𝗕𝗘𝗗 𝗢𝗙 𝗥𝗢𝗦𝗘𝗦 ; tokyo revengers

chapitre 14

| 10 août 2005

☆

— Tu rêvasses, la Tornade.

Daitan ne chercha pas à contredire son ami. Le regard tourné vers la fenêtre de la chambre d'hôpital, elle ne pouvait penser qu'au délinquant posté sur le toit depuis un moment déjà. Drôle d'endroit pour une sieste, il fallait l'avouer, mais Daitan était habituée à ses bizarreries. Aux côtés du lit de Draken, Takemichi avait laissé l'uniforme que Mikey lui avait offert afin d'aller rejoindre ce dernier là-haut. Elle avait beau ne pas saisir ce qui avait poussé Mikey à s'attacher si vite à Takemichi, elle comprenait la décision de lui avoir confié la relique qu'était l'uniforme dans lequel il avait commencé à diriger le Tokyo Manjikai.

— Partage au moins tes pensées, râla Draken. T'as l'air bizarre depuis une semaine.

L'adolescente voulait bien croire que connaître son propre futur catastrophique l'avait rendue étrange. Elle agissait comme si toutes ces horreurs s'étaient déjà déroulées - en avait du moins le moral correspondant. Comment était-elle censée tous les regarder en sachant qu'elle les perdrait ? Qu'ils l'abandonneraient, un jour ou l'autre ?

— Je me pose juste des questions, avoua Daitan avec un sérieux qui déconcerta son interlocuteur. À propos de l'avenir du Toman. Tu l'imagines comment, toi ?

— C'est quoi cette question ?

Draken ne pouvait pas répondre parce qu'au fond, il savait que tout pouvait virer au cauchemar en l'espace d'un affrontement. Il croyait en la suprématie du Toman tant que les fondateurs étaient soudés, que Mikey n'était pas seul. Sa plus grande crainte demeurait celle que Mikey se perde, que le Toman devienne un gang des plus basiques tourné vers le pouvoir et l'argent.

— Tu comprends ce qu'il serait arrivé si tu t'en étais pas sorti, pas vrai ? reprit-elle. S'il arrive quelque chose à l'un d'entre nous... On connaît Mikey. Et je crois que je pourrais pas supporter de voir le Toman devenir pile ce qu'on méprise, de le voir, lui, devenir un leader sans cœur. Mais on sait que ça peut facilement arriver, je me trompe ?

— Oui, tu te trompes.

Surprise, Daitan détourna enfin le regard de la fenêtre pour dévisager son ami.

— Évidemment que c'est une possibilité, mais Mikey aura toujours un cœur quoiqu'on en dise. Si j'étais mort, c'est toi qui l'aurais empêché de vriller, non ?

— J'en sais rien.

— Qu'est-ce que tu racontes ? se renfrogna Draken, définitivement vexé par son moral bancal. T'es aveugle ou quoi ?

Daitan regretta d'avoir lancé ce sujet de conversation. Elle voulait lui expliquer, lui dire qu'elle s'était toujours crue capable de garder Mikey sur le droit chemin, parce que c'était le cas. Jusqu'à la révélation de Takemichi, elle n'aurait jamais remis en question le lien qui les unissait naturellement. Ils étaient bien trop complémentaires pour être séparés un jour. Et pourtant, sa propre version du futur lui avait fait passer le message : prendre Mikey pour acquis avait été une erreur.

— Qu'est-ce qui te fait croire que je pourrais vraiment l'aider ? demanda-t-elle presque timidement, les sourcils froncés dans une expression confuse face à la pensée qu'elle ne pourrait pas l'aider.

— Me demande pas de décrire le truc qui vous lie, je l'ai jamais compris. Tout ce que je sais, c'est qu'il pourrait jamais tirer un trait dessus, peu importe à quel point la situation est critique. Évidemment que tu pourrais l'aider, t'es sérieuse d'en douter comme ça ?

Elle dut se faire violence pour ne pas avoir l'air plus tiraillée. Plus que jamais, Daitan se sentit désolée pour Takemichi qui se trouvait dans cette situation depuis déjà des semaines. Tenter de changer les choses sans pouvoir révéler aux concernés les conséquences de leurs actes futurs était une tâche si laborieuse qu'elle doutait d'en être capable. Jusqu'à ce jour, elle n'aurait jamais cru être de ceux qui prennent la fuite. Pourtant, c'était ce qu'elle ferait dans le futur et ce que son instinct lui ordonnait de faire en ce moment même. C'était idiot. Noa et Mikey n'avaient sûrement même pas encore été effleurés par l'idée de l'abandonner mais elle ressentait déjà toute la solitude que leur départ provoquerait.