Chapitre 30 : Raison contre sentiments

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Nous nous empressâmes de regagner le navire et de distribuer au plus vite la poudre à tous nos amis. Les plus souffrants s'endormirent paisiblement, la respiration plus calme et le teint reprenant des couleurs. Nous en fûmes tous soulagés et James leur donna quartier libre pour se reposer et se détendre après toutes ces péripéties.

Cette journée harassante commençait à se terminer tandis que le ciel s'éclaircissait, laissant voir de magnifiques couleurs crépusculaires.

Je rejoignis James à la proue du navire et m'assis près de lui, en contemplant l'océan apaisé qui nous tendait les bras. Nous avions franchi une étape cruciale dans notre aventure et, à présent, nos hommes ne craignaient plus rien. Nous pouvions laisser tomber sans craindre d'autres malheurs, mais nos cœurs gonflés d'espoir et de courage ne battaient plus que pour la justice. Nous ne pouvions pas retourner en arrière, nous avions un devoir à accomplir, non plus pour nous, mais pour des familles, des pères, des mères et des enfants. Pour la vie.

Je me sentais bien, heureuse d'avoir pu aider ces braves hommes, mais je ne pouvais nier que, plus nous avancions, plus nous franchissions des étapes dans cette aventure, plus je me demandai égoïstement ce que je devrais faire ensuite. Une fois les pirates vaincus, qu'étais-je censée faire ?

Un souffle d'air frais me fit frissonner. James le remarqua et m'emmena dans la salle à manger, prendre un verre de rhum au chaud.

Installée confortablement, j'essayai de me détendre.

—Je voulais vous remercier pour le médaillon, commençai-je devant le silence qui s'était installé entre nous.

—Je vous en prie, c'est grâce à vous si nous en sommes là, me répondit-il sans un regard.

Il paraissait tendu et très soucieux depuis que nous étions revenus. Il ne cessait de se gratter la nuque et de redevenir distant avec moi.

—James, tout va bien se passer. Je suis certaine que nous pouvons réussir. Je n'ai jamais été si sûre de moi mais, pour une fois, je sais que je peux le faire, je sais que nous avons nos chances. Et tant pis si nous n'y arrivons pas, nous aurons été jusqu'au bout, ensemble.

—Je vous fais confiance, murmura-t-il.

—Alors promettez-moi que vous me laisserez faire ce que j'ai à faire.

—Je vous le promets, déclara-t-il dans un soupir.

Je sortis alors le coffret auquel j'avais remis le rubis et le poussai sur la table, en face de James.

Il me regarda, m'interrogeant du regard.

—Je sais que cela va vous paraître étrange et complètement impulsif, commençai-je hésitante. Mais, j'ai comme un pressentiment qui me dit qu'il faut que je vous le confie. Ne me demandez pas d'explications, je le sais c'est tout. Prenez-le et gardez-le bien caché sur vous.

Pour la première fois de la soirée, il me regarda droit dans les yeux et vit mon angoisse. Alors, il se saisit délicatement de mon coffret et le mit dans sa redingote.

—Je vous promets d'en prendre soin, déclara-t-il, lui aussi touché par ma confiance réciproque. On peut dire que nous sommes à présent liés vous et moi.

Je lui souris tristement et m'approchai de la baie vitrée de l'étambot pour contempler la quiétude de l'océan.

James me rejoignit et prononça dans un murmure ce que j'avais peur d'entendre tout haut :

—Rosélia...Que se passera-t-il quand tout sera fini ?

Mon cœur rata un battement et l'inquiétude que je pouvais voir sur son visage me désespéra. Des larmes se formèrent malgré moi au coin de mes yeux et je lui répondis en bredouillant :

Le Temps d'un Souhait - Première PartieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant