𝗕𝗘𝗗 𝗢𝗙 𝗥𝗢𝗦𝗘𝗦 ; tokyo revengers

chapitre 39

| 10 janvier 2006

☆

— Tu pouvais pas trouver une meuf ponctuelle ?

— Venant de quelqu'un qui trouve pas de meuf tout court, je trouve ça culotté.

Depuis le siège situé face à son interlocuteur, Mochi laissa échapper un ricanement amusé auquel Ran ne répondit que d'un demi-sourire arrogant. À la droite de ce dernier, Rindo soupira et se laissa mollement retomber contre le dossier du canapé, fatigué avant même le début de la réunion. Il peinait toujours à comprendre comment ils avaient pu en arriver là, à ne serait-ce qu'envisager l'idée de présenter Asuga au seul criminel qui avait un jour fait peur à Ran. Ce devait être une obligation, il refusait de croire son frère bête au point d'être capable de placer volontairement sa propre copine sur la trajectoire d'un type aussi dangereux et imbu de sa personne - encore moins avec le reste de la bande dans les parages.

Et pourtant, Rindo n'était pas certain de savoir ce qui le troublait le plus entre le calme dont son aîné faisait preuve dans une situation pareille et la présence de ce petit binoclard qui avait été membre du Toman encore deux semaines plus tôt. Pourquoi trônait-il autour de cette table au même titre que le reste de leur groupe habituel ? Étaient-ils tombés si bas pour en arriver à partager des contacts aussi douteux ?

Le jeune homme responsable de cette assemblée alors encore incomplète rejoignit sa place au moment précis où deux visages familiers apparurent à l'autre bout de la salle ; l'un encadré d'une chevelure rose devenue fameuse, l'autre décoré d'une longue cicatrice verticale encore rougeâtre. Les nouvelles arrivantes avaient bien l'air de ce qu'elles étaient, vêtues de leurs vestes d'uniforme brodées au nom du Shirohebi et loin de se fondre dans la masse même dans un endroit si peu réglementé. Il lui sembla pourtant que les jambes découvertes d'Asuga firent plus grande impression que le reste lorsque le premier sifflement fusa dans sa direction, évidemment initié par cet échec ambulant de Madarame. Alors que leurs amis impatients se mirent à rire et taper dans leurs mains avec enthousiasme dès qu'ils les remarquèrent, Rindo tourna un regard inquisiteur vers son frère.

— Pourquoi Noa est là aussi ?

— Pourquoi toi t'es là ? rétorqua Ran que l'agacement commençait déjà à gagner. C'est le bras droit d'Asuga, réfléchis.

Sceptique, il marmonna une vague réponse et se remit à scruter la concernée tandis qu'elle approchait. Placer Asuga autour de cette table relevait de la folie, il en était certain, mais Noa ? Il dut replacer ses lunettes sur son nez tant le constat le laissa perplexe. Elle n'avait jamais eu l'allure d'une personne capable de supporter l'ambiance d'une réunion de ce groupe d'imbéciles et d'ex-prisonniers. Du moins, ce fut ce que Rindo pensa jusqu'à ce qu'elle soit assez proche pour dévisager Kisaki ; là, il vit une fille différente de celle pour qui il avait dû nouer les lacets tandis qu'elle se vidait pratiquement de son sang en silence quelques semaines plus tôt.

Nonchalamment enfoncé dans le cuir mou du dossier du canapé, Rindo observa Noa et ses yeux que tout ton chaud avait quitté, puis Kisaki et le sourire satisfait qu'il esquissa lorsqu'il releva la tête vers elle. Si un regard avait pu tuer, cet enfoiré n'aurait même pas eu le temps de vider ses poumons de leur air une dernière fois avant de s'effondrer. Cet échange lourd de sens et pourtant si silencieux dut échapper au reste de la salle qui ne s'intéressait qu'à une paire de genoux féminins à l'air, mais Rindo, lui, en fut témoin et nota avec intérêt le changement d'attitude de la petite brune habituellement si sage. L'instant suivant, les yeux foncés de cette dernière se posèrent sur lui et, de surprise, il fronça les sourcils derrière ses lunettes rondes. Comme une enfant prise sur le fait, Noa détourna le regard en vitesse avant qu'il ne puisse y lire les idées malsaines que Kisaki lui inspirait. Rindo eut alors un nouveau regard pour lui, l'image de son petit numéro lors du Halloween Sanglant bien en tête, comme il se rappelait même dans quel état Noa s'était trouvée lorsqu'Asuga l'avait retenue de force en l'empêchant d'approcher le corps du gamin qui était mort ce jour-là ; puis il se résolut à se désintéresser d'eux pour porter son attention sur ce qu'il se disait autour de lui.