L'Oeuvre

21. Bénédiction.

Pdv Eli
Lundi 30 Janvier, 11h30.

Plus que 30 minutes et je rentre chez moi. Étant prof d'arts plastiques, j'ai peu d'heures de cours. Donc il y a des jours comme ça où je n'ai que 2h.

Deux heures où je donne tout pour éviter April et le gardien. Cela fait plus de 15 jours que je me cache lorsqu'il arrive et passe par l'arrière du lycée pour entrer ou sortir du bâtiment.

C'est ridicule je sais. On dirait un enfant qui fuit par honte d'une bêtise qu'il a commis.

C'est un peu ça j'avoue.

Pour April ce sera plus compliqué. J'ai cours avec elle. Cependant je ne l'ai pas vu aujourd'hui. M'évite-t-elle, elle aussi? Est-ce qu'elle s'empêcherait de venir à chaque cours d'art à cause de moi ?

"Je te veux toi et ton regard dit que tu me veux également."

Bien sûr que je te veux April. Depuis le premier jour.

J'étais perdu quand elle m'a fait sa déclaration dans cette chambre samedi. Et depuis je ressasse ce qu'elle m'a dit. Elle a posé les mots sur ce que je n'arrivais pas à décrire.

Elle me rend fou putain !!

Je ne veux pas que cette histoire se termine comme ça. Je ne tiendrai pas 5 mois de plus, pourtant j'ai déjà fait la moitié.

Il s'est passé tellement de choses en 5 mois, je m'en sors bien dans mon boulot, j'ai appris à apprécier mes élèves, j'ai rencontré une vieille dame chez qui je passe deux soirées par semaine, j'ai revu mon frère et surtout, je suis tombé amoureux.

Les aiguilles tournent, les tic-tac de l'horloge deviennent insupportables.

Je veux rentrer chez moi, me poser dans mon lit et ne plus penser.

La classe est silencieuse, le bruit des crayons contre la toile m'apaisent.

Les étudiants ne font aucun bruit, les minutes passent et je n'ai jamais eu autant envie de rentrer chez moi.

La sonnerie se déclenche enfin quand je manque de m'endormir contre mon bureau.

Ma vie est tellement ennuyante quand elle n'est pas là !

En moins de 10 secondes la salle est vide. Je récupère mes affaires et me dirige vers la porte.

Je suis lessivé et rien ne pourra m'arrêter pour rentrer.

J'ouvre la porte pour sortir et mes yeux s'écarquillent.

Monsieur Scott, le gardien.

Devant moi, qui attendait que je sorte.

Je panique et claque la porte avant qu'il puisse me parler.

Je recule et tente de ne plus faire aucun bruit. Ridicule, sachant qu'il m'a déjà vu.

Plusieurs secondes s'écoulent avant que quelques coups soient frappés à la porte.

Le moment d'hésitation est long. Pourtant M.Scott n'insiste pas plus. Je me décide enfin à ouvrir et l'homme n'a toujours pas bougé.

Son visage est fermé et ses cheveux hirsutes pourraient effrayer n'importe  quelle personne censé.

Moi-même, il me fout la trouille.

- Bonjour monsieur Stone.

Je suis presque trop troublé pour lui répondre.

- Bonjour monsieur Scott.

- Vous avez l'air stressé. On dirait un enfant, ricane-t-il.

Stressé ? Nonnn.

- Que me vaut le plaisir de vous revoir ? Dis-je.