|23| Retrouvailles

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Après cela, mes souvenirs restent embrumés. Le chaos, les cris des gardes, la peur dans les yeux des invités, le sang qui trempait mes orteils. Je me souviens vaguement être tombée à genoux, tandis qu'on me saisissait par les cheveux. L'odeur écœurante du sang emplissait mes narines, me donnant des haut-le-cœur. Mon nez baignait dans la flaque de sang.

On me fit passer des menottes autour des poignets. Une foule de curieux s'agglutinait déjà aux portes de la terrasse, que les gardes essayaient en vain de maitriser. Le cadavre d'Elliot fut emporté à l'abris des regards, mais certains l'aperçurent et nous insultèrent pour la mort de leur ami.

Le tireur d'élite avait décampé. Nous étions les parfaits coupables.

On me força à me relever. Pantelante, j'avais cherché dans la foule, dans l'espoir que quelqu'un nous défende. Je n'avais rencontré que des regards haineux. Savaient-ils ce qu'Elliot avait fait pour nous ? L'auraient-ils traité de traitre, lui-aussi, s'ils savaient toute l'aide qu'il nous avait apporté ?

C'est là, que je le vis. Le Comte DeValois se cachait parmi les invités. À l'inverse que lui il souriait. Il avait tenu sa promesse. Nos regards se croisèrent. Ma colère se réveilla. Je me débattis. Un coup de crosse de fusil dans la tempe me fit perdre connaissance.

Je me réveille bien plus tard avec la sensation d'un pieu dans ma poitrine. Je ne reconnais pas l'endroit où je suis. Deux gardes me trainent le long d'un interminable couloir, chacun me tenant fermement un bras.

La peur me creuse le ventre. Les menottes ùe pincent la peau.Je serre les points afin qu'ils ne remarquent pas mes mains tremblantes. Aussitôt, une décharge m'électrifie, m'arrachant un cri qui se répercute contre les parois bétonneuses.

« Sauvez-nous. »

Les paroles d'Elliot résonnent en écho au creux de mon oreille. Ce n'était pas un ordre, il me suppliait de le sauver, comme tant d'autres. J'ai lamentablement échoué, comme j'ai échoué à me sauver moi.

Les plans. Les plans holographiques du Laboratoire Central, pour lesquels Elliot a donné sa vie. Galen les avaient sur lui. Où est-il ? Je ne l'ai pas revu depuis que les soldats m'ont plaquée au sol. Est-ce possible qu'ils l'aient déjà tué ?

Je me débats avec encore plus de férocité, ignorant les décharges qui courent sur ma peau. J'essaye de les stopper. Je cris, je leur mords les doigts. L'un deux me frappe au visage en m'intimant de me taire. Mon nez craque et un filament de sang inonde mes lèvres.

Je suis trop sonnée pour riposter. Une porte s'ouvre et ils me jettent sans ménagement dans ma cellule. Mon corps est secoué de soubresauts. Une paire de mains me saisit par les épaules et me ligote de force à une chaise. Je reconnais l'odeur des gants stériles en latex. Le médecin m'injecte une éguille dans le bras. Je ne ressens plus que la douleur. Le liquide me brûle les veines et remonte jusque dans mon cerveau. Il me provoque d'horribles hallucinations.

Je revois les bombes exploser autour de moi, réduisant mon village en cendre. La corde de la potence se resserre autour de mon cou. J'étouffe. Je me débats comme un asticot. Le tintement d'un miroir brisé résonne dans mes oreilles, ses fragments s'infiltrent dans ma peau. L'instant d'après, le monstre de la Taverne est à mes trousses. Ses hurlements me font trembler de tout mon être.

Je me plis de douleur. Je hurle à l'agonie, tente de me débarrasser des liens qui me maintiennent à ma chaise. Ce supplice m'est insupportable. Je sombre plusieurs fois, avant d'être réveillée par de nouvelles visions. Je revois ma mère, Luke, Rose, Galen. Ils souffrent.

« C'est de ta faute ! Me hurlent-ils »

Le feu qui brûle dans mes veines ne s'arrête pas. Au fur et à mesure des minutes, des heures, je le sens s'atténuer. Je ne serais dire combien de temps a passé depuis le Bal de Minuit. Je sais simplement qu'il ne m'en reste pas beaucoup avant qu'on décide à me tuer.

The Price of FreedomOù les histoires vivent. Découvrez maintenant