Chapitre 43

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Yaël

Pour la première fois, je me sentais désemparé. Et l'inaction ne m'avait jamais réussi. Je ne pouvais pas rester là sans rien faire. D'autant que ma patience était mise à rude épreuve.

- Pourquoi tu ne rentres pas Kamilla ? tranchai-je.

- C'est toi qui m'as fait venir !

- Tu peux rendre leurs pouvoirs aux astréiens. Tu sais bien que j'ai fait le ménage, même David n'est plus là pour nous tromper.

J'avais en effet éliminé tous les traîtres. Cela n'avait pas plu à tout le monde. Les décisions difficiles n'étaient jamais approuvées par tous. Mais à la Grand'Astrée les rancœurs sont éternelles. Le meurtre d'un astréien ne pouvait rester impuni. Ceux qui nous avaient trahis devaient payer de leur vie. C'était le seul moyen d'éviter l'enchaînement sans cesse des vengeances privées. C'était extrême, oui, mais ça n'en faisait pas une mauvaise décision et cela avait sans doute même réduit le nombre de morts. Le Conseil était partagé, mais aucun ne s'était opposé clairement.

Je ne savais pas pourquoi Kamilla avait choisi de rester dans le bois millénaire. Elle détestait cet endroit. Elle haïssait ses habitants. Elle ne s'en cachait pas et elle commençait à rendre mon quotidien infernal, car Kamilla avait un sacré caractère et elle avait élu domicile chez moi !

- Je suis là pour Izi, je partirai quand elle sera revenue, répliqua Kamilla.

- Je n'ai aucune idée d'où elle est, cela peut prendre des semaines avant que je la retrouve !

Je dis ces mots avec difficulté. J'espérais que cela ne prenne pas autant de temps et j'avais peur à la fois que cela en prenne bien plus. La retrouvais-je seulement un jour ?

- J'attendrai ! affirma Kamilla.

- Pourquoi !?

- Izi aura besoin de moi.

- Tu ne cesses de dire ça, mais tu refuses toujours de me dire en quoi ! Qu'est-ce que tu ne me dis pas, Kamilla ?

- Ça ne sert à rien de crier ! Crier ! Crier ! Voilà, moi aussi je peux le faire ! Je n'ai pas de réponse à te fournir, je ne suis pas celle qui reçoit les visions ! Je sais ce que je sais. Et je sais qu'Izi aura besoin de moi, c'est tout !

- Tu crois que je ne me doute de rien ? la questionnai-je. Tu crois que c'est mieux de me laisser dans l'ignorance ? J'ai vu comment évoluait le pouvoir d'Izi, je ne suis pas stupide. Est-ce que tu vas te décider à me dire ce qui est arrivé à Yöri ?

- Tu sais ce qui est arrivé à Yöri, tu n'es pas stupide, tu te souviens ?

Bien sûr je le savais. J'en savais d'ailleurs plus que la plupart des gens à ce sujet. Mais je voulais l'entendre de sa bouche parce que je n'arrivais toujours pas à l'admettre. Si Yorï était considéré par tous comme fou, ce n'était pas pour rien et la violence des visions d'Izi m'inquiétait.

Son pouvoir s'était décuplé et j'en étais le responsable. C'était moi qui avais eu l'idée d'utiliser Éric. Je ne pensais pas qu'il n'y aurait plus de retour en arrière. Je croyais que les effets s'estomperaient, qu'il ne lui donnerait que l'impulsion nécessaire pour ouvrir les portes de l'esprit de Kallie. Mais non, son don était particulier, il évoluait bien trop vite et je voyais bien qu'Izi n'avait pas le temps d'en prendre pleinement possession. Son pouvoir lui échappait.

Est-ce la folie qui la guettait si elle ne parvenait pas à contrôler son pouvoir ? Pouvait-elle seulement le contrôler ? Yorï avait certes vécu des siècles, mais il avait sombré dans la folie. Était-ce inévitable ? Que prévoyait Kamilla pour aider Izi ? Elle privait les gens de pouvoir en sa compagnie, mais elle n'avait pas besoin de rester, elle pouvait très bien enfermer son pouvoir dans les pierres pour soulager Izi de ses visions. Que me cachait-elle ?

La Grand'Astrée. La légende d'Izi et de Yaël - Tome IIIOù les histoires vivent. Découvrez maintenant