35. Chibi Clodo squatte mon canapé

10 3 9
                                    

35. Chibi Clodo squatte mon canapé
(By Totorou)

— C'est quoi cet appart ? m'a fait cet ahuri de Chibi Clodo en observant d'un œil perplexe mon canapé lit éventré. T'arrives à dormir là‑dessus ?

— Je me suis fait cambrioler, espèce de débile ! C'est pour ça que je dormais chez ma mère.

— Ah meeeerde.

Depuis qu'il avait eu deux ou trois bonnes nuits de sommeil, Chibi Kiwi avait repris du poil de la bête. Il avait maintenant assez d'énergie pour venir avec moi chez Ikéa et m'aider à porter mon nouveau canapé lit, mes nouveaux placards etc. On avait même pu louer une camionnette grâce aux faux papiers de Jean‑Luc Pigeon. J'étais pas rassuré sur le siège avant avec un clone de 27‑mais‑11 ans au volant qui attendait des conseils de ma part :

— Je te préviens FdB, j'ai jamais conduit une camionnette moi !

— Si le permis est le même, c'est que ça se conduit comme une voiture normale, allez démarre.

— Mais j'ai même pas le permis normal !

Je l'ai regardé sombrement :

— D'où tu te foutais de ma gueule, au juste ?

— Hé oh, j'ai passé seize ans de ma vie dans une capsule de Santorga. C'est quoi ton excuse à toi pour être con ?

J'ai eu envie de lui mettre une tarte, mais j'avais besoin de lui pour me ramener mon matos a la maison.

— Et pour te virer de chez moi, j'ai besoin d'une excuse ?

On s'est fusillés du regard tous les deux. Mais on avait besoin l'un de l'autre. Chibi devait dormir quelque part, et moi je n'avais pas seulement besoin de lui pour m'aider à monter mes meubles, il était aussi mon bouclier anti‑Grenade.

— C'est bon, a‑t‑il capitulé, je vais le conduire ton camion. Faudra pas m'en vouloir si je nous tue.

— T'inquiète. Je t'en voudrais pas.

Au point où j'en suis.

Chibi a mis le moteur en route. Passé un ou deux virages il a trouvé ses repères et a adopté une conduite plutôt zen. Une fois chez moi, on a rangé, trié, on a rendu mon appart habitable. Comme je dors dans le canapé lit du salon, on pourrait croire que je vis dans un studio, mais c'est faux : j'ai une deuxième pièce, qui était censée être une chambre à la base, dans laquelle j'avais mis mes deux machines de muscu parce que j'ai le sens des priorités. Les pauvres bébés ayant été pulvérisés par Grenade, je les ai poussés dans un coin comme ça j'avais assez de place pour installer un matelas gonflable et un sac de couchage pour Chibi. Celui‑ci était tout content d'avoir sa chambre à lui, et aussi d'échapper au regard soupçonneux de ma mère. En rangeant mon matos de muscu, je le regardais gonfler son matelas avec enthousiasme. Il était de bonne humeur. Il était persuadé qu'on allait sauver Kiwi ensemble, retrouver Grenade et redevenir tous amis. Soit ça, soit il jouait très bien la comédie. Sa crise de larmes du premier soir, on n'en avait évidemment jamais reparlé. Celle de la nuit d'après non plus. Je faisais comme si, c'était plus simple.

Il a rebouché le matelas et s'est jeté dessus. Puis il a attrapé un haltère et l'a soupesé en grimaçant. Il m'a fait une remarque moqueuse, puis il est parti fouiner dans le reste de l'appart. Quand je sortais avec Kiwi, j'avais fait bien gaffe à faire disparaitre toute preuve de mon travail chez Santorga. J'étais tranquille. Je l'ai quand même suivi dans le salon où il furetait dans les étagères qu'on venait de remettre en place.

— T'as pas des livres ?

— Pour quoi faire ?

— Ben pour les lire.

Kiwi ex machina - seconde partieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant