Elias nous congédie de la chambre, demandant d'être seul avec Matteo. Nous sortons tous dans le couloir, où le vent souffle doucement, régulièrement, presque comme une respiration. Devant la porte fermée, une minute de silence passe, le goût amer de la trahison se dégage d'eux. Ils bouillonnent de colère.
Ce n'est pas tant l'attaque qui les touche, mais la douleur de la trahison : ce n'est pas un ennemi, mais un membre de leur cartel, de leur famille, qui les a trahis.
Min-Ho et Alba finissent par partir, l'air morose, me laissant seule avec William.
— On peut parler de ce qu'il s'est passé ce soir ? demande-t-il.
Je hoche la tête et nous nous adossons à la barrière en bois du motel.
— Je sais ce que ça fait, avoue-t-il d'une voix lointaine. On le sait tous, on est passé par là nous aussi. Je suis désolé que tu aies à vivre avec ce fardeau.
Mon coeur se serre.
— Je ne veux pas le porter. Je ne veux pas blesser quelqu'un, encore moins tuer.
— Aucun de nous ne le voulait, mais dans ce monde tu n'as pas le choix. Tu dois être prête à tirer la première ou ton adversaire le fera et tu mourras.
Je secoue la tête avant d'observer le ciel nocturne. Le calme de la nuit contraste avec la tempête de mes pensées.
— Personne n'est là pour nous protéger, au final il n'y a que nous même. Il n'y a que nous et la mort qui n'attend qu'un seul faux pas pour nous enlacer.
Ses mots résonnent en moi comme une fausse note. Je ne veux pas. Je ne veux pas devenir une meurtrière pour quelque chose qui me revient de droit. Je ne veux pas devenir une meurtrière pour vivre.
— Alors on est tous destiné à devenir des monstres ?
William rit sans joie.
— L'Homme est un monstre, Pandora. Certains savent mieux le cacher que d'autres, c'est aussi simple que ça.
— Non, je refuse de penser comme ça.
Il hausse les épaules, comme si ce que je pensais ne changeait rien. Je refuse d'abandonner l'espoir de finir libre. Je refuse de penser que ce monde est le seul que je connaîtrais jusqu'à la fin. Je veux vivre dans un monde sans danger, je ne demande que ça.
L'image du vieux couple me revient en tête et me renforce dans mes croyances. Certains sont bons, certains éloignent les monstres, et j'espère un jour faire partie d'eux.
— Vous ne connaissez que ça, je reprends. Vous ne connaissez que la violence, le sang et la mort. Vous ne savez pas ce qu'est une vie calme, une vie loin des monstres.
William quitte le ciel des yeux et se tourne vers moi, un léger sourire mélancolique dessiné sur les lèvres.
— Cette vie-là n'existe pas, ce n'est qu'un rêve, une illusion.
— Non. Les humains ne sont pas foncièrement mauvais, nous ne naissons pas ainsi, nous le devenons. Les monstres choisissent de le devenir.
Il souffle du nez et secoue la tête.
— C'est ce que tu penses ? Que nous voulions de cette vie-là ? Ne crois-tu pas que nous avons tous rêvé d'une vie calme et loin de toute cette hécatombe ?
— Non... Je commence à comprendre que c'est plus complexe que ça mais... Si c'est ce que vous voulez, si on arrive à sortir de ce monde-là, je pense que vous pouvez l'atteindre aussi.
— Tu es bien trop naïve, Pandora, me coupe-t-il.
Il soupire et lance un dernier regard au ciel sombre.
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Chrysanthème Noir | T.1 & T.2
Aksi"Peu importe ce qu'on apprend, on ne sait rien." La vie de Pandora, jeune française, bascule lorsqu'elle se réveille dans une chambre d'hôtel vide, sans aucun souvenir. Depuis ce jour, un inconnu lui envoie des lettres malsaines. Elle quitte son pa...