Chapitre 26

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J'étais heureuse de ne pas m'être trompée et de trouver de nombreux hommes tout au long des tours de guet. Quand ils m'aperçurent, ils se redressèrent et me saluèrent avec tout le respect qui m'était dû. Je les voyais surpris, je ne doutais pas qu'il soit inhabituel que leur souverain vienne ici.

- Imran, votre majesté, Maître des arbalétriers, pour vous servir, se présenta l'un d'entre eux.

Il était sacrément jeune pour être maître de quoi que ce soit, pensai-je.

- Le maître de l'artillerie est avec vous ? le questionnai-je. J'aimerais lui parler également.

Au lieu de me répondre, il siffla. Un mercenaire se plaça aussitôt derrière lui. Imran exigea la présence de Gorkheim, sans même prendre la peine de se retourner pour s'adresser directement à son homme. Ce dernier s'exécuta d'office.

- Il le sera sous peu, votre majesté.

On ne pouvait pas lui enlever son efficacité. J'eus envie de le remercier, mais Misha me répétait sans cesse que je n'avais pas à le faire, que toutes mes demandes étaient des ordres et que les autres n'avaient pas d'autres choix que d'accepter mes requêtes.

J'essayai donc d'y mettre du mien et de revêtir mon rôle de reine pour me concentrer sur ma mission. Je n'avais pas beaucoup de temps. Misha me chercherait vite et les astréiens se rendraient rapidement compte du retour de leurs pouvoirs. Ils ne devraient toutefois pas se douter de ma présence ici, enfin je l'espérais. De toute façon, je comptais remettre la pierre au plus vite. Je me souvenais de la dernière fois, je serais prudente, je n'utiliserai pas beaucoup de magie.

Je posai ma main sur Imran pour lui faire signe de me laisser passer. Aussitôt, les images de sa vie défilèrent devant mes yeux et je m'en imprégnai sans rien montrer.

Je compris qu'il n'exerçait ce poste que depuis quelques jours. C'était Yaël qui lui avait confié et il avait eu raison. Il était doué et il lui serait toujours reconnaissant. Il nous serait fidèle et je fus heureuse de constater qu'il servirait les Weysar encore longtemps. Théo n'était pas un Weysar, j'allais donc parvenir à mes fins et retrouver Isaïah. Cette vision me réchauffa le cœur.

Je passai en revue les hommes, prenant soin de toucher chacun d'eux. J'avançais sur le rempart qui m'offrait une vue imprenable sur les montagnes. Au Nord, il n'y avait plus qu'un village avant d'atteindre la mer, dernier rempart au troisième continent. J'essayai de fixer l'horizon, sans regarder en bas pour ne pas être prise de vertige. Je ne m'étais pas trompée la première fois que j'étais venu au Mont d'Or. De ce côté-ci s'imposait un vide abyssal et je ne voulais nullement me perdre dans son immensité. Les souvenirs de mon saut avec Yaël me suffisaient largement.

Au bout de l'allée, je me retournai vers Imran qui observait mon manège silencieusement. J'avais sondé tous ses hommes. J'y avais vu des personnes qui doutaient, mais aucun traître.

Le mercenaire qu'il avait envoyé revint alors et nous rejoignit quelque peu essoufflé. Il était seul, ce qui fit grimacer Imran.

- Maître Gorkheim refuse de se présenter, confirma-t-il à son chef. Il dit qu'il n'a pas d'ordre à recevoir de vous.

- Mais il en a de sa reine, répliquai-je.

- J'ai précisé votre présence, répondit le mercenaire, gêné de n'avoir pu le convaincre.

- Conduis-moi à lui, ordonnai-je en posant ma main sur son bras.

Il s'exécuta aussitôt, sous le regard approbateur d'Imran. Il me fit passer par un escalier étroit et descendre dans une partie du Palais qui m'était encore inconnue, proche de la tour Ouest. Plus on avançait, plus on entendait des voix d'hommes qui s'élevaient.

La Grand'Astrée. La légende d'Izi et de Yaël - Tome IIIOù les histoires vivent. Découvrez maintenant