Chapitre 27

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Un bruit sourd tira Ayo de sa torpeur. Lentement, elle ouvrit les yeux et tenta de s'habituer à la lumière. Sa vision restait floue et elle ne percevait pour le moment que des tâches de couleurs. Son état devait être bien plus dégradé que ce qu'elle pensait. Elle essaya de bouger mais son corps, déjà fragilisé, était lourd et endolori, confirmant ses craintes. Elle sentait le vibranium recouvrir certaines parties de son corps, celles qui avaient dû amortir l'explosion du golem. Son esprit flottait dans un brouillard épais et elle dû mobiliser toute sa volonté pour arriver à s'en extraire.

Elle essaya d'abord de comprendre où elle était. Des murs blancs, une lumière tamisée, des bips sonores et répétitifs... Une chambre médicalisée, certainement un des centres de Stark. Elle sourrit à l'évocation du nom de son improbable ami. Satané Milliardaire...

Petit à petit sa vision revenait. Elle remarqua qu'elle était toujours vêtue de sa tenue de combat et des capteurs lui avait été branchés au bout des doigts. Son apparence n'avait pas bougée et elle en fut grandement soulagée.

Un énorme bouquet de fleurs était posé sur la table à côté d'elle, avec une carte et un flacon de ses pilules en vibranium. Elle l'attrapa du bout des doigts et en avala difficilement une poignée avant d'ouvrir la carte.

"Au risque de le rendre jaloux. Tendrement, Steve."

Ayo sourrit. Mais en reposant la carte, les mots de Steve la percutèrent. Son sang ne fit qu'un tour et, une force nouvelle l'animant, elle arracha tous les capteurs et sauta du lit. Le bruit qui l'avait réveillée provenait de la douche de sa chambre. En tremblant, elle s'avança vers la salle de bain et entrouvit silencieusement la porte.

La première chose qu'elle vit fut son bras. Son bras en vibranium noir, tendu devant lui, et dont la main reposait sur le carrelage de la douche. Puis son profil, offert à l'eau qui s'écoulait du plafonnier, ses cheveux collés à sa nuque, son dos musclé disparaissant dans la buée. Elle l'observa de longues minutes, agrippée à l'encadrement de la porte pour ne pas tomber, jusqu'à ce qu'il finisse par sentir son regard. Il se tourna vivement vers elle, ses yeux bleus agrandis de surprise. Il coupa l'eau et sortit rapidement de la douche en enroulant une serviette autour de ses hanches.

- Ayo ! Dit-il en s'avançant vers elle.

La jeune femme lui fit signe de ne plus bouger. Il optempéra sans un mot, ses cheveux mouillés gouttant sur ses épaules. Les yeux pleins de larmes, Ayo se mordait la lèvre inférieure pour ne pas craquer. Elle détailla chaque centimètre de son corps, retrouvant avec émotions chacune de ses aspérités, ses cicatrices, ses grains de beauté... Sa voix, chaude et grave résonnait encore en elle.

Mais était- ce réel ? Elle avait passé tant de temps à rêver ce moment, et tant d'heures à projeter ses souvenir avec les lunettes de Tony... Ses commotions pouvaient-elles lui jouer des tours ? Et si par miracle ça l'était, serait-elle à la hauteur ? Elle avait tant changée depuis toutes ces années... Pourrait-il aimer ce qu'elle était devenue ? Elle tendit une main tremblante vers Bucky mais recula avant même de l'effleurer.

Lui ne bougeait pas, seuls ses yeux scutaient son visage, inquiets. Steve leur avait expliqué, à lui, Sam, T'Challa et tous les autres, que leur absence avait durée cinq ans. Cins longues années... Tous avaient été profondément affectés par cette nouvelle, se questionnant sur ce qu'étaient devenus leur famille, leur proche, mais aussi le monde, qui était parti, qui était resté...

