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Il avança doucement, lentement, dangereusement et fut bientôt près de moi. L'expression de son visage était plus apeurante de si près et je déglutis difficilement. Son souffle était saccadé et son haleine pestiférait l'alcool.

Je restais figée. Je ne parvenais pas à réagir, à bouger ne serait-ce que d'un millimètre alors que lui tremblait comme une feuille.

Oui, il tremblait.

Il tremblait d'une force inconnue qui semblait bouillir en lui, il se battait contre quelque chose que j'étais incapable de voir mais que je sentais pourtant de là où j'étais.

Le temps me parut figé avant que, violemment, il ne se penche pour capturer mes lippes.

Ce fut violent, tétanisant.

Ses mains traversaient mon corps entier dans des gestes désordonnés mais j'étais toujours incapable de faire quoi que ce soit. Mes membres étaient inertes et mon cerveau
s'obstinait à se terrer dans un coin mort de ma tête.

Et, brusquement, il se débloqua.

Tout revint.

Mes souvenirs, cette scène, ce jour là.

Je me rappelai de ces mains qui me touchaient partout de la même manière, cette bouche qui se baladait sur mon visage, cette haleine nauséabonde.

Je ressentais ce même dégoût. Et surtout l'horreur. J'étais horrifiée.

Non, pitié, cela ne pouvait pas se répéter...

Enfin, mon corps réagit. Avec une force qui m'était insoupçonnée, je le repoussai avant de lui asséner une gifle monumentale.

Je me rendis seulement compte à cet instant que j'étais moi aussi secouée de tremblements, ma respiration était irrégulière et la peur coulait dans mes veines. Mais je tentai de garder un semblant de courage, une flamme infime qui me donna la force de m'encrier :

-ARRÊTE, IDY !

Mais j'avais l'impression que
celui qui se tenait devant moi n'était plus mon camarade de promo, celui si souriant que j'avais connu. Non, c'était un fou, un possédé. Et mon cri qui visait à l'intimider un tant soit peu eut l'effet inverse. La lueur confuse dans ses yeux devint rapidement une lueur de rage. Il s'avança vers moi et me planta son poing à la figure. Surprise et sonnée, je chancelai et je sentis ma peau contacter le carreau glacial des sanitaires.

- Non ! Toi arrêtes ! s'époumonna-t-il.

Il releva mon visage alors que je demeurai les yeux obstinément tournés vers le sol.

Non, je ne voulais pas voir ça.

Je ne voulais pas revivre ça.

Que quelqu'un me vienne en aide, mon Dieu...

Mais il me semblait que personne ne viendrait me sauver. Ce serait exactement comme ce jour-là. Et en réalisant cela, une larme coula.

Quand Idy la vit, son expression empira. Il empoigna mes cheveux et cria encore, bien plus fort :

- Arrêtes de pleurer ! Tu n'as
pas le droit ! Arrêtes de m'ignorer, de faire comme si tu ne savais pas pour mes sentiments, arrêtes ! Tu le fais exprès, hein ? Tu fais semblant de ne pas le voir alors que je fais tout pour exister à tes yeux ! Pourquoi ? Pourquoi tu me mets à l'écart, hors de ton nouveau cercle d'amis, alors que c'est moi qui t'ai aidé lors de ta première rentrée ?!

Puis d'une voix doucereuse qui jurait avec la façon dont il agrippait ma mâchoire, il lâcha :

- Tu sais, je t'ai aimé dès le premier regard. Ton regard si intriguant, tes traits si doux... Tu avais l'air si innocente, si fragile que j'ai tout de suite eu envie de te protéger, d'être le meilleur pour toi, ton ange gardien.

InattendusOù les histoires vivent. Découvrez maintenant