Chapitre 35 : Sérotonine

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Elle était indifférente face à ma promesse et je n'ai pu l'honorer.





Le roi sans couronne.



Lower Manhattan Hospital, 6h du matin.

Chlorure de calcium.

Je me tiens au-dessus de la table d'opération, le cœur battant dans ma poitrine tandis que je scrute le moniteur cardiaque, les chiffres dansent devant mes yeux fatigués.

Les lampes industrielles me brulent la rétine.

Gluconate de calcium

Les alarmes stridentes résonnent dans la salle, accompagnant chaque battement de mon cœur. La vie de l'homme étalé sur le lit est suspendue à un fil, un fil que je dois maintenir avant qu'il ne se coupe définitivement.

J'eu cru que son cœur avait cessé. Mes mains triturent ses veines pour y planter le cathéter. Le bloc opératoire semble se réduire à la taille d'une boîte d'allumettes.

Je déteste être de garde la nuit, j'ai l'impression d'être en pilotage automatique.

0,5 millilitres d'adrénaline en intra-veineuse. j'ordonne, ma voix tremblant à peine moins que mes mains. Les infirmières autour de moi s'affairent. Je ne vois que des ombres se déplaçant à une vitesse fulgurante, réapprovisionnant les médicaments, ajustant les tubes et les câbles.

Dobutamine

Réveille toi, bon sang. Je manque de cracher entre mes dents serrées.

Rien. Le silence est assourdissant. Mais il n'y pas de place pour la défaite. Pas maintenant.

Le patient gît devant moi, son corps pâle et inerte sur la table, pourtant je sais qu'il lui reste un pouls.

Bon. Envoi le défibrillateur. Je lance au deuxième chirurgien.

Mais on vient de l'injecter-

Charge à 200 joules. J'ordonne.

Le vacarme reprends, plus fort encore.

Mes mains ne tremblent plus, elles lancent l'éclair à travers son thorax.

Un choc, puis rien.

Charge à 300 joules.

Le choc déchire l'air. Le silence qui suit me déchire les entrailles.

Mais cette fois-ci, le silence fut brisé par un battement. Faible, irrégulier, mais c'était là. Le cœur du patient s'est remis en marche. Un léger soupir d'espoir s'échappe de mes lèvres asséchées.

On continue. Je m'exclame alors que le patient se retrouve secoué de spasmes sous l'électricité.

Les infirmières me regardent, perplexes. Toujours pas habituées à ce qu'un gosse leur dise quoi faire.

Charge à 360 joules, ce sera la dernière.

Je crois que ce sera la dernière.

Plus confiant, mes mains presse l'homme avec le défibrillateur.

Les battements du moniteur deviennent plus forts, plus réguliers, Un soupir collectif de soulagement emplit la salle. Le patient est sain, mes collègues de la réanimation se pressent pour le prendre en charge.

Enlevant mon masque, je me laisse choir sur la première chaise que je trouve. Derrière mes yeux clos et ma tête renversée en arrière, il me semble entendre le lit rouler en direction de la sortie tandis que progressivement, seuls ma respiration emplit le bloc opératoire vide.

𝐁𝐞𝐡𝐢𝐧𝐝 𝐌𝐲 𝐄𝐲𝐞𝐬Où les histoires vivent. Découvrez maintenant