Chapitre 13 - Imprudence

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Dès l'aube, alors que Jonathan dormait encore, Lisa se rhabilla et quitta silencieusement l'appartement. Quelle ne fut pas sa surprise lorsque, à l'entrée de l'immeuble, elle surprit le jeune Marc étendu sur des papiers journaux tel un clochard. Atterrée, elle s'agenouilla auprès de lui et le secoua légèrement. Il ouvrit des yeux ronds et, la voyant, crut se réveiller après sa première nuit passée auprès d'elle, comme si les précédents jours n'avaient été qu'un mauvais rêve, un horrible cauchemar. Mais il dut bien vite se rendre à la dure réalité.

— Qu'est-ce que tu fous là !? s'énerva Lisa en essayant de ne pas parler trop fort. Pourquoi tu n'es pas retourné chez toi, à Paris ? Tu vas manquer la moitié de tes cours en restant ici.

— Je ne repartirai pas sans toi. Tant pis pour l'université, elle ne bougera pas en mon absence.

N'ayant pas la tête à discuter avec cet avorton, elle se releva et lui tourna le dos.

— Attends Lisa ! Reviens à Paris, tu trouveras un travail là-bas.

— J'en ai déjà un.

— C'est faux, j'ai fait des recherches. Tu n'as ni logement ni travail ici. Pourquoi t'obstiner à rester dans cette ville ?

— Si tu veux tout savoir on m'a embauchée dans une base militaire tenue secrète, pas étonnant que tu n'aies trouvé aucun renseignement à ce sujet, révéla-t-elle sur un coup de tête pour qu'il la laisse enfin tranquille. Maintenant, fiche-moi la paix et tourne la page, je n'ai besoin ni de ton aide ni de ta misérable affection.

Elle disparut ensuite dans l'épais brouillard matinal qui recouvrait la ville.

Marc retourna dans sa tête cette idée encore et encore, une base, une base secrète, des militaires, une base militaire... Peut-être que ces renseignements lui seraient utiles pour reconquérir sa bien-aimée. Mais d'abord, il devait se débarrasser de l'homme qu'il avait vu hier soir en compagnie de Lisa.

Désespéré de ne pas la retrouver dans cette ville moyennement grande, il était allé grignoter quelque chose au Faisan et avait surpris le couple. Il les avait ensuite suivis jusqu'au pied de l'immeuble et s'y était endormi. Il ne tolérait pas qu'un autre homme que lui pose ses sales pattes sur sa Lisa.

La mâchoire crispée, les yeux flous et humides, il alla alors frapper à toutes les portes de l'immeuble, une à une. Ce fut finalement au dernier étage qu'il reconnut le monstre qu'il accusait de lui avoir dérobé sa tendre Lisa. Il se maîtrisa mieux qu'il ne s'y était attendu et parvint à ne pas frapper Jonathan immédiatement.

Le colonel lui avait ouvert la porte avec une simple serviette sur les hanches. Celui-ci avait demandé son identité à l'inconnu qui se tenait sur le seuil de sa porte mais Marc était resté muet. Il observait attentivement l'intérieur de la pièce, comme pour deviner ce qui s'y était passé la veille, lorsqu'il aperçut soudain, accrochée à une chaise, la veste supportant tous les grades militaires de Jonathan. Il lut le nom inscrit sous la sonnette et le répéta à voix haute avec dégoût et rancœur :

— Jonathan Filips... prononça-t-il comme s'il s'agissait d'une injure.

Il eut un rire moqueur puis s'éloigna sans aucune explication.

Prenant le visiteur inopiné pour un fou, le colonel retourna dans sa chambre vide. Où était passée Lisa ? Elle travaillait sans doute tôt et n'avait pas voulu le réveiller. C'était en tout cas la seule explication qu'il acceptait de croire.

Marc venait de découvrir un secret extrêmement important et il ne savait qu'en faire. Le révéler à la presse ? Non. S'en servir contre ce Jonathan Filips ? Faire du chantage à Lisa ? Il n'en savait que trop rien pour l'instant mais il allait faire usage de cette information, c'était certain.



A Double Tranchant (Terminé)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant