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- Salut ! Je suis desolée d'avoir pris du retard, vous allez bien tous les deux ?

Aline s'installa sur la pelouse tout comme nous, nous coupant dans notre débat sur les différents goûts de glaces. Ma mâchoire faillit se décrocher. Les yeux d'Aline passèrent ensuite successivement de Jonathan à moi, un sourire quasi innocent aux lèvres.

Ce dernier me fit un haussement de sourcil inquisiteur mais je ne lui rendis qu'un regard penaud avant de fusiller la diola des yeux. Elle avait le don de me mettre dans l'embarras. J'aurais dû la prendre au sérieux quand elle m'avait dit qu'elle viendrait. Ses idées avaient toujours été folles et elle n'hésitait jamais à les exécuter.

Mais, qui se pointerait à un rendez-vous sans être invité, sérieux ?

Cependant, après avoir pianoté sur son téléphone durant quelques secondes, le mécano lui fit la conversation ; ils échangèrent avec fluidité comme des connaissances s'entendant particulièrement bien, alors que je me muais dans le silence, observant l'espace de jeu quasi vide. L'école avait ouvert ses portes depuis un moment, les enfants avaient alors moins de temps pour se divertir maintenant.

Cette ambiance m'avait fait bizarre aux premiers jours mais je me surprenais à aimer tout autant cette latence parfois troublée par nos éclats de rire ou nos protestations.

- Euh, vous êtes supposés acheter des glaces là, je me trompe ? lâcha Aline avec un grand sourire.

Je relevai vivement la tête vers elle, croisant son expression encline. À cet instant, j'avais envie de l'écarteler.

Pourquoi lui avais-je confié notre routine, à Jonathan et moi ? me demandai-je en me tapant mentalement le front.

- Je vois que tu ne lui as pas épargné les détails...

Jonathan me lança un sourire en coin taquin que je fis mine de ne pas voir. À ce moment là, l'énergumène apparut dans mon champ de vision. Je sentis mon amie se tendre imperceptiblement quand elle le vit, elle imprégna pourtant une expression froide sur son visage. Il nous salua avec son enthousiasme habituel, échangeant une accolade virile avec son ami ; mais son visage était d'un sérieux étonnant.

Je voulus demander pourquoi il était là mais ce fut la diola qui posa la question avec un regard dur, un brin sauvage :

- Qu'est-ce tu fais là ?

- C'est moi qui lui ai fait signe, répondit platement Jonathan alors que mon amie s'insurgeait dans une exclamation à peine étouffée. Je pense que vous devez discuter tous le deux.

Je rencontrai les obsidiennes du mécano. Il était sûr de lui et, en hochant la tête, comprenant sans mal ses intentions, je me levai de ma position assise alors qu'il faisait de même.

- T'es sur le coup, toi aussi ? s'enquit Aline à mon attention.

Je soupirai :

- Non, c'était pas prévu mais... je suis d'accord avec Jonathan, il faut que vous vous parlez. Alors... on va vous laisser, d'accord ?

Je n'attendis pas de réponse, intimant Jonathan à me suivre. La jeune femme rit jaune, et dans ses yeux je sus qu'elle n'était pas du tout contente que je l'abandonne, j'allais surtout en morfler plus tard. Pourtant, elle finit par faire face à l'énergumène qui maintenait son regard sérieux.

- Balance ton sac que je m'en aille, entendis-je mon amie dire.

- Pourquoi t'es sur la défensive comme ça, hein ? rétorqua Nicolas en soufflant. C'est moi qui devrais...

Je n'entendis plus rien après, j'étais déjà loin et je ne pouvais voir que les gesticulations de la jeune femme alors que l'irritation prenait naissance sur les traits de l'énergumène.

InattendusOù les histoires vivent. Découvrez maintenant