"How could she?
Why don't you love me anymore?"- - -
Le crépuscule naissant accentue l'air lugubre que peut avoir la maison funéraire des Porter vu de l'extérieur et le vent glacial n'aide pas à adoucir le tableau. Comme me l'a indiqué d'Edgar précédemment par message, je le rejoins dans la sellerie, en contournant le bâtiment mortuaire par la gauche, m'amenant sur un petit sentier caché des yeux de tous dont j'ignorais l'existence. Je gagne rapidement la petite cabane de bois éclairée par des lanternes, et Edgar s'y trouve en train de seller Arthas. Un immense sourire apparait sur son visage lorsqu'il me voit.
— Milady, prête pour cette nouvelle aventure?Pas réellement non... la chasse au macabé n'est pas une aventure palpitante.
Ses bras s'enroulent autour de moi, se voulant rassurant, une fois le réajustement de la sangle de selle effectué.
— Un peu stressée je t'avoue que je n'avais pas prévue de me retrouver en face d'un cadavre ce soir mais soit. Dis moi, pourquoi avoir préparé les chevaux ?Ses lèvres se pressent contre mon front alors que la pression de ses mains sur mes reins se resserre.
— Ne t'inquiète pas ça va bien se passer. Si quelque chose tourne mal on s'enfuit au triple galop. Edgar se détache de moi et sort son téléphone portable de la poche de son sweat-shirt en coton noir. J'ai vérifié le point GPS et c'est à trois kilomètres et demi d'ici. À pieds, on est pas près d'y arriver. Alors qu'à cheval, même en y allant tranquillement, en trente minutes maximum nous y sommes. Aller en selle Milady!Je m'approche d'Ablette, et comme à son habitude la jument vient coller ses naseaux contre ma main en soufflant. Elle est d'une délicatesse hors pair c'est incroyable. J'attrape les rennes et me hisse sur son dos en me tenant au pommeau de la selle, en prenant soin de m'appuyer le moins possible sur elle, afin de ne pas endommager sa colonne vertébrale. Nous voilà partis pour une petite demie heure à travers bois comme l'a indiqué Edgar. Ce dernier avance, se frayant un chemin à travers champs pour rejoindre la foret se trouvant non loin de la maison funéraire, à la bordure du près des chevaux des Porter. Mes yeux se posent instinctivement sur le corbeau, et malgré la situation lugubre, l'ambiance des lieux est tout de même quelque peu magique. La lumière de la lune se réverbérant sur les cheveux d'Edgar, crée des reflets bleutés assez élégants. Etonnement, une fois en forêt le froid n'est plus si mordant, le vent est relativement coupé par les arbres. Arthas se met à trotter petit à petit. À l'aide de mes jambes, j'incite Ablette à faire de même et la jument obéit instantanément. La lune éclaire le petit sentier de manière suffisante à repérer notre chemin marqué par les traces de sabots laissées dans la terre. Les cheveux d'Edgar soulevés par le vent, s'accordent parfaitement au mouvement de son cheval créant une vague semblable à un ramage majestueux. Le tableau qui se dresse devant mes yeux a quelque chose de très poétique. Le corbeau ralentis et se cale sur mon rythme, se plaçant à mon niveau.
— Bon, nous sommes censé y être, le point GPS indique cet endroit. Ouvre l'oeil. Regarde dans mon sac, j'ai deux lampes, dans celui de droite.J'intime à Ablette de s'arrêter, afin de déboucler la fermeture métallique de la besace en cuir fixée sur le dos d'Arthas. J'en tire deux lampes torches assez lourdes et en donne une des deux à Edgar avant d'allumer la mienne. Nous avançons prudemment dans la clairière qui se dégage devant nous, crée par une ronde de sapins. Une calme pesant règne autour de nous et l'ambiance balade bucolique s'estompe en un claquement de doigt. Le vent, ainsi que le froid sont de retour, accompagnant fidèlement ma crainte.
— Le point mène à cette clairière Edgar, ou au delà?— C'est pile ici, on se croirait dans Twillight c'est complètement délirant comme endroit. Je ne savais même pas qu'il y avait ce genre d'espace ici. Si trois vampires débarquent, on dira que nous sommes en pleine partie de baseball, espérons survivre, ponctue t'il d'un clin d'oeil l'air amusé.
— C'est pas drôle Edgar, vraiment pas.
Le corbeau ne prend pas le temps s'amuser de mon air faussement enervé comme à son habitude, car il fonce au trot vers le milieu de l'étendue d'herbe. En plissant les yeux, j'arrive à y apercevoir un objet brillant sur lequel le peu de lumière restant se reflète. C'est obligatoirement un autre tableau.
