Chapitre 8 - L'ombre du Maître

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— Elle se réveille, viens vite Eddie !

Un visage féminin accueillant était penché sur Amanda. L'inconnue était souriante, elle avait des traits ronds très rassurants, de grands yeux bleus et deux longues nattes blondes retombant sur ses larges épaules. L'homme de la fenêtre vint s'asseoir près de la blessée et lui prit la main avec sollicitude :

— Ben alors Siler, on t'a jamais appris que la boxe se pratiquait sur un ring ?

— Très drôle Eddie, commenta Amanda en s'asseyant malgré la douleur.

Il s'agissait du capitaine Bilware, c'était lui qui avait fait fuir l'Italien et qui avait transporté la jeune femme dans son appartement. Son épouse ôta la compresse qu'elle avait appliquée sur le front d'Amanda. Ils étaient tous les trois assis sur un confortable canapé de cuir, et une épaisse couverture enveloppait l'invitée grelottante.

— Je m'appelle Emmanuelle, se présenta madame Bilware. Suivez-moi jusqu'à la chambre si vous pouvez marcher. Je vais vous prêter des vêtements secs.

La jeune femme ne protesta pas et la suivit en clopinant. La chambre était petite mais chaleureuse. Amanda passa devant un grand miroir et en profita pour examiner les nombreuses blessures sur son visage. L'œil gauche était enflé et à demi fermé. Le souffle coupé, elle lâcha la couverture qui retomba sur ses pieds nus. Elle ne portait que ses sous-vêtements, et elle se rendit aussitôt compte de l'ampleur des dégâts. Elle avait d'innombrables ecchymoses sur tout le corps et le sang séché lui colorait la peau d'un orange sale. La boue avait également durci sur sa peau, son visage et ses cheveux. Méconnaissable, elle ne se reconnut pas immédiatement, mais elle dut malgré tout se rendre à l'évidence, on l'avait sérieusement passée à tabac.

— Regardez, j'ai fait couler un bain, annonça Emmanuelle en désignant la baignoire débordante de mousse dans la pièce voisine.

Amanda ne se fit pas prier.

Une fois détendue dans l'eau, un ineffable sentiment de bien-être l'envahit. Elle frotta vigoureusement sa peau afin d'effacer ce qui s'était passé mais, contrairement aux taches de sang et de boue, les blessures et les bleus ne s'évanouissaient pas dans l'eau. Peu de temps après, Emmanuelle vint déposer des vêtements propres sur une chaise et indiqua l'endroit où était rangé le sèche-cheveux.

Lorsqu'Amanda fut remise sur pieds, une petite heure plus tard, le capitaine Bilware l'interrogea au sujet de son agression :

— Qui était ce type ? Qu'est-ce qu'il te voulait ?

— Je l'ignore. Il m'a juste dit qu'il travaillait pour le Maître.

— Le Maître, encore lui. Il ne nous a pas lâché depuis la création de la base. Si seulement on pouvait enfin découvrir son identité.

— Il sait que Daniel et moi travaillons à la base. Ils savent qui on est ! Ils nous retrouveront et ils nous tueront !

La jeune femme fondit en larmes puis se blottit dans les bras du capitaine.

— Chut, ne t'inquiète pas. On va trouver une solution et il n'arrivera rien ni à toi ni à Daniel.

L'homme se mordit la lèvre inférieure, si l'agresseur d'Amanda l'avait suivie jusqu'ici il devait se douter qu'un autre militaire vivait dans le coin et alors il ne serait plus jamais tranquille, sa femme et ses enfants seraient en danger permanent. Jusqu'à présent, les espions n'avaient pas été une trop grande menace. Il fut un temps où ils étaient si rares que certains militaires se demandaient si cette histoire n'était pas uniquement issue de l'imagination et la paranoïa du général Bellhaie.

Mais tout était différent à présent, personne n'était plus en sécurité nulle part, même pas derrière les murs d'un mètre d'épaisseur de la base. Les espions s'infiltraient partout, ils étaient de plus en plus nombreux, la base devenait une véritable passoire. Les militaires assassinés étaient si nombreux qu'on ne les comptait plus. Mais heureusement, les redoutables armes stockées dans le complexe souterrain n'étaient pas encore tombées entre les mains ennemies. Cela ne saurait cependant tarder. Il était temps d'agir.

A l'heure du dîner, le capitaine Bilware ramena Amanda à la base. A sa grande surprise, Daniel était dans un aussi piteux état qu'elle. La journée finit relativement tôt pour les deux jeunes mariés qui s'effondrèrent sur leur lit dès huit heures du soir.



A Double Tranchant (Terminé)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant