Chapitre 8 : Lumière

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A trop vouloir s'approcher du soleil, on s'en brule les ailes.




Huo

       Le plus étrange lorsqu'on vient d'avoir dix-huit ans ce sont le nombre d'opportunités qui s'ouvrent à toi, juste ici, devant tes yeux.

Pourtant quand tu essayeras d'avancer, d'atteindre ce que tu désirais depuis ton plus jeune âge, de seulement poser un pied devant l'autre comme tu l'as toujours fait.

Tu n'y arriveras pas.

Car le passé te rattrapera avant même d'avoir soufflé tes bougies.

Cela fait deux longues années que je vis ici, entre ces murs blafards et chambres froides qui pourtant me semblent si chaleureuses comparé à l'enfer de la secte. Deux ans que le docteur Hall s'occupe de moi, deux ans que j'apprends à vivre dans une société que je n'avais jamais connue auparavant, une société où aucune croyance ne m'était imposée. Le docteur Sam Hall m'a appris les bases et j'ai vu en lui une figure paternelle.

Au travers des longs couloirs aux senteurs de désinfectants et de plastique, j'avance d'un pas enjoué. Les portes des chambres tantôt ouvertes tantôt fermées défilent au fur et à mesure de mes pas, habillée de mes habituels vêtements d'une largeur dissimulant la majorité de mes brulures je dévale la grande cage d'escaliers en saluant d'un bref coup de main les agents d'entretiens.

Salut Huo !

Salut James ! Ta fille vas bien ?

Il est vrai que j'ai eu du mal à me sentir chez moi les premiers jours.
Les grandes fenêtres laissant voir la ville dans son entièreté ainsi que les nombreux patients et employés divers déambulant dans ces longs couloirs ont remplacés les grandes salles communes remplies de familles vivants dans un calme artificiel.

Pour les autres, l'hôpital rime avec mauvaises nouvelles, je ne compte plus le nombre de fois où j'ai pu croiser involontairement le regard de personnes en larmes après avoir appris le décès d'un de leurs amis, parents, conjoints, ou même enfants.

J'ai passée deux années à regarder distraitement les ambulanciers courir avec des brancards où gisaient des personnes entre la vie et la mort en me demandant quel seront les réactions de leurs proches s'ils venaient à apprendre leurs décès.

Allaient-t 'ils pleurer ? Prier ? Ou être lâchement indifférents face à cette perte comme je l'ai été ?

Le sentiment qui m'emplissait dès lors que je les voyaient m'effrayait, je ne ressentais ni de la compassion ni de la tristesse face à ceux qui avaient pourtant tout perdus.

La perte de mes parents ne semble pas m'avoir profondément affectée. J'ai conscience d'avoir perdu quelque chose mais de là à dire que je me sens mal avec ce vide ?

Non, ma vie as juste reprit son court malgré les brulures.

Je jette donc un coup d'œil au passé, les doigts tremblants face à la hauteur des flammes, de l'odeur de chairs brulées puis du bruit assourdissant des balles de mon sauveur.

Comme un grand vertige face à l'envergure d'un vide incompréhensible je cherche encore la raison de mon absence de larmes.

Après tout, ma mère n'était qu'une hypocrite qui vivait au travers de l'image qu'elle voulait bien montrer aux autres, elle était tellement obsédée par le regard d'autrui qu'elle a enrôlé sa famille entière au sein d'un culte connue pour élever spirituellement les fidèles -même si pour cela il fallu mettre la main à la poche-.

𝐁𝐞𝐡𝐢𝐧𝐝 𝐌𝐲 𝐄𝐲𝐞𝐬Où les histoires vivent. Découvrez maintenant