Chapitre 5

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Le roi Arthur se réveillait déjà dans la confusion lorsqu'il fut levé non pas par son écuyer mais par son frère adoptif.

" –Où est Gaheris ?

 –Malade, si tu le crois. -Kay ne le faisait visiblement pas au vu du ton de sa voix- "Ou c'est ce qu'il dit. Ce n'est pas comme si tu allais avoir besoin de lui aujourd'hui dans tous les cas.

–J'avais l'intention de jouter. Ou du moins il l'espérait. Malgré son statut, le roi ne refusait jamais une occasion de s'entraîner en s'amusant et de toute façon, il trouvait le terrain beaucoup plus divertissant que le siège dans lequel il était censé résider pour la journée.

–Eh bien ? Il est évident que je te donnerai la défaite que tu mérites. Mais les autres seront trop peureux de te blesser pour oser lever leurs lances. Tout ce que tu gagneras, c'est une victoire offerte sur un plateau d'argent.

–Je sais, Arthur soupira alors qu'il enfilait une tunique, ramenant une mèche blonde rebelle derrière son oreille.

-Ne tarde pas trop ou on va t'attendre. Kay parti avant que le roi ne puisse le réprimander verbalement une nouvelle fois, et tout ce qu'Arthur pu entendre fut l'éclat d'un rire sournois alors que la porte se fermait derrière son frère.

Lors de son voyage jusqu'aux écuries, il tomba nez à nez avec Gaheris qui essayait visiblement de se fondre dans les tapisseries en rasant les murs du château. Quand son regard rencontra celui du roi, il s'arrêta comme s'il eut vu un spectre.

–Mon oncle, mon seigneur... Il bafouillait rapidement, les yeux baissés et son visage était passé d'une pâleur cadavérique à une rougeur similaire à une tomate en un temps record. Il se balançait d'un pied sur l'autre, les mains liées dans son dos alors qu'il se pressait dans une révérence nerveuse.

–Ne devrais tu pas être dans ton lit, si tu es malade ?

–Si... bien sûr que si. Le jeune homme ne savait plus où se mettre, et Arthur s'en trouva quelque peu amusé.

–Gaheris.

–D'accord ! D'accord je l'avoue, je ne suis pas malade, je me porte mieux que jamais et j'ai donné cette excuse pour pouvoir jouter, votre Majesté ! J'implore votre pardon ! Il avait déblatéré ces mots avec une rapidité extrême et des mouvements de mains saccadés illustraient ses propos comme pour appuyer ses arguments et plaider pardon, les joues écarlates et le souffle court, il avisait son roi comme s'il était à quelques minutes d'être mené devant la potence.

Habituellement, le jeune prince prenait son poste d'écuyer très à coeur et manquer à ses fonctions ne lui ressemblait pas. Malgré son lien de parenté avec le roi, Gaheris avait montré une timidité plutôt infondée envers ce dernier depuis la prise de ses fonctions à Camelot, et Arthur savait que ses plus vieux frères et plus particulièrement Agravain se moqueraient probablement de lui en le voyant fondre comme neige au soleil sous le regard du souverain.

–Tu ferais mieux d'aller t'armer si tu comptes participer. Il lui offrit un sourire franc.

–Mais... et vous ?

–Kay m'aidera, ne te préoccupe pas de cela. Vas.
Il accompagna son dernier mot d'un mouvement fluide de la main et le jeune homme se volatilisa.

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C'était le grand jour pour Lancelot. Assit en tailleur sur le sol des écuries, il s'adonnait vigoureusement à frotter les braises encore tièdes de la cheminée contre son armure. Aloïs était venu l' apporter tôt et avait précisé que la provenance de l'équipement devait rester entre lui et le donneur. Lancelot avait hoché la tête sans écouter avant de se jeter sur son trésor.

Il avisait le gorgerin et les épaulières noircis avec fierté. Chaque pièce était soigneusement disposé sur le sol devant lui et ses yeux brillaient comme ils le faisaient à chaque fois qu'il se réveillait au bord du lac les matins de Beltane** où il se levait pour trouver les arbres en bourgeons, les bords du lac décorés de bouquets et de gerbes cueillis par sa mère avant l'aube comme le veut la tradition.

Aloïs était finalement venu l'aider pour s'armer de son équipement nouvellement teint. La seule chose qui restait lumineuse restait la cible. Son armure pesait lourd, plus lourd qu'il ne l'eût jamais imaginé. Ses mouvements étaient considérablement limités mais il avait été formé à ce type de contraintes depuis son plus jeune âge. Son bouclier de bois était fixé à son bras inoccupé, strié de blanc et de rouge en larges bandes diagonales.

Requiem AeternamOù les histoires vivent. Découvrez maintenant