Chapitre 12

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 Alors la bataille eut lieu. Passé au gué sans mal, toute l'armée d'Arthur, précédemment rejointe par les troupes de Malehaut, celles venant de Cornouailles et même d'Avalon, se prépara au combat.

Le roi Lot de Cornouailles s'était même déplacé à la tête de ses bataillons, et avait retrouvé ses trois fils les plus vieux au sein des rangs.

Au-dessus des escadrons, flottait la bannière au dragon rouge. Le roi Arthur, fidèle à l'Île d'Avalon, avait tenu promesse et autorisé la bannière de l'Île Sacrée planer aux côtés de celle du Pendragon

* * *

Le roi, dans la rage de la bataille -qui se fut bien plus ravageuse que la précédente- fut forcé de se joindre à ses rangs. Il s'était joint à Lancelot et Gauvain à la tête des bataillons et s'était battu avec dignité et hargne.

Pendant de longues heures, on ne savait pas qui dominait. Tantôt la maison d'Arthur prenait le pas, tantôt celle de Galehaut. Jamais on n'avait vu un tel déferlement de violence. Les rois conquis par le seigneur des Iles Lointaines avaient pris part au combat et plus important encore ; Galehaut lui-même combattait à présent. En tête de bataillon lui aussi, il semblait semer la terreur au sein des rangs du Pendragon.

Le roi Arthur demeurait en renfort dans les armées les plus faibles de sa maison. On savait Lancelot quelque part au devant aux côtés de Gauvain.

Le chevalier noir était sans doute le plus valeureux de tous ce jour là. A la tête de l'armée, Lancelot portrait fièrement les couleurs de l'Ile Sacrée. En l'honneur du Dragon Rouge et de sa terre mère, il brandissait fièrement ses épées jusqu'à les émousser, comme extensions de ses bras. Il avait abandonné le bouclier pour ses deux armes d'argent.

Le combat faisait encore rage malgré les nombreuses heures passées, malgré le coucher du soleil qui se profilait à l'horizon.

Mais d'un coup, devant Lancelot, les rangs s'écartaient, les lames arrêtaient de s'entrechoquer et on mettait les chevaux à l'arrêt.

Il ne savait pas ce qui, d'un coup, semblait terrifier les plus vaillants hommes de son armée, mais il était décidé à en savoir plus.
Alors il s'engage dans le semblant de haie d'honneur qui s'amorçait devant lui, au galop.

"–Allons ! Combattez ! Qu'est-ce qui vous effraie, seigneurs ?

Afin de ne pas se faire attaquer dans le dos, il posait pied à terre, saisissant le licole de sa monture pour la conduire à ses côtés afin de s'assurer l'immunité. Le chevalier noir continuait son chemin à la marche.

Plus il avançait, plus les regards se braquaient sur lui. Ceux de sa maison mais aussi ceux de la maison ennemie. Des regards interrogateurs plus qu'apeurés.

Et c'est là qu'il le vit. Il se dressait devant lui, un grand combattant sur une monture de jais. Dans la brume et la poussière de la mêlée, il s'avançait vers lui. Il le regardait lui.

Il était grand, très grand. Le heaume était tombé, il était d'une stature imposante, le visage balafré des entailles récentes de la guerre. Il ne pouvait le voir que très peu ; mais même derrière un rideau de sang, de sueur et de cheveux roux plaqués sur son front, l'inconnu ne gagnait toujours que plus de prestance.

Lancelot comprenait maintenant pourquoi on s'écartait à son arrivée, les yeux ronds de terreur sur son passage.

Dans sa contemplation, Lancelot ne remarquait pas que le seigneur s'avançait vers lui. Il était à dos de cheval et pas le chevalier, mais le fait qu'il ne puisse l'attaquer n'était qu'un maigre soulagement quand il le surplombait ainsi.

Requiem AeternamOù les histoires vivent. Découvrez maintenant