Chapitre 20

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Ce procès prenait fin. Je me levai et restai un instant devant le trône, le temps que les membres de l'assistance ploient tous un genou à terre, comme il en était de coutume. Harold attendit quelques secondes avant de se lever à son tour. Il fut suivi des autres conseillers et tous ensemble nous sortîmes de la grande salle.

Officiellement, j'étais la régente du royaume, le temps que mon fils soit en âge de gouverner ; cela signifiait que je devais prendre toutes les décisions importantes avec mon Conseil. Officieusement, il n'y avait aucun débat et tous connaissaient déjà la sentence que j'avais choisie pour Storm. À la place d'une quelconque délibération, Harold me présenta aux deux nouveaux conseillers qu'il avait choisis. L'un était un religieux qui priait les anciens Dieux, cela avait paru nécessaire au Grand pontife puisque le dernier avait été emprisonné. L'autre était un de ses proches amis, il me certifia qu'il avait toute sa confiance et que s'il avait encore à apprendre des us et coutumes du Palais, il connaissait le peuple et serait au plus proche des réalités du terrain. J'approuvai ces deux choix.

Nous prîmes également le temps d'évoquer le plan d'action que nous avions conçu la veille avec Misha pour remettre la royauté sur une voie plus honorable. Harold approuva et nous expliqua tous les rouages du Palais avec soin. Les religieux nous guidèrent aussi afin de veiller aux respects des bonnes mœurs. Lors de la discussion, Luka me surprit par sa connaissance pointue de l'histoire du royaume de Hululy et sur ce qui avait déjà été tenté ou non. Très rapidement, nous traçâmes ensemble les grandes directions de ce nouveau règne. Cette réunion fut très riche et c'est seulement après plusieurs heures que nous rejoignîmes la salle du trône. Il était temps de mettre un terme définitif à l'ancien règne, il était temps de mettre fin à la vie de l'ancien prince.

Tous s'étaient de nouveau réunis dans la salle du trône, impatients sans doute d'entendre mon verdict. Il est toujours surprenant de constater à quel point le malheur des uns peut faire le bonheur des autres. Pourtant, de mon côté, aussi déterminée que j'étais de voir périr Storm, je ne pouvais nier un certain malaise. Une boule s'était logée au creux de ma poitrine bien malgré moi et je sentais ma gorge se serrer et s'assécher face au discours que j'allais devoir prononcer.

Je devais toutefois faire outre. C'était mon devoir désormais. On doit tous, tôt ou tard, assumer nos responsabilités et affronter les conséquences de nos actes. J'avais voulu cette guerre. Je ne pouvais pas fuir aujourd'hui.

Storm fut traîné au milieu de la pièce pour qu'il soit à la vue de tous. On lui fit mettre un genou à terre et recourber la tête devant moi. Je ne pris pas la peine de m'asseoir, je ne comptais pas m'appesantir, et d'ailleurs mes conseillers en firent de même.

- Storm de la famille Weysar, débutai-je.

Mon oncle. J'allais condamner à mort un membre de famille. Mon cœur battait si vite dans ma poitrine...

- Vous êtes déclaré et convaincu coupable d'atrocité envers votre peuple, d'avoir œuvré contre les intérêts du royaume pour servir vos intérêts propres, d'avoir ordonné l'empoisonnement de Hector et Clothilde de Valdéria, et vous êtes véhémentement soupçonné du fratricide de Henry et de Jonas Weysar, qui est de surcroît un crime de lèse-majesté. Par conséquent, la cour vous condamne à être conduit par l'exécuteur de la haute justice à faire amende honorable où vous demanderez en place publique pardon au peuple, aux anciens et aux nouveaux dieux ainsi qu'au Prince Isaïah. Vous serez ensuite exécuté. Par égard à votre rang et malgré l'atrocité de vos crimes, la mort vous sera donnée par décapitation.

La foule fut surprise. Harold m'avait prévenu, mais je continuai mon laïus.

- L'exécution aura lieu demain à midi sur la place du marché, proclamai-je. Prévenez les crieurs publics, qu'ils annoncent tous que l'Infâme a été condamné à la peine capitale, ajoutai-je à l'intention du greffier.

Je n'attendis pas une seconde de plus, je ne cherchais pas à lire l'expression des nobles et encore moins à croiser le regard de Storm. Je rejoignis rapidement la pièce attenante à la salle du trône pour tenter de fuir l'oppression que je ressentais. Mais à mon grand malheur, celle-ci me poursuivit où que j'aille. C'était une chose de tuer un homme dans l'action du combat, en ayant la sensation qu'il n'y avait d'autres choix, que c'était lui ou nous. Cela en était une autre de condamner froidement un homme enchaîné à mort.

Malgré toute la haine que je portais à Storm, je sentais mon cœur battre plus intensément et mon estomac se contracter. Je tentai de cacher tous ces sentiments qui affluaient bien malgré moi. J'avais appris à agir ainsi dès mon plus jeune âge et Yaël avait parfait mes dernières lacunes, mais au fond de moi, le néant régnait.

Je me sentais perdue, plus seule que jamais. Et je ne pouvais qu'espérer, de toute mes forces, que Yaël s'en sortait mieux que moi et que nous retrouverions très rapidement notre vie, avec Isaïah.

***

Hello à tous ! Un petit message pour vous dire que nous en sommes aux tiers de l'histoire. J'ai hâte de vous faire découvrir la fin de cette saga et en même temps je n'ai pas envie de quitter mes personnages ! J'espère en tout cas que l'histoire vous plait toujours. N'hésitez pas à me donner votre avis.

Prochain chapitre dans la tête de Yaël...

La Grand'Astrée. La légende d'Izi et de Yaël - Tome IIIOù les histoires vivent. Découvrez maintenant