Tôt le matin, Lancelot sortait des appartements du seigneur Galehaut. Il avait laissé le roi des Iles Lointaines encore endormi paisiblement, baignant dans la chaude lumière de l'aube. A peine le chevalier eut-il refermé la porte, et s'engageait dans les couloirs encore déserts, qu'il sentit une présence à ses côtés. On attrapa son bras, et c'est dans ce doux bruissement de soie que le Champion ne connaissait que trop bien, que sa reine émergea.
"–Lancelot ! S'exclama-t-elle, souriant si bien qu'elle pourrait remplacer le soleil levant derrière les meurtrières.
–Bonjour, ma reine. Il est fort tôt ! Lancelot rétorqua, acceptant avec complaisance les mains de sa belle sur le bras qu'il offrit aussitôt.
–Je te cherchais. D'où sors-tu ? Guenièvre ne sembla pas réellement attendre une réponse de sa part, continuant. Quoi qu'il en soit, viens avec moi. Emmènes moi. Je souhaite me balader.
–Vous balader ?
–Tout à fait.
–Le jour est trop jeune pour une balade. Le roi vous sait-il à mes côtés ? Répondit le chevalier, la voix basse.
–Arthur me sait ici. Ne t'en inquiètes pas. Le jour n'est jamais trop jeune pour une balade. Et arrête donc ces marques de politesse, il n'y à personne ici.
Ils marchaient côte à côte, chuchotant comme deux enfants éveillés tard dans la nuit.
–Ce n'est pas prudent, Guenièvre. On pourrait nous suspecter.
La reine s'arrêta, vint se tenir devant le Champion. Une de ses mains quitta son bras pour venir se poser sur sa joue, caressant sa pommette de son pouce. Sans réfléchir, Lancelot ferma les yeux.
–Personne ne nous suspecte et personne ne sait.
–Personne ne sait sauf Sire Galehaut. Il ouvrit les yeux.
–Et Sire Galehaut ne dira rien.
–Comment peux-tu en être si certaine ?
–J'en suis certaine. Répondit la reine, avec, aux lèvres, ce doux sourire empli de mystère que Lancelot adorait.
Embrassant la paume de la reine, il jeta un regard autour d'eux.
–Acceptes-tu ?
–Ai-je le choix ?
–J'ai déjà demandé à faire sceller nos montures.
Lancelot ouvrit la bouche pour protester, mais le sourire de Guenièvre fit mourir les mots dans sa gorge.
–Bien. S'étrangla-t-il, résigné. Cependant il ne pouvait s'empêcher de sourire malgré lui.
–Ah ! Guenièvre exclama avec joie, déposant un chaste baiser sur les lèvres du chevalier.
Ils s'arrêtèrent à l'orée d'un bois, alors que l'aube illuminait encore le ciel de ses couleurs rougeoyantes. Tandis que le chevalier guide leurs chevaux, la reine marche d'un pas assuré le long du cours d'eau qui sépare le bois de la clairière où ils ont fait halte. Lancelot la suivit, et quand ils arrivèrent en contrebas de la plaine, attacha leurs montures à un chêne.
A peine le jour levé que le soleil naissant faisait régner sa chaleur impérieuse. Lancelot, se bénissant mentalement de ne pas avoir endossé son armure, rejoignit sa reine au bord du cours d'eau. Guenièvre s'y était assise, penchée en avant alors que ses doigts plongés dans l'eau semblaient se mêler au courant. Le champion prit place à ses côtés, raffolant du doux sourire qui ornait les lèvres de sa belle. Ici, loin du château, du roi et de la cour, tous deux pouvaient s'adonner à leur amour avec complaisance.
Lancelot leva une main, qu'il vint enrouler dans le ruban qui retenait les cheveux de Guenièvre en une sorte de chignon négligé. Certainement la reine s'était enfuie dès son réveil, dans le secret le plus complet, pensa-t-il. Lentement, il vint tirer sur le ruban, qui se défit sous sa pression, relâchant ainsi les boucles blondes en une cascade sur ses épaules et son dos.–Que fais-tu ? Demanda-t-elle aussitôt, relevant la tête. Tu sais que je ne peux point porter mes cheveux lâchés.
