Les bourrasques se faisaient de plus en plus rageux. Le temps se déchaînait. La nature elle, était dans un chaos sans nom. Les gouttes de pluies martelaient la vitre dans une musique frénétique parfois troublée par le vent qui faisait des siens.
Je collai mon front à la glace, observant ce spectacle sans ciller, menton enfoncé sur le bras. Je voulais m'enticher de tous les instants, tout voir. C'était hypnotisant. J'étais totalement happée par ce que je voyais.
La balançoire au loin dans le petit jardin de notre HLM subissait les affres de la tempête. Elle dansait dans les airs, les fils la soutenant se tordaient, s'enroulaient. Les minuscules toboggans semblaient s'effriter à tout moment en un amas de plastique.
Tout se mélangeait dans un carambolage désastreux.
Au grand bonheur de mon âme.
Le tonnerre rugissait, les éclairs aveuglaient mes iris mais aspiraient mon mal être. La pression accumulée se libérait de mon corps. J'avais enfin accès au bouton « off » de mon cerveau.
Pas de calculs.
Pas souvenirs.
Que règne la plénitude.
Je me sentais bien, aussi légère qu'une plume et vidée de toute angoisse. J'avais tant guetté ce moment. Celui où je serais libre de tous mes tourments, où les ténèbres auront la queue entre les pattes, intimidés par ceux beaucoup plus rageux qui habitaient le ciel à cet instant.
Ils feront moins la grande gueule après.
Soulagée, avant même la fin de la tornade, je sentis mes muscles lâcher, mon corps me paraissait comme une poupée de chiffon. Et, ainsi dépouillée de tout, vidée, je planais dans un monde cotonneux où mon ouïe était ravagée. Il ne restait plus qu'une sensation de paisibilité qui m'enveloppa à mon grand bonheur.
Pour couronner le tout, je me dirigeai vers le tiroir de ma table de chevet puis en sortis une plaquette argentée. Je ne donnai pas de temps à l'hésitation, fissurant le métal fin afin de récupérer des cachets. Dans des gestes affreusement lents, j'avalai les comprimés.
L'effet des anxiolytiques s'ajoutant au pouvoir libérateur du déluge, je tanguai un peu en me dirigeant vers mon lit. Je m'endormis presque instantanément, pelotonnée sous ma couette.
Je me retrouvais dans cet entre-deux, celui entre l'inconscience et le soulagement, qui m'avait tant manqué. Je pouvais enfin dormir paisiblement, sans cauchemars, ni rêve.
J'étais vidée de toute angoisse.
Alors pourquoi son image s'entêtait à s'infiltrer dans mon paradis blanc ?
~~~~~
ƔƔƔ
~~~
Le lendemain, je commençai la semaine avec enclin, ce qui n'était point étonnant. Je dus cependant subir le haussement de sourcil de mon frère quand je le croisai en passant devant sa chambre et la mine suspicieuse mais contente de maman qui m'avait dit, alors que j'étais devant mon bol de céréales :- Tu es assez énergique ce matin, chérie !
- Je me sens bien, avais-je vaguement répondu.
Elle acquiesça en souriant alors qu'elle tartinait son pain. Elle se doutait que j'avais pris des cachets alors, au lieu de garder le silence, je me résolvai à avouer :
- J'ai pris quelques anxiolytiques. Juste deux comprimés, précisai-je.
- Je me disais bien... souffla-t-elle, mais ça va, hein ?
VOUS LISEZ
Inattendus
Teen FictionVide. Une fille vide, voilà ce que révèle son miroir lorsqu'elle s'affronte à son reflet. À 22 ans, Léna est différente. Elle est renfermée dans sa bulle depuis cet événement qui la marquera sûrement à vie. Chaque chose, dans sa vie, avait une place...