Black Bikers, Tome 3 : La lionne enragée

Chapitre 22

La chambre est plus grande que je me l'imaginais, elle est bien plus grande que la chambre que j'avais à l'hôtel. Bien que je n'aie aucune affaire qui prenne énormément de place, me retrouver dans un lieu aussi grand permet de me soulager, ça me rappelle davantage mon appartement à New-York. C'est à double tranchant, parce que j'ai la soudaine impression d'avoir déjà quitté Whitesboro, alors que la simple idée de rentrer chez moi me bloque la respiration.

Lorsque j'entends la porte claquer en bas, je sais que c'est Yann qui vient de partir et je lance aussitôt un regard en direction de mon sac qu'il m'a ramené. Toutes mes affaires sont là. Et lorsque je commence à les ranger dans le placard que Trevis m'a montré, je prends conscience que je suis véritablement en train de m'installer. Alors que j'ai laissé mes affaires dans mon sac durant mes jours à l'hôtel, il a suffi que je sois là depuis quelques minutes pour que je commence à ranger mes affaires dans la chambre. Ici, je me sens en confiance, et je me demande si c'est parce que cette chambre me rappelle mon chez-moi ou c'est simplement parce que...

Non, je ne veux pas penser comme ça.

Je m'immobilise, mes tee-shirts en main et grogne avant de les remettre dans mon sac pour le glisser à côté du bureau sur lequel je pose mon ordinateur et mes affaires pour écrire. Je m'assois aussitôt sur la chaise de bureau et fixe mon carnet de notes.

Depuis que les garçons sont partis à la poursuite de Jonathan, je suis restée avec Trevis et Yann, jusqu'à ce qu'il aille chercher mes affaires, laissant les prospects surveiller la maison. Toute cette sécurité m'apaise et m'angoisse à la fois. Je sens qu'il ne m'arrivera rien tant que je serais dans cette maison, aux côtés des Black Bikers, mais c'est aussi une pression supplémentaire sur mes épaules. Je n'ai jamais eu à dépendre de qui que ce soit pour ma propre sécurité, et maintenant, je me retrouve à devoir compter sur un groupe de criminels aguerris.

Je pousse un soupir en attrapant un de mes stylos pour le mordiller, les yeux fixés sur la page où toutes mes hypothèses sur les Kiss of Death sont étalées. J'essaie encore de trouver une raison à tout ça, une racine sur laquelle on pourrait tirer pour l'arracher, mais plus je réfléchis, moins j'ai l'impression de me rapprocher de la solution.

Peut-être que ça y est. Je suis trop impliquée pour voir les choses avec du recul. C'est pour ça que j'ai toujours été doué dans mon travail : je ne me suis jamais sentie impliquée émotionnellement dans mes affaires, mais aujourd'hui, c'est différent. Les Black Bikers sont un bout de mon histoire que je ne peux pas effacer.

Mais il le faut. Il faut que je prenne du recul, que je ravale mes émotions et mes sentiments pour me concentrer. Je dois absolument les aider à trouver une solution avant de rentrer chez moi. Il le faut absolument, sinon, je n'aurais servi à rien.

D'autant plus que le dossier que William m'a envoyé et qui a terminé entre leurs mains est un problème que j'ai causé et que je dois résoudre. Je ne peux pas prendre le risque d'avoir provoqué un problème supplémentaire.

J'ouvre mon ordinateur pour retrouver le dossier que William m'a renvoyé pour que je puisse le lire, et savoir ce qui aurait pu attirer l'attention particulière des Kiss of Death ou même ce que je n'aurais pas vu sur le moment.

Alors que je relis encore et encore les fiches sur les membres qui ont quitté le club, je finis par entendre des coups contre ma porte qui me sortent de mes pensées et je pose aussitôt mon regard sur la porte en sentant mon corps se crisper.

Est-ce que c'est Trevis ? Est-ce qu'il veut qu'on discute ? Est-ce qu'il veut me parler ? Je ne sais pas comment je suis censée entretenir une relation avec lui, mais l'idée même de la créer me rend mal à l'aise. Encore une fois, je me répète que c'est mon grand-père, mais je n'arrive pas encore à le concevoir dans mon esprit. Pourtant, je finis par me racler la gorge et faire pivoter la chaise pour me retourner vers la porte.