J'approche doucement mais Edgar me fait signe de m'arrêter.
— Crois moi Eleanor, tu ne veux pas voir ça... Je... je ne sais pas comment t'expliquer cela... je... n'approche pas d'accord.Je hoche la tête en guise de réponse, même si je ne suis pas sûre que de là où se trouve Edgar, il arrive à distinguer autre chose de ma personne qu'une tache sur un cheval. Je le vois s'abaisser en se couvrant le visage, éclairant l'objet scintillant. C'est un cadre. Une autre oeuvre se trouve ici. Comme c'était prévisible. Cette chasse ne s'arrêtera donc jamais. D'une pression de talon, Ablette avance vers Edgar mais ce dernier se relève et nous fait signe de nous arrêter.
— Eleanor, j'ai dis ne bouge pas! Je ne plaisante plus. Je... descends de cheval, j'arrive.Sa voix se casse sur la fin de sa phrase et ne m'envoie rien de bon.
J'enroule les rennes autour du pommeau de la selle pour éviter qu'elles ne tombent dans les pattes de la jument et retrouve le sol. Mes pieds sont engourdis par le froid et le manque de mouvements, je peine à retrouver mon équilibre dû à ces satanés fourmillements. Edgar s'approche de moi, attrape ma main dans la sienne, couverte d'un gant en cuir.
— Eleanor, ça ne va pas être très facile, si tu ne veux pas aller voir, je comprends sans soucis, mais je dois te prévenir avant que tu approche, le choque risque d'être brutal. Je n'ai pas d'explications... je... je suis tellement désolé... j'ai essayé...— Edgar?
Je le vois paniquer et cela n'annonce rien de bon. Ses yeux de glace embrumés se posent sur moi et dans un éclat de voix il m'annonce la pire nouvelle que j'ai entendu jusque là.
— Il s'agit d'Ofelia.C'est impossible, elle était à la soirée, elle était en vie. Edgar doit se tromper. C'est impossible. Ma tête tourne sans cesse, je ne réalise pas. Tout les efforts que j'ai fait pour la sauver pour qu'elle se retrouve au milieu des bois, victime d'un tueur en série. Ce n'est pas possible. Edgar doit se tromper. Je dois voir le corps, tant pis pour le traumatisme, je me dois de vérifier. Il le faut.
Les bras d'Edgar me stoppent dans ma volée, m'écrasant contre son torse.Non pas maintenant, il ne peux pas me faire ça.
Je dois voir, je veux voir. Je dois en avoir le coeur net. Tout cela est improbable. Le temps s'arrête et l'espace d'un instant je lutte avec le corbeau, tentant de me débattre de son étreinte bien trop puissante, sans le blesser. Mes mains agrippent ses bras, serrant sa peau avec mes ongles en le suppliant de me lâcher. Mes larmes me brulent la peau et mes cris déchirent le calme de cette clairière.
Et là tout s'arrête.
Les bras d'Edgar me relâchent, mes poumons me brulent mais cela n'empêche pas mes jambes de gagner en une fraction de seconde le corps d'Ofelia. Etendue là, telle une biche égarée et ensanglantée. Ses cheveux de jais sont tressés et clairsemés de fleurs rouges. Aussi vives que le sang qui tache sa volatile robe blanche. Sa carotide a été déchiquetée avec une violence sans nom, mais cela s'arrête là. Pas de couture, pas de bouts de corps ne lui appartenant pas. Rien. Une biche s'étant pris une balle perdue. Rien de plus.
Ma main s'approche de sa peau laiteuse mais Edgar s'en saisit avec que ma paume n'entre en contact avec le bras sans vie de mon amie. J'heurte le torse du corbeau et nous tombons dans l'herbe non loin d'elle. Ses bras m'enserrent à nouveau, mais cette fois ci non pour m'empêcher de bouger, plutôt pour tenter de m'apaiser
— Je sais que c'est compliqué mais ne la touche pas. Tu serais reliée directement à l'affaire après autopsie.
Mes larmes reprennent le dessus et je m'effondres dans les bras d'Edgar. Mon corps, prit de secousses incontrôlables, tremble contre celui du corbeau qui me maintient fermement en me berçant. De longues minutes passent sans que rien d'autre que mes sanglots ne trouble le calme nocturne. Elle est parti, je n'ai pas réussi à la sauver.
VOUS LISEZ
NEVERMORE
Teen FictionMais, le corbeau induisant encore toute ma triste âme à sourire, je roulai tout de suite un siège à coussins en face de l'oiseau et du buste et de la porte ; alors, m'enfonçant dans le velours, je m'appliquai à enchaîner les idées aux idées, chercha...