Chapitre 29

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 On réveilla le champion par des cris, de l'agitation en bas de sa chambre. Dans la cour, on s'agitait, on criait et on se dispersait grandement autour d'un homme en arme, qui brandissait une épée et balayait la lame de droite à gauche, comme épris d'une grande folie. Avec un coup d'œil de plus, il aperçut Méléagant.

Le soleil brillait haut dans le ciel, Lancelot se rendit compte avec horreur qu'il avait dormi jusqu'à midi passé, et que le prince devait être fou de rage de s'être fait humilié de la sorte, sans doute pensait-il qu'on lui avait menti quand à la présence de Lancelot, ou qu'on l'avait aidé à s'enfuir avec la reine.

Et la reine, où était-elle ? Enfermée au sous-sol, ou en haut d'une tour ? Il frissonna d'horreur. Sans plus attendre il s'arma, ignorant les douleurs qui encore le tiraillaient.ne prenant pas le temps de chercher son heaume. Il descendit, tête nue, les volées de marches avec une rapidité extraordinaire, le cœur battant à tout rompre. On essaya de l'arrêter sur son chemin, lui criant des choses qu'il n'entendit pas dans son empressement, sans doute essayait-on de le prévenir de la fureur de Sire Méléagant.

Lancelot déboula enfin dans la cour, en haut des marches du fort, il cherchait son adversaire des yeux. Et il était devant lui, s'étant arrêté dans son sillage dès qu'il aperçut le chevalier.

–Que vois-je ! Le chevalier de la charrette !

A la grande surprise de Lancelot, le prince sautillait presque au lieu de marcher, faisait tournoyer son épée de la main comme une jeune fille ferait tournoyer un bâton pour faire des acrobaties. Ses yeux étaient écarquillés, remplis de fureur et de folie, tant qu'on pensait qu'ils sortiraient de leurs orbites. Et le prince avait les yeux violets, d'un violet vif et effrayant qui ferait frémir n'importe quel homme. Mais pas Lancelot.

Le champion descendit les marches, à l'affût et lentement, afin de pouvoir anticiper et encaisser n'importe quelle attaque qui serait lancée par Méléagant. Il ne répondit pas à l'apostrophe, le visage dur.

–Alors j'avais raison ! Ha, ha ! Le grand roi Arthur ne viendrait pas ! Le lâche !

Lancelot fulminait, resserra sa prise sur le manche de son épée. Il était bien au courant que le prince cherchait à le provoquer, à l'enrager, mais il s'efforça de rester impassible. Finalement, Lancelot arriva devant Méléagant, au milieu de la foule qui le considérait avec horreur. On chuchotait autour de lui.

Puis, le prince se mit à sautiller de plus belle, tournait autour de Lancelot en balayant l'air de son épée. Le champion lui, tournait sur lui-même, suivant des yeux son adversaire, profondément confus et déstabilisé.

Soudainement, avec un son étranglé, Méléagant bondit sur lui, engageant un coup en hauteur, brandissant son épée dans les airs pour frapper Lancelot à la tête puisqu'il fut nu. Mais le champion, plus vif que son adversaire, fit une parade efficace et vint soutenir la pointe de son épée à l'aide de sa paume. De ce geste, il repoussa avec force son assaillant et soustrait son arme à celle du prince pour frapper d'un estoc.

Méléagant recula d'un bond, riant encore de ce rire aigu et strident. Il tournoya sur lui-même, balaya de sa lame ses alentours avec rapidité, si bien que Lancelot fut forcé de prendre ses distances. Et le combat ne fit que s'éterniser, car chacun possédait une force équivalente et qu'ils n'arrivaient à se départager.

Lancelot se battait avec véhémence, mais les plaies toujours bien présentes dans ses paumes, ses genoux et ses pieds lui rappelèrent bientôt son piètre état. Son adversaire lui, n'était pas en proie à de telles blessures et donc frappait toujours aussi bien et toujours aussi fort, sans jamais montrer de signe d'essoufflement. Et il frappait si fort que Lancelot fut forcé de reculer sous les coups du prince, forcé de reprendre sa respiration. Autour d'eux (car la foule s'était retranchée contre les murs du palais, apeurée), on chuchotait avec empressement, tous étaient persuadés que le brave chevalier finirait par tomber sous les assauts de la lame du prince Méléagant. Et surtout, on se demandait qui était ce malheureux combattant, assez fou pour s'opposer au prince de cette façon.

Requiem AeternamOù les histoires vivent. Découvrez maintenant