventures de ma belle-mère. Bien entendu, Wilson, dont les dernières frasques avaient fortement ébranlées son nouvel assistant, vint me dire bonjour. Habillé de façon très élégante, ses cheveux toujours un peu en bataille, il arborait une mine renfrognée et était visiblement de mauvaise humeur. Et je compris vite pourquoi. Derrière lui, le tenant fermement par le bras se tenait Helen. J'avais beau ne pas vraiment l'apprécier, elle n'en était pas moins d'une beauté éblouissante avec sa robe bordeau, ses talons hauts et ses longs cheveux chatains qui ondulaient parfaitement. Grands dieux que j'en étais jalouse de ses cheveux. Et de sa robe... Elle me sourit et me salua avec courtoisie. Étrange. Elle qui d'ordinaire ne faisait que m'ignorer ou me lancer des regards froids, la voila qui désormais venait s'enquerir de mon état de santé et, visiblement au courant de ma démission, me souhaitait de trouver le bonheur ailleurs. Sous entendu loin d'Henry.  Il me fallait un verre, voir deux. Je m'eclipsai discrètement, et fis le guet devant le service à punch, remplissant mon verre au gré de mes envies et de mes frustrations, me demandant bien où Éric avait bien pu disparaitre. Et soudain le dragon arriva, vêtue d'un sublime ensemble rouge et noir, et un sourire carnassier sur les lèvres. Du fond de la pièce je l'entendis crier :

Secrets ( 1ère Partie )Où les histoires vivent. Découvrez maintenant