–Ici, tu le peux. Ainsi, tu n'es plus mariée. Informa Lancelot, ses doigts dérivant pour effleurer la mâchoire de sa douce. Pour toute réponse, Guenièvre déposa un baiser au creux de sa paume. Le chevalier se laissa tomber en arrière, s'allongea dans l'humidité matinale des hautes herbes, les fleurs des champs et les bourgeons qui commençaient à éclore. Il ferma les yeux.
Lorsqu'il se réveilla, le ciel était encore décoré des lumières oranges et rouges de l'aube.–Ai-je dormi longtemps ? Il demanda, peinant à ouvrir les yeux.
–Très peu, mon amour.
Lancelot ne pu empêcher un sourire de naître sur ses lèvres. Il roula sur le côté. Quand il ouvrit les yeux, la reine était assise sur l'herbe, ses jambes étendues devant elle, les pans de sa robe négligemment échoués de part et d'autre. Dans ses mains, un entremêlement de petites fleurs blanches, que Lancelot ne parvenait à identifier mais sur lequel elle semblait fort concentré. Se redressant sur un coude, Lancelot vint glisser une main sur sa hanche.
–Que fais-tu ?
–Ah. Tu verras.
Haussant un sourcil le champion drapa son bras libre sur le ventre de Guenièvre, afin de la faire basculer en arrière. D'un mouvement, il la surplomba. Elle riait, maintenant dans les airs son précieux tissage floral.
–C'est une couronne de fleurs. Informa-t-elle dans un éclat de rire. En effet, le champion constata, entre ses doigts, demeurait un astucieux pêle-mêle circulaire de marguerites et de fleurs diverses.
Lorsque Lancelot se redressa, elle en profita pour déposer ladite couronne sur sa tête, ajustant quelques boucles brunes pour en sécuriser la position.
–Voilà. Tu es beau, à présent.
–Ne le suis-je pas sans couronne, alors ?
Lui ravissant ses derniers mots en un baiser, la reine sourit.
–Je t'aime. Chuchota-t-elle tout contre ses lèvres.
–Et moi donc.
–Repars-tu bientôt ? Guenièvre murmura, caressant la joue du chevalier.
–Certainement pas. Perceval est parti, je dois rester à Camelot afin d'assurer ta sécurité.
–Promets-le.
–Je ne peux rien promettre et tu le sais. Lancelot souffla.
Ils s'allongèrent tous deux. La tête reposée sur le torse du champion, la reine écoutait les battements de son cœur.
–D'où venais-tu, lorsque je t'ai trouvé ?
Ouvrant des yeux qu'il ne se souvenait pas avoir fermé, Lancelot mit un certain temps à répondre.
–J'errai simplement dans les couloirs, je me suis moi aussi levé tôt.
–Le sommeil te joue-t-il des tours ?
–J'en ai bien peur.
–Peut-être devrais-tu passer les nuits à mes côtés. Alors ton esprit serait apaisé.
–Je ne peux pas, mais tu sais que je le voudrais. Même si le roi et toi faites chambre à part... Tes servantes ne sont pas de confiance. Ou du moins pas pour moi. Nous ne pouvons prendre aucun risque.
A leur côté, leurs chevaux semblaient nerveux. Ils piétinaient, tirant en vain sur les liens qui les retenaient prisonniers. Lancelot se redressa, à l'affût du moindre bruit.
–J'entends des pas. Informa-t-il, à voix basse.
–Des pas ?
La reine se redressa à son tour, anxieuse.
–Des chevaux. Plusieurs. Ils se dirigent vers nous.
Sans un mot de plus, Lancelot se releva, entrainant Guenièvre avec lui. Les pas se rapprochaient, même elle pouvait les entendre à présent.
Lancelot se précipita vers leurs montures. Il dénoua les licoles des arbres, et enfourcha son étalon.–Presses toi, Guenièvre. Chevauches au nord, dans le bois, vers le château. Je partirai au sud. Il ne faut pas qu'ils ne nous voient. Sois prudente.
–Sois prudent, mon amour. Lança-t-elle, mais Lancelot était déjà loin.
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Requiem Aeternam
FantasyFix-it des légendes Arthuriennes :) Pas encore de titre / résumé fixe pour l'instant