— Parfait, articulé-je d'une voix posée.
L'Américaine écarquille les yeux, les lèvres entrouvertes. Avec la clé du pick-up, je presse doucement le dessous de son menton pour lui fermer la bouche. Impossible pour moi de réprimer un infime sourire en coin, la situation est bien trop amusante pour que je reste totalement de marbre. Mais je le fais disparaître aussi vite qu'il est arrivé. Ahurie, Collins ne cille pas tandis que ses iris noisettes me fixent intensément – ce qui, disons-le, termine de me réjouir au plus au point. Mon palpitant se lance dans un truc pas très clair, comme s'il voulait me trahir, lui faire entendre que tout ça, elle ici, c'est en train de me marquer au fer rouge.
Déterminé à conserver l'avantage sur ce qui se joue, je recule sans la lâcher du regard, ouvre le tiroir de ma commode et attrape le premier tee shirt que je trouve.— Le spectacle te plaît ? m'enquiers-je sans plus laisser paraître la moindre émotion.
— Quoi ? tique-t-elle, les yeux toujours rivés sur moi.Je feinte finalement un soupir puis enfile mon tee-shirt blanc sans lui répondre. Au moment de passer l'encadrement de la porte, Collins tend son bras pour me barrer le passage. Merde.
Focus, mec !
Muet, je hausse un sourcil pour lui faire comprendre que ce n'est pas elle qui va m'empêcher de passer. Son regard me défie, son odeur me galvanise, son foutu caractère me file des envies secrètement contradictoires que je préfère taire ; pour ma propre santé mentale. Je vais pour insister – et probablement la soulever pour lui montrer que son poids plume ne peut rien contre moi –, mais tout bien réfléchi, puisqu'elle souhaite que je reste ici, je ne bouge pas. Le trousseau de clés autour de l'index, je croise les bras et attends qu'elle déverse sa colère sur moi. Vu la couleur cramoisie qui teinte à présent ses joues, je suppose légitimement qu'elle a « deux mots à me dire ».
Et moi, comme un con, je compte à rebours dans ma tête.
— Qu'est-ce que tu fous, Curtis ? Tu commences vraiment à me gonfler, je vais être en retard !
— Comme c'est dommage.
— T'es vraiment con quand tu t'y mets ! Tu le sais, ça ?Et ça ne fait que commencer.
Parce que je la surplombe d'une bonne tête, je prends plaisir à me pencher au-dessus de la petite blonde en la dévisageant gravement. Mes yeux s'arrêtent sur ses lèvres à l'ourlet fin, ce qui la fait rougir davantage. De sa main tremblante, elle se décide à me laisser le passage libre. Dans mon ventre, ça chatouille un peu trop et dans ma tête... ça cogne. Son regard, sa bouche, sa posture. Sa présence... Tout chauffe où ça ne doit pas, à l'image d'un volcan qui se réveillerait au pire moment. J'ai soudain l'impression que tout bourdonne autour de moi, à m'en rendre sourd. Ses jambes bronzées et découvertes ne se sont séparées que par une dizaine de centimètres de ma main, fourrée dans ma poche de jean. Je devine sa peau douce, crémée, prête à être caressée ce soir.
Par un autre que moi.
VOUS LISEZ
Australian Crush
RomantizmElisabeth Collins, jeune New Yorkaise diplômée, voit sa vie basculer du jour au lendemain. Elle souhaite changer radicalement les prochains mois de sa vie pour tourner la page. Quoi de mieux que les terres arides d'Australie pour oublier ? Curtis...