Bucky avait tout de suite questionné Steve pour Ayo, devançant T'Challa. Quand il avait comprit qu'elle était restée, son coeur s'était brisé. Pour lui, ils s'étaient quittés hier, mais cinq ans s'étaient écoulés depuis leur dernière rencontre et il ne savait rien de ce qu'elle avait pu traverser. Ni de qui elle avait pu rencontrer. Avait-il seulement le droit d'être à son chevet ? Il y a cinq ans cette question ne lui aurait jamais traversé l'esprit, ils s'aimaient comme un seul être, mais aujourd'hui... Il était partagé entre le désir, intense et égoïste, qu'elle soit restée sienne, et l'espoir altruiste qu'elle ait pu se reconstruire  après sa perte.

Elle tendit une nouvelle fois sa main et posa sa paume sur son torse. Il était bien là, devant elle, terriblement réel et cruellement attirant. Incapable de soutenir son regard, elle se raprocha avec beaucoup d'appréhension et posa son oreille sur son coeur. Elle ferma les yeux et écouta longuement la vie battre dans le corps de Bucky.

La porte de la chambre s'ouvrit brusquement sur un Bruce Banner paniqué.

- Bucky, que se passe-t-il, les machines n'ont plus de sign...

Le scientifique se figea en voyant le lit vide, et soupira quand il repéra les deux jeunes gens l'un contre l'autre.

- Pardon ! Les capteurs n'envoyaient plus de signal et j'ai... Après Tony, j'ai cru que...

Bucky, qui sentit Ayo se figer contre lui, lui fit comprendre d'un regard de repartir, ce que Banner fit sans discuter.

Quand ils furent à nouveau seuls, Ayo se pressa un peu plus contre Bucky. Alors, avec la plus grande douceur, il enroula ses bras autour d'elle, autour de son corps frêle et affaibli. Tout en elle n'était que souffrance et douleur. La tendresse dans l'étreinte de Bucky se transforma en rage et il la serra avec force contre lui. Sous ses tenues en vibranium, personne ne pouvait s'en rendre compte, tous ne voyaient que l'image qu'elle voulait renvoyer. Mais lui, lui il le sentait, ce n'était pas elle. Elle était amaigrie, décharnée même, faible et épuisée. Il serra sa nuque et embrassa les cheveux sur sa tempe.

-Mon dieu, Ayo, qu'as-tu dû endurer ?

Petit à petit, les défenses de la jeune femme cédèrent. Les larmes dévalèrent ses joues sans qu'elle ne puisse les retenir, se mêlant aux gouttes d'eau sur le torse de Bucky.

Bucky caressa son dos, ses cheveux, la berca contre lui et soutint son corps quand ses jambes, encore faibles, flanchèrent. Il la couvrit de mots doux et rassurants, tout aller bien se passer maintenant, il était là... À force de tendresse, Ayo finit par s'apaiser, mais sa douleur était immense et Bucky ne pouvait que constater les dégâts.

- Ayo, regarde-moi...

La jeune femme s'y refusa obstinément, fermant ses paupières derrière lesquelles l'eau avait finalement cessé d'affluer. Bucky saisit ses mains et les ramena entre eux, séparant leurs corps.

- Je t'en prie, mon amour, regarde moi...

Mon. Amour.

Transportée par sa voix grave, elle finit par relever la tête et plongea dans les yeux de Bucky. Il la contempla longuement, lui souriant, et dans son regard elle se sentit belle, grande, forte, et par dessus tout aimée.

- Tout va bien, lui souffla-t-il en rapprochant son visage, je te vois, tu es toujours là...

Avec une extrême précaution, Bucky posa ses lèvres sur celles d'Ayo. Sa chaleur irradia en elle en une puissante déferlante. Il s'écarta et la regarda à nouveau et, trouvant avec délice l'approbation dans ses yeux il l'embrassa encore. Et encore. Et encore. De doux baisers au goût sucré.

Ayo finit par se détacher à contre coeur de la chaleur de leurs retrouvailles. Elle sépara leurs lèvres, ride entre les sourcils, et demanda :

- Où est Tony ?

Monsters Searching For Redemption [2] - La Gardienne du WakandaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant