chapitre 34

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| 1er décembre 2005

— T'es passée sous un train ?

— Hilarant, maintenant tu peux me suivre ?

Sans prêter attention aux regards curieux des délinquantes qui habitaient les lieux ni lui laisser le temps de comprendre la situation, Noa tourna vite les talons en direction de la sortie. Mei ne put que la suivre malgré sa confusion quant à cette demande urgente additionnée à l'absence d'Asuga et l'état de sa petite protégée, échangeant seulement un regard entendu avec Toshiko qui veillerait sur les filles pour le reste de la soirée. Un joint coincé entre les lèvres, elle enfila une veste au-dessus de son haut à col roulé et prit le même chemin que sa rivale défigurée en pressant le pas pour la rattraper. Elle voulut la questionner dès qu'elle arriva à son niveau à l'extérieur, mais se rétracta en remarquant qu'elles n'étaient pas seules et qu'un jeune homme facilement reconnaissable se trouvait juste là. Les mèches bleues perdues dans le blond de ses cheveux ressortaient à la perfection sous les néons nocturnes de Kabukichō.

De plus en plus paumée, la grande brune détailla un instant Rindo avant de poser son regard perplexe sur Noa.

— Qu'est-ce que tu fous avec un Haitani ?

— Les détails te regardent pas, répondit fermement la plus jeune. Mais on a besoin d'une troisième personne pour aller chercher la moto d'Asuga. Je suis la seule à savoir où elle est mais je sais conduire ni une voiture ni une moto donc tu es l'élue.

— Je vais conduire la moto d'Asuga ? releva Mei avec intérêt.

— Rêve pas trop, intervint Rindo. C'est moi qui la prends au retour. J'fais déjà l'effort de prendre la voiture avec vous deux à l'aller, faut pas abuser.

Déçue, elle se réconforta en allant s'installer à la place passager avant Noa lorsqu'il fut temps de partir. La blessée se glissa sur la banquette arrière sans un mot bien que très agacée par cette manie qu'elle avait de toujours la provoquer, ce qui ne manqua pas d'amuser leur accompagnateur. Alors qu'il démarrait le véhicule sous les indications de Noa qui put lui dire quel chemin emprunter, Mei ouvrit sa fenêtre pour fumer et, par la même occasion, la dévisager dans le rétroviseur. La petite avait l'air épuisée, comme si elle avait parcouru un continent entier avant de se retrouver assise dans cette voiture. Sa frange encore humide de l'averse qu'elle s'était prise sur la tête lui collait maladroitement au front et des traces du sang qui avait dégouliné sur son visage étaient encore visibles jusqu'à son œil.

Pourtant, Noa était loin de menacer de s'évanouir ou de fondre en larmes, ce que Mei aurait plutôt attendu de sa part. Elle était différente de la jeune fille qu'elle avait été encore la veille mais elle n'aurait pas su dire sur quel point avec précision.

— Sérieusement, tu te pointes la gueule arrachée et tu racontes même pas ? finit-elle par lancer.

— Je me suis pris un couteau, répondit Noa. C'est tout.

— Toujours aussi ennuyante en tout cas, marmonna Mei.

Ce qui était moins ennuyant, cependant, était la présence du cadet Haitani. Du moins, savoir qu'il était impliqué dans cette histoire mystérieuse l'intriguait - pour le reste, il n'était pas bien plus amusant que Noa, juste un peu plus plaisant à regarder.

— Ton frère était pas disponible pour le trajet ? tenta-t-elle, certaine que cette intervention ferait au moins réagir la lèche-bottes de la banquette arrière.

Dans le rétroviseur intérieur, Rindo vit Noa secouer la tête d'un air désabusé. Sans quitter la route des yeux, il laissa alors un sourire en coin étirer ses lèvres.

𝗕𝗘𝗗 𝗢𝗙 𝗥𝗢𝗦𝗘𝗦 ; tokyo revengersOù les histoires vivent. Découvrez maintenant