8. Devil's thoughts

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Fabio

Je descends de ma moto après une séance de qualification de merde. Je partirai 16ème de la course sprint de cet après-midi et de la course de demain. De quoi mettre une ambiance de plomb dans le box.

Je ne m'arrête même pas et file directement vers le motorhome, le casque encore sur la tête. Je n'ai pas envie de l'enlever parce que je suis entrain de bouillir dedans. Le garder sur moi empêche ma colère brûlante d'exploser et de mettre le feu là où je passe. J'enlève mes gants en chemin, ouvre la porte avant de les balancer à travers le camion lorsque j'y entre. Je ferme la porte à clefs, n'ayant vraiment pas envie de voir qui que ce soit. Personne ne pourrait me calmer, me consoler ou me re booster à cet instant. Pas même Tom. Ne parlons même pas de Léna qui se comporte plus que bizarrement depuis hier après-midi. Ma respiration s'accélère à cette pensée et je me crispe plus que je ne l'étais déjà. J'enlève enfin mon casque, ayant beaucoup trop chaud entre la combinaison et la chaleur qu'il fait à Jerez, en plus de mes nerfs qui ne participent clairement pas à faire baisser ma température.

Je file à la douche pour essayer de faire redescendre la chaleur de mon corps et de mon esprit. Je reste sous l'eau bouillante pour détendre mes muscles. Je colle ma tête contre la paroi pour essayer de me calmer définitivement, mais il y a trop de merdes qui tournent dans mon esprit. Je reste à ruminer sous la douche jusqu'à ce que l'eau devienne froide, m'arrachant un juron. Pourtant, je ne parviens pas à arrêter l'eau. Le bruit du jet et le fait d'être enfermé entre ces quatre murs semble me propulser hors de la réalité. Tant que je suis dans cette douche, je ne suis pas dans le paddock. Tant que je suis dans cette douche, je ne suis pas sur la moto. Tant que je suis dans cette douche, Léna et moi n'avons plus de problèmes. Rejetant ma tête en arrière, je me rends compte que je pleure de nerfs et de rage, avant d'essuyer mes quelques larmes de façon colérique. Je finis par sortir enfin de l'eau, me maudissant un bref instant pour avoir utiliser toute l'eau chaude. J'en aurais juste assez pour prendre une douche après la course sprint, mais Léna n'en aura plus.

Elle va sûrement me faire une scène, et on va se disputer. Je lève les yeux au ciel un instant rien qu'en y pensant. Comme si j'avais besoin de ça en ce moment. Je me rhabille en tenue sportwear, avant de sortir de la salle de bain. Je sursaute en voyant Léna sur le canapé, pianotant je ne sais quoi sur son téléphone. Elle relève les yeux de ce dernier, avant de battre des cils plusieurs fois. Comme si elle me voyait pour la première fois, ou je ne sais quelle autre pensée qui lui passe par la tête à ce moment là. J'aime lorsqu'elle a cette attitude. Lorsque malgré les problèmes qu'on traverse, nos cœurs prennent le dessus et semblent continuer de s'appeler. Elle s'agite sur sa chaise avant de me regarder de nouveau. Elle me lance un sourire triste et je penche la tête sur le côté un instant pour l'interroger silencieusement.

- On doit faire un débrief...elle grimace.

Je secoue la tête. Je n'en ai vraiment pas envie. J'ai besoin de penser autre chose jusqu'à la course Sprint de cet après-midi.

- S'il te plaît, pas maintenant...je croise les bras sur ma poitrine en me calant contre le mur le plus proche.

Elle ferme les yeux un court instant en inspirant avant de se lever silencieusement. Elle commence à marcher dans le camion sans me regarder avant de s'arrêter subitement face à moi.

- Je ne sais pas si tu es au courant, mais à force de te faire des traitements de faveur, la qualité de mon travail est en train de s'effriter. Tu arrives en retard devant les journalistes, il y a certains posts sur les réseaux sociaux qui sautent parce que tu ne veux pas faire les debriefs avec moi...Et en essayant de te ménager le plus possible avec les interviews  en dehors de celles des media scrums, les medias commencent à se poser des questions. Peut-être que tu n'en as rien à foutre, peut-être même que tu ne t'en ai absolument pas rendu compte, mais la direction d'écurie commence à s'en rendre compte, elle.

Dans la tourmente du diable [Fabio Quartararo]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant